"Tout le monde est en souffrance" début de grêve pour onze services de l'hôpital pédiatrique de Clocheville

Les onze services de l'hôpital pédiatrique de Clocheville de Tours sont en grève ce lundi 2 octobre. Aides soignantes et infirmières alertent une fois de plus sur un manque criant de personnel. C'est la première fois que tous les services sont en grève en même temps, un rassemblement est prévu à 14h30.

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"Tout le monde est en souffrance, ce n'est plus tolérable", cette auxiliaire de puériculture travaille à l'hôpital pour enfants de Clocheville depuis 40 ans. Ce lundi 2 octobre, elle est en grève, comme ses collègues soignants des onze services de la structure. C'est la première fois qu'autant de services sont en grève en même temps. Un rassemblement est prévu à 14h30 dans la cour de l'établissement. 

Une mobilisation "qui va de l'aide soignante à l'infirmière, et soutenue par les médecins" insiste Christelle Doucin, élue CGT et investie dans les différentes instances de protection des salariés. 

Pendant une réunion de négociation avec la direction mercredi 27 septembre "aucune annonce n'a été faite, les agents ressortent avec les mêmes problématiques" affirme l'aide soignante. "On est à bout de souffle, ça va au-delà de l'épuisement" martèle Christelle Doucin.

Jeu de chaises musicales

Ce qui est appelé pudiquement "problématiques", c'est à la fois le manque criant de personnel à l'hôpital, et la désorganisation totale des services qui s'ensuit.

Arrêts ou absences, les calculs sont souvent mauvais, puisque les remplacements ne suivent pas la cadence. Les plannings deviennent alors un espace de jeu de chaises musicales.

Des collègues d'autres services sont appelés pour venir combler les trous, souvent pour une seule journée.

Une auxiliaire de puériculture, elle travaille depuis 40 ans à Clocheville

En interne, les titulaires doivent donc assumer leur travail, et tâcher de former les recrues d'un jour pour leur permettre d'être les plus efficaces possible. Tous les matins, c'est la même chose : "On a la boule au ventre." Combien de collègues présents ? Titulaires ou remplaçants au pied levé ? Combien de petits patients vont arriver ? Autant de questions qui ne trouvent de réponse qu'à la prise de service. Le remplacement systématique de tous les arrêts maladies ou absences, courts ou longs, fait donc partie des revendications.

Culpabilité omniprésente

Au quotidien, c'est aussi les changements intempestifs d'emplois du temps qui minent les troupes. Une après-midi de travail peut-être annulée à 11h30 pour 14h, histoire de rattraper un trop-plein d'heures quelques jours avant, ou d'anticiper d'autres besoins plus tard. 

Une impression de corvéabilité à merci plane. L'auxiliaire de puériculture ne compte plus les soirées entre amis annulées, les week-ends en famille avortés. "Dans tous les cas, on se sent coupable. D'abandonner nos patients si on refuse de venir travailler, et vis-à-vis de nos proches si on accepte."

Christelle Doucin d'affirmer : "Le planning doit être donné le 15 du mois précédent, et les présences le week-end s'alterner une semaine sur deux". Un principe qui est actuellement loin d'être appliqué. 

La difficulté de continuer à accompagner les familles

Avec toutes ces contraintes, difficile d'accompagner correctement les patients et leurs familles. Le métier d'auxiliaire de puériculture, c'est avant tout : "De rassurer un enfant qui pleure, jouer avec lui, expliquer les soins aux parents".

Autant de missions qui viennent se heurter à la réalité. Si personne n'est présent pour faire le ménage des chambres, il faut alors s'en occuper : "On le fait, mais c'est du temps en moins pour les patients." Et les services sont rapidement désorganisés.

On change les patients de chambre, on les transfère, puis en fait non. Imaginez le stress que cela représente pour les enfants et leurs parents.

Christelle Doucin, représentante CGT à l'hôpital Clocheville de Tours

Vient alors la frustration. Régulièrement, les équipes sont formées pour mieux accompagner et soigner. L'annonce d'une maladie, son explication, la pédagogie de la prise en charge... Mais au quotidien, impossible d'appliquer toutes ces nouvelles initiatives. 

Ça fait mal de voir des familles de patients de plus en plus stressées

Une auxiliaire de puériculture à l'hôpital de Clocheville

Croire à l'amélioration pour tenir

Après quatre décennies, notre auxiliaire de puériculture ne fait pas partie de ceux qui ont changé de carrière, "parce que c'est une vocation, je veux faire ça, et rien d'autre, depuis que j'ai six ans". Elle a pourtant vu ses conditions de travail évoluer, et pas dans le bon sens affirme-t-elle.

Si elle continue, c'est aussi parce qu'elle est toujours persuadée que les choses peuvent évoluer, "qu'on stoppe l'hémorragie". Son expérience et son implication syndicale lui permettent de tenir "sinon je me serais mis la corde au cou".

Une vocation qu'elle ne souhaite pourtant pas à ses enfants. Elle les a dissuadés de se lancer dans cette branche. "Je leur dis de faire un métier qui leur plaît, pas forcément qui fait gagner beaucoup d'argent, mais qui leur permette un équilibre familial".

Les stagiaires qui ne restent pas

La direction affirme de son côté avoir toutes les difficultés à recruter. Une soupe que les soignants ne veulent plus boire, bien qu'ils en constatent la véracité sur le terrain. 

Les stagiaires disent qu'ils ne resteront pas. Entre ce qui leur est enseigné et la réalité, il y a trop de différences.

Les salariés restent alors sous pression "les gens sont frustrés, tombent malade derrière. Quand vous vous sentez mal, tout va mal ensuite, on le sait".

Les cadres, de leur côté, enchaînent les réunions de service et tentent de pallier eux aussi les trous. Ils sont alors absents lorsqu'il faut parfois désamorcer les accrochages entre collègues épuisés.

La grève de Clocheville a déjà fait des émules ailleurs. A partir de la première heure, jeudi 5 octobre, le centre de nutrition localisé à l'hôpital de Bretonneau devrait lui aussi être en grève "tout grades confondus" affirme la source de cette information. Un préavis a été déposé fin septembre. Une réunion de négociation est prévue mercredi 4 octobre. 

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