L'Université de Tours et l'Académie des sciences de Chine ont annoncé une découverte qui permettrait de lutter, sans pesticides et de manière efficace et ciblée, contre le frelon asiatique, espèce invasive menaçant la biodiversité européenne.
La fête des amoureux aurait-elle donné des idées aux scientifiques ? Pour lutter contre le frelon asiatique, des chercheurs de l'Institut de recherche sur la biologie de l'insecte (IRBI), qui dépend du CNRS et de l'Université de Tours, ont mené un projet conjoint avec un centre de recherche chinois pour trouver une solution propre et efficace contre l'hyménoptère.
Une hormone sexuelle pour "piéger les mâles"
Et pour piéger les frelons, ils prévoient d'utiliser une phéromone sexuelle pour attirer les mâles loin des futures pondeuses et ainsi empêcher la création de nouvelles colonies. Les résultats de ces recherches, menées conjointement en France et en Chine, viennent d'être publiées dans la revue Entomologia Generalis.
"L'objectif, c'est d'attirer les mâles pendant la période de reproduction afin de les capturer" a expliqué le chercheur tourangeau Eric Darrouzet à nos confrères de la Nouvelle République. "À terme, on espère pouvoir réduire le nombre de colonies de frelons asiatiques en agissant sur la reproduction. Moins il y a de mâles, plus il est difficile pour les femelles reines de se reproduire."
Une invasion sur deux décennies
Le frelon invasif à pattes jaunes (ou frelon asiatique, Vespa velutina nigrithorax) est une espèce connue pour les ravages qu’il engendre sur les colonies d’abeilles, sur la biodiversité et les accidents qu’il entraîne chaque année, avec de nombreuses piqûres et plusieurs décès. Depuis la détection du premier nid en 2004, il s'est répandu sur tout le territoire français à partir du sud-ouest.
A ce jour, aucun dispositif de lutte efficace et sélectif n’est disponible sur le marché. Plusieurs projets consécutifs ont été financés par la région Centre-Val de Loire depuis 2011, et en 2018 un partenariat scientifique est né entre l'IRBI et le Xishuangbanna Tropical Botanical Garden basé à Kunming.
Les scientifiques, parmi lesquels Eric Darrouzet et la doctorante chinoise Yanan Cheng, ont identifié la phéromone sexuelle du frelon asiatique et l’ont testée comme appât, à la fois en Chine et en France.
Une technique à tester à partir de l'automne prochain
Dans les faits, il faudra attendre la prochaine saison de reproduction, au mois d'octobre, pour pouvoir tester sur le terrain ce genre de piège. Mais les résultats "laissent espérer le développement prochain d’un piège de lutte contre ce frelon invasif, en utilisant cette phéromone sexuelle comme appât sélectif", note le CNRS. En effet, contrairement aux pesticides ou à d'autres techniques, cette stratégies serait indolore pour la biodiversité et le voisinage.
En octobre 2020, les chercheurs de l'IRBI menés par Eric Darrouzet étaient déjà parvenus à imaginer une solution sans pesticides, basées sur les jets de vapeurs, pour éliminer les nids de frelon asiatique.