À l'opposé de la majorité des communes en Centre-Val de Loire, la ville de Dreux au nord de l'Eure-et-Loir a placé la liste La France Insoumise-Union Populaire en tête des élections européennes du 9 juin avec un score de 37,77% des suffrages exprimés. Ces résultats, également observés dans la commune voisine de Vernouillet, sont aussi un pied de nez à l’histoire d’une cité marquée par l’ascension du Front National il y a 40 ans.
En 1983, Dreux est à la une de tous les journaux. Le RPR, l’ancêtre de LR, conclu un accord avec le FN pour tenter de gagner la mairie. Après la victoire, le FN local, dirigé par le couple Jean-Pierre et Marie-France Stirbois, obtient 10 élus dont trois adjoints. Cette alliance suscite des manifestations et même quelques heurts.
Agnès Cueille, alors étudiante, y participe et se souvient de toutes ces caméras de télévisions, françaises ou étrangères, venues filmer « la ville des immigrés ».
Cette stigmatisation est à la base de son engagement politique à gauche.
En 2016, elle crée le Groupe d’Action LFI de Dreux, chargé de préparer toutes les échéances électorales locales au nom de La France Insoumise.
Aux législatives de 2022, la NUPES, emmenée par LFI, est en tête du premier tour dans la circonscription de Dreux.
Mais le résultat de 2024, 37,7% va au-delà de toutes les espérances. C’est une surprise pour la militante et co-animatrice de LFI Dreux.
On ne s’attendait pas à être aussi hauts. C’est notre ténacité qui a payé. On a été de toutes les luttes contre les lois Macron et on est les seuls à travailler en permanence dans tous les quartiers populaires de la ville.
Agnès Cueille, co-animatrice de LFI Dreux
Pour l'Insoumise, l'actualité, le conflit Israélo-palestinien, a sans doute joué un rôle dans le score LFI.
Les militants locaux ont sans cesse mobilisé les quartiers populaires par des manifestations réclamant un cessez-le-feu à Gaza.
Cet engagement en faveur de la Palestine n'a pas laissé les drouais insensibles, mais taxer la victoire locale de "vote communautariste" parait "caricatural" pour la fondatrice du groupe LFI de Dreux.
"Bien avant le conflit au Proche-Orient, nos manifestations contre l'ensemble des lois antisociales des macronistes avaient rassemblé des habitants de tous les quartiers et pas simplement des familles issues de l'immigration" explique-t-elle.
Désormais, les insoumis drouais ont la responsabilité de bonifier ce succès lors des législatives anticipées.
L'autre surprise est bien évidemment cette dissolution de l'Assemblée vue comme "une décision insensée d'un petit monarque qui joue la France aux dés".
Pour éviter l'arrivée au pouvoir du RN, les insoumis de Dreux tendent à nouveau la main aux autres formations de gauche.
Avec cependant un peu d'amertume, car des socialistes se sont alliés aux centristes lors des municipales de 2020 et la plaie est encore ouverte.