Ce 8 mars, découvrez le parcours hors-norme d'Alice Métais et Typhaine Soldé. Elles ont dû lutter très jeunes contre les préjugés sur le handicap mais l’athlétisme a changé leurs vies. Aujourd’hui, sportives de haut niveau, elles visent les Jeux de Paris 2024 !
Concentre toi sur le chemin que tu as à parcourir, ne regrette pas ce que tu as vécu. Toutes les expériences et les cicatrices ont fait de toi la personne que tu es.
Ce lundi 8 mars, à 18 ans Typhaine Soldé fait partie des 8 femmes mises à l’honneur par le département d’Indre-et-Loire, une distinction pour l’engagement de cette jeune athlète de haut niveau, ambassadrice sportive de la Touraine pour Paris 2024.
Cette reconnaissance comme sportive de haut niveau, Typhaine n’aurait jamais pu l’envisager quand à l’âge de 11 ans on lui diagnostique un cancer du pied et qu’elle doit subir une amputation tibiale. Pour cette adolescente très sportive c’est un choc et après avoir joué au hand-ball avec des valides en 2016 c’est une rencontre avec Marie-Amélie Le Fur qui va lui ouvrir l’horizon.
Alice est déficiente visuelle, une maladie génétique rare détectée à l’âge de 8 ans, elle a une acuité visuelle d’1/10 ème à chaque œil. Alice a essayé la gymnastique, la natation mais c’est l’athlétisme avec un guide au début qui lui a donné ses premières sensations et l’a aidé dans l’acceptation de son handicap.
Elles n’auraient jamais imaginé faire partie de l’équipe de France d’athlétisme handisport, faire des podiums, battre des records, rêver de Paris 2024, pourtant c’est bien leur vie d’aujourd’hui. A force de persévérance, de détermination et de travail Alice, 19 ans et Typhaine, 18 ans conjuguent études et sport de haut niveau. Typhaine est au lycée Choiseul à Tours et avec un emploi du temps adapté sur 2 ans, qui englobe 12 heures de sport par semaine, finit sa terminale. Alice a eu son bac en juin et a commencé un BTS de communication en alternance sur 3 ans, une solution pour cumuler 25 heures de cours et 15 heures d’entrainement
« C’est très important de continuer des études car le sport peut s’arrêter à tout moment ». C’est ce qui est arrivé à Alice en 2019, rupture des ligaments à la cheville, 3 semaines avant le championnat du monde jeunes. « C’est un peu les risques du métier, j’ai été très frustrée mais j’ai eu le temps d’apprendre » apprendre à prendre le temps mais au repos Alice en a profité pour tourner dans la 5ème saison de SKAM. Alice a adoré la rencontre avec les comédiens et le thème du handicap invisible l’a beaucoup touchée. Une aventure de plus dans sa vie de vie d’athlète de haut niveau.
Le confinement et les changements
Mars 2020, le premier confinement a été très dur pour Alice et Typhaine, privées d’entrainement, puis c’est le Pôle Espoirs Athlétisme Handisport de Saint-Cyr- sur Loire, créé en 2017 pour accompagner les jeunes athlètes jusqu’aux Jeux paralympiques de Paris 2024 qui ferme ses portes pour devenir un Centre régional d’entraînement handisport à la rentrée de septembre. Et c’’est désormais au stade d’athlétisme de Grandmont, avec l’A3 Tours comme club support, que s’entraînent les deux amies.
Un grand changement car elles ne sont que toutes les deux en situation de handicap parmi des valides mais finalement elles apprécient toutes les deux ce nouveau challenge. « Nous sommes super contentes d’être intégrées, on a été très bien accueillies. Ca nous tire vers le haut. C’est très intéressant, eux aussi apprennent de nous », explique Alice Métais Athlète de haut niveau A3 Tours.
Nous, tout ce qu’on demande ici, c’est d’être considérées comme des valides, il n’y a pas de différence de fait, c’est juste qu’on peut s’entraîner avec beaucoup de gens. Moi ça me permet de fixer des objectifs par rapport à des valides et de me pousser plus loin. Pourquoi on serait différentes, Tout le monde a des différences, c’est ce qui permet de nous démarquer, sans mon handicap je n’aurais peut-être pas pu faire de l’athlétisme à haut niveau.
Pourtant, avant d’en arriver là le parcours de ces deux battantes n’a pas été un long fleuve tranquille.
Les années collège, des années noires
Alice et Typhaine ont toutes les deux subi du harcèlement et des mots qui font mal à l’adolescence. Alors qu’elles n’acceptaient pas du tout leur situation de handicap, il leur a fallu combattre les regards, les préjugés.
« J’étais très en colère, je ne voulais pas accepter la maladie, pour moi un handicapé c’était un bon à rien qui ne pourrait jamais rien faire ! J’étais une bonne élève mais comme j’avais une auxiliaire de vie scolaire, on disait que c’était facile, que j’avais de l’aide, comme la lumière me gêne, j’avais des lunettes noires aussi en hiver et des remarques, je voulais être normale !» raconte Alice. « Quand je suis revenue au collège, j’étais toute maigre avec une jambe en moins et une prothèse pas belle du tout, que je n’arrivais pas forcément à faire marcher, c’était des moqueries par rapport à tout ça. C’est des étapes mais c’est une période à ne pas oublier non plus car c’est ce qui nous a forgées aussi,» explique Typhaine.
Changer le regard des autres et lutter contre les discriminations, c'est leur combat. « Je pense que ça peut changer grâce à tout ce qu’on fait avec des journées de sensibilisation. Malgré le Covid on a commencé à intervient en milieu scolaire et on va continuer.»
« Ce sont des choses qui nous tiennent énormément à cœur toutes les deux car on pas mal souffert dans le passé. Je pense que ça peut être une aide pour les jeunes, les prévenir de certaines choses, que des fois on peut être méchant à cet âge- là sans le vouloir et qu’après ils risquent de le regretter, c’est un conseil qu’on leur donne, après ils font ce qu’ils veulent mais ils vont plus blesser les gens qu’avancer, eux. Il faut le faire, c’est pour lutter contre la discrimination face au handicap, face aux différences. Il y a encore beaucoup à faire mais les esprits changent. Les gens n’ont plus forcément peur du handicap, ils se posent juste des questions plus approfondies. »
« Il faudrait que plus de clubs sportifs aient des sections handisport, que les enfants en situation de handicap puissent accéder plus facilement à un sport, qu’ils voient que c’est possible » nous confie Alice.
Et Typhaine d'ajouter « Moi, je ne me mets aucune barrière, aucune limite dans ma vie de tous les jours, j’essaie, si je n’y arrive pas c’est pas grave mais j’aurais essayé »
Performances, records et ambitions
Avec une nouvelle structure régionale et un nouveau coach Guillaume Bonnet, Alice et Typhaine progressent dans leurs disciplines. Alice est devenue championne du 200 m en salle l’an dernier et Typhaine médaille d’argent au saut en longueur. Sélectionnée en équipe de France aux championnats du monde de Dubaï en février dernier elle est 10ème performeuse mondiale avec 4,84 m (première chez les moins de 20 ans) en améliorant son record personnel de 40 cm.
De bon augure pour le Grand Prix de Tunis, du 15 au 20 mars 2021. Alice sur 400 mètres et Typhaine au saut en longueur feront partie de l’équipe de France Une compétition internationale importante car elle est qualificative pour les championnats d’Europe et les jeux paralympiques. Des étapes à franchir les unes après les autres pour l’objectif ultime, les jeux de Paris 2024.
Si Alice et Typhaine ne ressentent pas de différences ou d’inégalités entre les hommes et les femmes au sein même du handisport le manque de visibilité, de médiatisation de ces sportifs et sportives reste criant. Pour elles les Jeux paralympiques de Londres en 2012 restent un exemple de reconnaissance de tous et toutes ces athlètes aux yeux du monde entier.