Lundi 22 janvier, la ville de Tours a étendu l'extinction de l'éclairage public dans plusieurs secteurs de la ville entre 1 heure et 5 heures du matin. Si la mesure est justifiée par un souci de réduction énergétique et de préservation de la biodiversité, la question de la sécurité - et le sentiment d'insécurité - dans les rues non éclairées continue de faire débat.
Depuis 2022, dans plusieurs quartiers de la ville tourangelle - Douets, Blanqui, Febvotte - l'éclairage public est éteint entre 1 heure et 5 heures du matin. L'expérimentation sera désormais étendue à une grande partie de Tours - dans les quartiers Beaujardin, Giraudeau, La Fuye-Velpeau, Lakanal-Strasbourg, Lamartine et Michelet.
Comme pour les 40% de communes en France qui ont fait le choix d'éteindre au moins une partie de leurs éclairages la nuit, les objectifs sont à la fois une économie énergétique et financière, ainsi que la préservation de la biodiversité et le sommeil des riverains impactés par la pollution lumineuse. La généralisation de cette pratique inquiète parfois les habitants qui craignent une augmentation de la criminalité.
À partir d'aujourd'hui, les lampadaires de la ville s’éteindront au cœur de la nuit.
— Ville de Tours (@villedetours) January 22, 2024
Désormais, l’éclairage public sera éteint :
📆 Du lundi au jeudi de 1h à 5h
📆 Le vendredi et samedi de 2h à 5h
📆 Le dimanche de 2h à 6h
On vous explique ⤵️ pic.twitter.com/5S1K2VVAps
La ville de Tours a décidé d'étendre l'extinction de l'éclairage public après les "retours positifs de l'expérimentation", raconte Martin Cohen, adjoint à la transition énergétique à la mairie."Une majorité des riverains à qui nous avons demandé un retour d'expérience était favorable à l'expérimentation. Sur les deux premières semaines de l'expérimentation, nous avons certaines réactions négatives, mais il n'y a pas eu de levée de boucliers des riverains."
L'insécurité n'augmente pas contrairement au sentiment d'insécurité
Pour autant, cette décision a été critiquée par des groupes d'opposition au conseil municipal. Christophe Bouchet, ex-maire de Tours, et membre de l'opposition, estime que cette décision "radicale" est une "mauvaise idée". "Ça donne un sentiment d'insécurité - à tort ou à raison - et qui est quelque chose dont les gens se plaignent déjà", estime-t-il. Pour lui, c'est à cet horaire, au cœur de la nuit, que les personnes, notamment les femmes, en auraient le plus besoin. "Rentrer dans la nuit noire n'est pas sécurisant."
Les chiffres nationaux donnent raison à ce sentiment d'insécurité - 91% des Français estiment que l'éclairage public joue un rôle important pour leur sécurité - mais pas sur l'insécurité factuelle. Aucune étude ne montre une augmentation de la criminalité dans les zones non éclairées. Ce serait même plutôt le contraire : la plupart des délits ayant lieu en journée.
Le constat est le même à Tours explique Sabrina Berthe-Cosse, cheffe de l'Etat major à la Direction Départementale de Sécurité Publique d'Indre-et-Loire. "Statistiquement, nous n'avons enregistré aucun changement notable sur tous les faits délictuels depuis le début de l'expérimentation."
Une extinction progressive à Tours
Ceci dit, Martin Cohen dit vouloir ne pas négliger ce sentiment d'insécurité. "Contrairement à d'autres villes où tout a été éteint d'un coup, nous avons fait en sorte d'y aller progressivement et d'intégrer les riverains à la réflexion", explique le maire-adjoint. En effet, tout ne sera pas éteint : les grands axes routiers et l'hypercentre resteront allumés.
"En cas de besoin, de la police notamment, nous avons mis en place un système qui permet de rallumer directement depuis un téléphone toute une zone", précise Martin Cohen. Une fonctionnalité qui n'a jamais été utilisée durant toute la période d'expérimentation. La municipalité assure également avoir vérifié que toutes les caméras de surveillance fonctionnaient sous infrarouge. "Seules 5% ne sont pas adaptées à l'infrarouge, rapporte Martin Cohen. Mais ces rues resteront allumées tant que les caméras n'auront pas été changées".
Renouvellement de l'éclairage public en lampes LED
Pour l'opposition, ces mesures d'extinction sont trop radicales. Christophe Bouchet estime que c'est un "coup de communication". Pour lui, la modulation qu'offrent les lampes LED permet d'éviter de plonger les rues dans le noir complet. "Il faut se concentrer sur le renouvellement de tout l'équipement en LED. Les vraies économies se feront là."
Le passage en 100% LED fait partie de la feuille de route de l'actuelle municipalité, mais cela coûte cher. Au rythme actuel à hauteur de 1 million d'euros par an, il faudra environ douze ans pour obtenir un éclairage municipal totalement en LED (actuellement, Martin Cohen précise qu'il est de l'ordre de 40%). La mairie estime que grâce aux économies d'énergie réalisées pendant l'extinction des lumières la nuit, elle économisera 500 000 euros par an.