Tours : un traitement contre les symptômes du coronavirus à l'étude au CHRU

L'hydrocortisone, un corticoïde, est actuellement testé à Tours dans le cadre d'une étude sur l'efficacité de ce médicament en réanimation et en soins intensifs. Une lueur d'espoir qui pourrait porter ses fruits d'ici à l'été.

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Une étude sur l'efficacité possible de l'hydrocortisone, un médicament notamment prescrit contre l'insuffisance rénale, est menée depuis environ un mois au CHU de Tours. En théorie, comme l'explique le professeur Pierre-François Dequin, chef du service de médecine intensive et de réanimation au CHU de Tours, ce traitement corticoïde pourrait aider à compenser la réaction inflammatoire dangereuse déclenchée par l'organisme face au coronavirus, et qui est souvent l'une des causes de l'aggravation de la maladie.

Au départ, il s'agissait d'une étude portant sur l'efficacité de ce médicament face aux pneumonies, mais avec l'extension de la pandémie, la recherche a été rapidement ré-orientée vers le Covid-19. "On avait toutes les autorisations, le médicament et le placebo déjà à disposition dans les centres, on avait toute la logistique, ce qui a permis de débuter l'étude extrêmement rapidement", explique le professeur Dequin,  et surtout, avec une rigueur méthodologique "irréprochable" sur le plan scientifique.
 

 

"Conduire des recherches en situation d'urgence est complexe"

En effet, dans la pratique, les circonstances ont un peu bouleversé la démarche des chercheurs. "Les premières inclusions ont commencé il y a un mois, il y a à ce jour 127 patients, dont une cinquantaine arrive à trois semaines de traitement", détaille le chef de service. Les données statistiques de l'étude doivent ensuite être soumises à un comité de surveillance indépendant des tests. C'est à ce comité indépendant qu'il reviendra, à intervalles réguliers, de décider si l'étude doit être poursuivie ou arrêtée en fonction des résultats. "On essaie de sécuriser au maximum afin d'avoir une réponse sérieuse le plus vite possible."

Avec l'émergence récente du coronavirus responsable du Covid-19, les preuves irréfutables sur tel ou tel manquent. "Il y a des études qui ont été conduites sur deux autres infections virales, le SARS il y a une dizaine d'années et le MERS il y a cinq ou six ans, mais ces études n'avaient pas été porbantes à cause de la difficulté de mener des recherches en situaton d'urgence." En Chine, près de la moitié des patients graves ont reçu des corticoïdes comme l'hydrocortizone, "mais ce ne sont pas des essais randomisés, et le niveau de preuve qu'on peut leur attribuer n'est pas très bon. Il y a un signal en faveur de ce traitement mais en toute rigueur on ne peut pas aller plus loin."

 

Recherche clinique et débat public

Autre difficulté rencontrée par la recherche : sa réception par le public. En cette période d'incertitude, les réseaux sociaux se sont vite emballés autour des premières pistes de traitements évoqués, comme la chloroquine prônée par le docteur Didier Raoult, infectilogue marseillais. En théorie, la chloroquine et un de ses dérivés, l'hydroxychloroquine, pourraient éviter au Covid-19 de s'aggraver via une sur-réaction du système immunitaire. En pratique cependant, des chercheurs ont démontré que les deux études successives du docteur Raoult étaient faibles, voire carrément faussées par l'exclusion de certains patients du panel testé. "C'est très bien que la société s'interroge et s'intéresse à ces questions-là", commente le professeur Dequin, qui a toutefois des réserves sur l'empressement avec lequel la polémique peut enfler.

Il faut qu'on ait tous beaucoup d'humilité. On est volontiers sur un domaine qui sort de nos compétences. Quand j'entends des politiques s'emparer de ces questions-là avec des avis à l'emporte-pièce, ça me fait frissonner sur le manque de rigueur et de connaissances scientifiques qu'il y a derrière cela. Il faut être très prudent là-dessus. Tout cela doit être abordé avec recul, à froid et pas avec passion. Même s'il y a derrière cela la santé, la vie et la mort des gens, qui sont des sujets fondamentalement importants, l'analyse des données doit se passer avec un peu de recul et beaucoup de rigueur et d'humilité.

En attendant, les tests vont se poursuivre à Tours pendant encore plusieurs mois, au moins, le temps d'inclure le nombre de patients nécessaires pour confirmer ou infirmer l'hypothèse des chercheurs. Dans le meilleur des cas "on peut espèrer une réponse à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet", conclut le professeur Dequin. "On aura beaucoup de chance si est capables de faire les choses plus rapidement, mais on ne va pas perdre espoir."
 
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