A 33 ans elle fait ses premiers tours de roues au semi-marathon en fauteuil, un an plus tard elle est championne de France. A 35 ans elle vise les JO de Paris.
L'ascension fulgurante Véni Murugan impose le respect. En à peine deux ans de pratique elle tutoie des vitesses dignes d’une para-athlète expérimentée. En un an, elle passe de 14km/h à 27 km/h en vitesse de pointe. Grâce notamment à un stage effectué avec l’équipe de France.
Actuellement, le seul frein à sa progression, c'est son fauteuil qui n’est pas à sa taille. Ce n’est pas vraiment le sien, car celui-ci lui a été prêté par l’entraîneur de l’équipe de France. “Le premier semi-marathon que j’ai couru avec, j’ai été championne de France [...] j’ai fini dans des conditions compliquées avec des hématomes parce que le fauteuil n’était pas adapté[...] mais le mental était là, pour passer la ligne d’arrivée”.
"Je ne lâche jamais"
Un mental d'acier, un goût prononcé pour le challenge, c’est vraiment ce qui définit cette athlète. Touchée par une scoliose sévère très jeune, Véni arrive seule de l’île Maurice à l’âge de 6 ans. Elle devient paraplégique à l’âge de 10 ans, suite à une opération de la colonne vertébrale qui tourne mal. À 35 ans, sa vie est une succession de challenges. Elle passe les 11 premières années en France loin de sa famille, passant d’hôpitaux en centres de soins. “Quand je suis arrivée ici, je ne savais pas parler français, il a fallu une période d’adaptation très dure[...] Très vite, j'ai su ce que je voulais faire. Mais ça a pris 3 ans pour trouver une école d’esthétisme qui veuille bien de moi en tant que personne handicapée”
Une fois son diplôme d'esthéticienne en poche, elle se lance à son propre compte. Aujourd’hui, elle s’occupe du bien-être de plus de 300 patients handicapés, à Richebourg, dans la Fondation Mallet. Donc cet emploi est synonyme d’autonomie. Cette autonomie, c'est une de ses nombreuses victoires contre la fatalité. “L’autonomie ça coûte cher, ça demande beaucoup de donner de soi-même, mais au final on est libre”.
Cette liberté acquise lui a permis de faire ses choix de vie, qui l’ont emmené vers la compétition. En même temps qu’elle découvre la course de demi-fond en fauteuil, elle découvre aussi la réalité d’une vie d’athlète de haut niveau. Beaucoup de sacrifices et un entraînement poussé et suivi. Et faute de club capable de la suivre, elle s’est créé sa propre équipe. Pour sa préparation physique, malgré son aversion pour la musculation et les salles, elle pousse la porte d’une salle de sport et demande au gérant de la coacher. Yannick Affichard est depuis devenu son préparateur physique et un de ses plus fervents supporter. “La volonté d’aller beaucoup plus loin a permis à Véni de défoncer quelques portes, elle sait qu’on n’a rien sans rien. Du coup, je suis obligé de la freiner, sur la plupart des exercices, je lui conseille de faire une minute de pause entre deux séries. Ben souvent la minute de pause... elle oublie” .
Sur la piste du Stade Jean Bruck de Dreux, elle enchaîne les tours de pistes par tous les temps. Trois séances de deux heures par semaine sur piste et le reste de la semaine elle roule sur la route. Les échéances pour être sélectionnée pour les JO se rapprochent à grands pas, Véni met les bouchées doubles. Sa crainte, c'est de ne pas recevoir son nouveau fauteuil à temps. Un investissement de plus de 20 000 euros que la Ville de Dreux va financer à moitié. L’autre moitié provient d’entreprises partenaires et de mécènes.
“Quand on est sportive, on veut toujours viser le meilleur, et même quand on a atteint ses objectifs, on voit toujours quelque chose à améliorer...”