A l'école de journalisme de Tours, les étudiants sont à la fois rassurés par la tenue des travaux pratiques pendant le confinement, et inquiets quant à leur insertion professionnelle dans ce contexte sanitaire inédit.
A la fin du premier confinement, huit étudiants sur dix déclaraient avoir décroché dans leurs études. Ceux de l'Ecole de Journalisme de Tours ne semblent pas avoir été découragés par la situation : "Peut-être certains ont eu envie de se diriger vers un métier qu'ils jugent "plus essentiel" mais pour moi le journalisme est une profession essentielle" nous raconte Sophie Podevin, étudiante en deuxième année, spécialité radio.
Certains ont même profité de cette période pour monter des projets en parallèle de leurs études. C'est le cas de Thibaud Hue, également élève de deuxième année en spécialité radio. Avec une amie, il a créé Mosaïque Rap, un média radiophonique dédié à la musique urbaine. Si le premier confinement lui a été bénéfique, lui et ses camarades s'interrogent aujourd'hui sur cette nouvelle année scolaire, elle aussi très perturbée par la crise du Coronavirus.
"Les professeurs ont appris de leurs erreurs et envoient des mails rassurants"
Pendant le premier confinement, la communication était assez partielle entre le personnel enseignant et les élèves. Les professeurs s'exprimaient très peu car bien souvent, ils n'en savaient pas plus que les étudiants. Résultat : des mails sans réponse et des réunions zooms improvisées pour essayer de s'organiser. "Beaucoup d'étudiants étaient angoissés, stressés et aussi en colère parce qu'ils ne recevaient pas d'information" nous raconte Sophie. Chacune des personnes interrogées soulignent cependant la réactivité et la disponibilité du corps enseignant en ce début de second confinement : "Les professeurs ont appris de leurs erreurs et nous envoient des mails rasssurants".Les étudiants de première année semblent d'ailleurs constater cette amélioration. Parmi eux, Marion Chevalet note que l'EPJT est "plus réactive" que sa précédente école : "Ils nous ont demandés si nous avions une bonne connexion Internet chez nous. Ils ont aussi envoyé un questionnaire pour nous demander si nous préférions être confinés à Tours ou chez nos parents pour ensuite prendre les décisions adéquates".
"L’annonce de ce confinement était beaucoup plus compliquée pour moi car lors du premier j’avais beaucoup de cours théoriques à distance. Là on entre dans une phase de spécialisation et j’avais peur de perdre un mois de pratique" nous raconte Rémi Carton, étudiant en deuxième année de master, spécialisé en télévision. Cette crainte était présente chez plusieurs autres étudiants. L'école a donc saisi le rectorat pour maintenir les travaux pratiques sur le campus pour les élèves de télévision et radio, requête qui a été acceptée.
Des enseignements très impactés par la crise sanitaire...
Cassandre Riverain, étudiante en master 2, spécialité pressse écrite, s'attendait à ce que ses cours soient assurés à distance car sa filière ne nécessite aucun matériel particulier : "J'étais un peu déçue au début parce que les autres spécialités auront la chance de sortir et d'aller sur le terrain. Elles pourront voir de nouvelles choses". La jeune femme a choisi cette année un parcours "coopération internationale" grâce auquel elle aurait dû se rendre à l'étranger pour un projet journalistique. Crise sanitaire oblige, ce voyage ne peut pas avoir lieu pour l'instant : "Le parcours permet malgré tout de discuter avec des étudiants étrangers même si ce n'est que par téléphone" relativise-t-elle.En première année, les professeurs dispensent essentiellement des cours théoriques et ce n'est pas toujours facile de les suivre de chez soi : "J'ai très clairement l’impression de décrocher et d’être moins attentive que je ne pourrais l’être en présentiel. On n'a pas toujours les caméras activées donc c'est tentant de faire autre chose à côté. On dit que pour être journaliste il faut s’adapter facilement et être autonome : c'est aussi le cas pour travailler à distance" constate Marion.
Alors que la deuxième vague de contamination se profile, Rémi, étudiant en deuxième année, redoute les difficultés d'accès au terrain : "Comme nous sommes encore étudiant, c'est compliqué de convaincre les gens de nous laisser venir quand le reportage n'est pas publié. Surtout en télévision où nous ne pouvons pas faire les sujets par téléphone". Un obstacle qui empêcherait ces futurs journalistes de mener à bien leurs travaux pratiques.
Sophie craint quant à elle que sa "génération soit défavorisée par rapport aux autres". Selon elle, la crise du Coronavirus aura un impact certain sur son avenir : "il y a une vraie angoisse parce que je me demande si ma formation va être valable ou si je vais trouver un travail à la fin de mon M2. J'essaye de tout préparer pour ce grand saut mais ça me fait peur" nous confie-t-elle.
.. pour une arrivée sur le monde du travail encore très floue
"Ça peut tellement bouger en un an, il peut se passer tout et n’importe quoi. Le marché de l’emploi peut se contracter encore plus. Je n’ai pas de doute quant au fait qu’on sera formés correctement mais j’ai plus d’inquiétude concernant l’insertion" explique Thibaud. Selon lui, la radio est un marché moins ouvert que la télévision ou la presse écrite. Il a conscience qu'il devra se vendre sur un marché du travail déjà très touché par la précarité, et impacté par la crise sanitaire.Cassandre, elle, ne réalise pas vraiment qu'elle sera plongée dans le monde du travail dans moins d'un an . Elle sait que ce sera compliqué, mais cela n'en demeure pas moins impossible pour elle : "On sait que les contextes économique et sanitaire sont compliqués mais les nouvelles idées seront les bienvenues aussi. Du changement est en train de se faire, notamment concernant la place des femmes et le traitement des informations".