Covid-19 : le blues des châteaux privés du Centre-Val de Loire

Privés de visiteurs, les châteaux du Val de Loire doivent continuer à financer l'entretien et la rénovation de leur patrimoine. Un véritable casse-tête, alors que la sortie de crise semble encore loin.

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"En 2020, c'est vraiment zéro" : privés de visiteurs en raison de la crise sanitaire liée au Covid, les propriétaires de châteaux du Val de Loire peinent à remplir
les coffres et entretenir leur bout de patrimoine. 

Une forêt de tourelles en tuffeau surplombe l'Indre, qui coule paisiblement au fond du vallon. Le superbe château d'Ussé et son cadre idyllique sont célèbres dans le monde entier pour avoir inspiré Charles Perrault, lors de l'écriture de La Belle au bois dormant. Mais la situation des châteaux privés n'a actuellement rien d'un conte de fées.

"Cette année, l'absence de visiteurs a représenté une perte de recettes d'environ 30%, essentiellement au printemps", regrette Stanislas de Blacas, le fils du propriétaire. En 2020, le château, qui emploie onze salariés, a vu 400 000 euros s'envoler, soit la somme réinvestie tous les ans dans les rénovations. Ainsi, la famille De Blacas a dû financer 100 000 euros sur ses fonds propres, les 300 000 restants seront pour plus tard.

"Il ne faudrait pas que ça dure très longtemps, c'est dommage de ne pas pouvoir restaurer", insiste M. de Blacas, pointant du doigt une lucarne sculptée de la façade Renaissance du château. "On a refait les trois autres ces dernières années. C'est un budget de 60 000
euros. Ça a été reporté jusqu'à ce que la situation revienne à la normale
", explique-t-il avant de détailler la longue liste des chantiers à lancer rapidement: toiture, balcon, arche, etc. "On contribue à préserver le patrimoine de la région, à préserver des emplois aussi", assure M. de Blacas.

Dans un petit village comme Rigny-Ussé, les agriculteurs ont disparu au fil des ans mais grâce au château qui fait venir des visiteurs "d'Asie, d'Amérique du Nord, ça amène tout un environnement positif pour l'économie locale", explique-t-il.


"Ça ne pardonne pas"


A quelques kilomètres d'Ussé, le château de Gizeux trône, lui, au bout d'une allée d'arbres gigantesques. Maintes fois remanié au fil des siècles, plus modeste que son prestigieux voisin, il n'accueille que 10 000 visiteurs par an. Avec 6 000 touristes au compteur, près de la moitié des recettes annuelles se sont envolées, soit quelque 100 000 euros en moins dans les caisses des De Laffon.

"On a dû repousser complètement tous les travaux. On espère les faire en 2021, mais ce n'est pas encore gagné", témoigne Stéphanie de Laffon. "Un lieu comme celui-ci, ça ne pardonne pas. Si vous reculez, ce ne sont plus des petits travaux, ce sont d'énormes travaux qui deviendront insurmontables", s'inquiète-t-elle. "En 2020, c'est vraiment zéro. On a fait l'entretien urgentissime mais on n'a pas pu faire une vraie phase de travaux", admet-elle, regrettant la présence d'une bâche sur le toit des écuries, et l'eau qui s'infiltre dans la chapelle.

Monument historique, le château perçoit des aides du ministère de la Culture, sur la base d'une participation. Encore faut-il être suffisamment en fonds pour lancer le chantier...

Plus au sud, le château du Rivau domine les champs alentours. Entouré de ses jardins, de ses paons et de ses oeuvres d'art, il a accueilli 40 000 visiteurs en 2020, contre 60 000 habituellement. Caroline Laigneau emploie neuf salariés pour faire tourner les deux restaurants et le petit hôtel. Si la jeune propriétaire a maintenu le cap grâce aux aides de l'État, elle s'inquiète plutôt pour son petit coin de Touraine où le château anime habituellement la vie locale avec ses fêtes et expositions, "dans un endroit où il n'y en a pas beaucoup".

"On est dans un lieu de vraie misère culturelle et sociale", constate-t-elle. "Il n'y a pas d'activité sociale, plus de bar, plus de restaurant, plus de lieu de rencontre dans les villages." "On n'a plus personne avec qui partager notre amour de ce patrimoine qui nous a été confié", abonde Mme de Laffon, "C'est un petit peu comme si on était des acteurs sans théâtre ou des chanteurs sans public".

 

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