Le nombre de ménages incapables de payer leurs factures d'électricité a fortement grimpé en 2023, en lien avec la hausse des tarifs de l'énergie, et avec l'inflation en général, qui a fragilisé des personnes pour qui, jusqu'ici, tout allait bien.
Ce 1ᵉʳ février 2024, les tarifs de l'électricité ont encore augmenté. Sur la facture en fin de mois, la hausse devrait être comprise entre 8,7 et 9,8% pour la très grande majorité des ménages. En additionnant les hausses de février 2022 et février et août 2023, l'augmentation des prix avoisine les 43% en seulement deux ans.
La faute à la fin du bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement pour contrer l'augmentation du prix des énergies due à la guerre en Ukraine. Et qui doit disparaître d'ici à la fin 2025, pour des raisons budgétaires.
Mais à quel prix. En 2023, avant même la nouvelle hausse, le nombre de ménages en situation d'impayé a augmenté. Selon France Bleu Berry, les départements ont dû mettre la main à la poche. Dans le Cher, le fonds de solidarité pour le logement a distribué 568 000 euros d'aide, pour soutenir des consommateurs incapables de régler leur facture l'année dernière, soit une hausse de 17% par rapport à 2022.
Paupérisation généralisée
Et cette situation ne se limite pas au Cher. Le Loir-et-Cher constate également une hausse du nombre du montant des aides. Ce dernier est ainsi passé de 271 000 à 326 000 euros entre 2021 et 2023, soit une augmentation de 20%. Augmentation également du nombre de dossiers déposés, +5,9% en deux ans. Le département indique également que les factures de plus de 800 euros représentent en 2023 un ménage aidé sur trois, contre un sur quatre deux ans plus tôt.
Dans l'Indre, les montants versés par le FSL étaient moins importants 2023 (71 000) qu'en 2022 (88 000 euros). Un Inversement par rapport aux autres départements qui n'est pas lié aux tarifs de l'électricité. En effet, "la provision sur charges des bailleurs sociaux avait été sous-estimée en 2021 ce qui a abouti à des régularisations en défaveur des locataires", explique le département. À noter que les requêtes adressées au FSL de l'Indre étaient malgré tout plus nombreuses en 2023 (235 demandes) qu'en 2022 (222).
Le constat reste inquiétant du côté de l'association Consommation logement cadre de vie (CLCV). Selon la présidente de la CLCV d'Indre-et-Loire, Marie-Claude Fourrier, "nous avons une vingtaine de personnes en plus chaque mois qui viennent nous voir avec ce problème spécifiquement". Ce qui représente une hausse de 25% en un an environ.
Toujours selon Marie-Claude Fourrier, ces nouveaux arrivants étaient, jusqu'à 2022, "dans une situation intermédiaire, et terminaient le mois normalement". Mais, avec la hausse des prix de l'alimentation, des carburants, de l'énergie, "ils se mettent à compter".
Beaucoup étaient déjà fragilisés, et ils se sont retrouvés à ne pas payer leur électricité s'ils voulaient payer leur loyer.
Marie-Claude Fourrier, présidente CLCV Touraine
Sur la question des impayés d'électricité, la CLCV d'Indre-et-Loire accueille en très grande majorité (70% environ) des personnes vivant en HLM. Mais aussi une bonne partie de locataires du parc privé. "Ça ne veut pas dire qu'ils ont les moyens, beaucoup auraient le droit à un logement social, mais ils ne peuvent pas en avoir pour des raisons diverses et variées", assure Marie-Claude Fourrier.
Pour leur venir en aide, l'association approche les bailleurs sociaux pour négocier des échéanciers, des décalages de règlement de loyer pour permettre aux familles de payer leur électricité, et ne pas se retrouver avec une puissance minimale de courant pendant l'hiver. Car, si la coupure est interdite pendant la trêve hivernale, les fournisseurs ont la possibilité de réduire la quantité d'électricité envoyée chaque jour à un ménage en situation d'impayé.
Des solutions précaires
L'association tient également des réunions d'information pour conseiller les particuliers sur quelques bons gestes à avoir pour réduire sa facture. "On les entend quotidiennement, mais tout de même : décaler sa lessive en période creuse, éteindre l'électricité quand on quitte une pièce, débrancher ses appareils en veille, qui consomment beaucoup plus que ce qu'on ne croit." Autant de pratiques "sans faire d'effort particulier" qui peuvent faire économiser 80 euros par an. Une somme non négligeable quand chaque euro compte.
En dehors des HLM, où le chauffage est centralisé, le bon geste le plus mis en avant est de baisser la température de son logement. 19 degrés, conseillait le gouvernement à la fin de l'année 2022. Mais certains ménages descendent plus bas, bien plus bas. "On en a qui mettent leur pièce principale à 17 et leur chambre à 15", raconte Marie-Claude Fourrier. Évidemment, "ça a un impact sur la facture". Au prix du confort.
Ainsi, selon le dernier rapport sur le mal-logement de la Fondation Abbé-Pierre, publié ce 31 janvier, 26% des ménages déclarent avoir eu froid chez eux en 2023. C'est plus d'un ménage sur quatre, et presque deux fois plus qu'en 2020 (14%). Et, parfois, avoir froid ne suffit même pas à pouvoir payer ses factures.
Comme indiqué plus haut, le fonds de solidarité pour le logement (un par département) peut venir en aide à des ménages en incapacité de payer diverses sortes de frais liés au logement, et notamment les factures d'électricité. Des aides soit sous forme de prêt, soit de subvention sans nécessité de remboursement. Les renseignements sur la marche à suivre sont disponibles sur le site service-public.fr.