Ils redoutaient la fermeture, mais ce sont finalement les sites de Vannes et Cholet qui vont faire les frais de la restructuration du groupe Michelin. Les 164 salariés jocondiens vont pouvoir poursuivre leur production dans l'immédiat, mais pour combien de temps encore ?
Les 1254 salariés des usines Michelin de Vannes et de Cholet vont devoir cesser leur production, au plus tard début 2026. L'annonce, brutale est tombée ce 5 novembre 2024, ainsi justifiée par le groupe :
"Une décision devenue inéluctable en raison de la transformation structurelle du marché des pneumatiques Tourisme-Camionnette et Poids-Lourds et de la dégradation de la compétitivité de l'Europe, notamment du fait de l'inflation et de la hausse des prix de l'énergie."
Des fermetures d'usine désolantes, bien sûr, pour les 164 salariés de Joué-lès-Tours qui pensent à leurs collègues du Morbihan et du Maine-et-Loire.
Mais qui ressentent, également, un certain soulagement, car ils craignaient, depuis plusieurs semaines, que le site jocondien fasse les frais de cette restructuration du groupe. Ils vont donc poursuivre, pour l'instant, leur production, mais avec bien des incertitudes sur l'avenir.
Plus de pneus, mais des membranes de cuisson et tissus calandrés
À Joué-les-Tours, l'usine Michelin (qui a déjà perdu plusieurs centaines de salariés) ne fabrique plus de pneus depuis 10 ans, mais des membranes de cuisson nécessaires à leur production. Des membranes de toutes tailles et dimensions, aussi bien pour des pneus de tourisme, que de poids lourds ou d'avions. Joué-lès-Tours est le premier site de production au monde, devant ceux du Canada ou de Chine :
"C'est stratégique, c'est vraiment important, estime Gaëtan Bernard de Courville, directeur industriel. Nous produisons ici, à Joué-les-Tours, 40% des membranes du groupe, essentiellement pour l'Europe, mais également pour le monde entier sur les petites séries."
Déshabiller Pierre pour habiller Paul
Mais l'inquiétude des salariés concerne plutôt l'autre unité de production de l'usine jocondienne, celle des tissus calandrés que l'on retrouve à l'intérieur des pneumatiques. Car le principal client de ces tissus était l'usine de Cholet, désormais condamnée à la fermeture...
"Il va y avoir un rééquilibrage entre les différents sites de production de calandres en Europe, explique Emmanuel de Villenaut, directeur du site. Ce que l'on perd avec Cholet, on va le récupérer avec d'autres sites, de manière à maintenir une activité."
Des propos qui se veulent rassurants, mais qui laissent sceptique le représentant du personnel Jérôme Bourgeon, secrétaire du CSE :
"Déshabiller Pierre pour habiller Paul, pour nous, cela n'a pas de sens, d'autant que cela implique des coûts supplémentaires pour l'entreprise. Pour compenser la perte de Cholet, il faudrait qu'on envoie des tissus calandrés en Allemagne, en Espagne ou en Italie, alors qu'ils ont les outils pour les produire !"
Soulagés d'avoir échappé, pour cette fois, à la fermeture définitive de leur usine, les salariés de Michelin se posent encore bien des questions quant à la pérennité du site jocondien.