L'abbaye de Déols, vieille de plus de mille ans, est engagée dans une démarche d'un certain nombre de sites affiliés à l'abbaye de Cluny pour entrer au patrimoine mondial de l'UNESCO.
L’abbaye bénédictine Notre-Dame-de-Déols va se porter candidate pour faire partie des sites clunisiens, engagés dans une démarche de classement "Cluny et des sites clunisiens" au patrimoine mondial de l’UNESCO. Une décision prise par la commune de Déols pour poursuivre la valorisation de ce site, qui fut en son temps une des plus importantes abbayes dépendant de cet ordre bénédictin en France.
Pourquoi Déols va candidater ?
Jeudi 26 août, la visite du président et du pirecteur de la Fédération européenne des sites clunisiens devrait permettre à Déols de voir si elle est en capacité de déposer un pré-dossier de candidature. Delphine Geneste, maire de Déols nous en dit plus : "l’objectif de la visite, c’est de voir notre site, son potentiel et voir si on peut prétendre à déposer ce pré-dossier, pour rentrer dans le dossier global qui sera présenté par la fédération. En fait là on est sur une pré-étude, pour juger si notre patrimoine peut prétendre au label. Il y a 2239 sites répartis dans 15 pays."
L’objectif, pour nous à Déols, ce serait de valoriser et promouvoir notre patrimoine, de lui apporter le rayonnement que confère le patrimoine de l’UNESCO.
L'édile rappelle que ce projet s’inscrit dans celui de la dernière campagne municipale, qui est de mettre en avant le patrimoine et l’attractivité du territoire. Ici, on pense que les efforts pour moderniser la visite du lieu, l’utilisation des nouvelles technologies, ou encore l’organisation d’une grande fête médiévale sont autant d’atouts. Sans oublier la crypte, une des plus grandes d’Europe, que Déols espère pouvoir rendre au public. Car des travaux sont nécessaires, la route passant juste au-dessus ayant causé quelques éboulements. Si la conclusion de cette visite est positive, Déols devra préparer son dossier pour juin 2022.
Une abbaye riche et puissante au Moyen Âge
Il ne reste aujourd’hui de l’abbaye que quelques vestiges. Comme beaucoup d’autres, elle a souffert au fil de siècles de son glorieux passé. Notre-Dame de Déols ou abbaye Notre-Dame de Bourg-Dieu, fut fondée en 917 par Ebbes Le Noble, seigneur de Déols. Il imitait en cela son Seigneur Guillaume Ier d’Aquitaine, qui en 909 (ou 910 selon les sources) avait fondé l’abbaye de Cluny en Saône-et-Loire actuelle. Tout comme elle, Notre-Dame de Déols était placée sous l’autorité directe du Pape. Elle devient rapidement la plus puissante du Berry, puis une des plus puissantes de France au Moyen Âge. Son apogée s’étend au 12e, 13e, et 14e siècles.
Mais les guerres de religion (1562-1594) eurent raison de sa prospérité. En partie détruite par les protestants, elle ne s’en relève pas et la demande de sécularisation (action de faire passer du domaine religieux au domaine laïc) acceptée par le pape Grégoire XV l’achève en 1629.
Elle devient alors une vaste carrière de matériaux de construction. Ce que l’on peut voir aujourd’hui de sa splendeur passée sont le clocher, la quatrième travée du collatéral nord, la crypte, le mur sud de la nef et la porte de jonction avec le cloître, la prison des moines, la salle capitulaire, la salle carrée avec ses têtes murales, le réfectoire, la cuisine et les autres bâtiments conventuels. C’est grâce à Prosper Mérimée, qui s’intéresse à ses ruines, que l’abbaye sera classée en 1862 au titre des monuments historiques. Il faudra attende la campagne de fouilles, sous la direction de l’archéologue Jean Hubert entre 1924 et 1926 pour permettre de restituer le plan de la grande église abbatiale de Déols.
A la découverte du musée lapidaire
En 2016, le musée lapidaire actuel est inauguré. Conçu pour être le prolongement de la visite du site, en permettant au visiteur de découvrir en 3D l’abbaye telle qu’elle fût à son apogée, il utilise toutes les dernières technologies permettant de visualiser et de comprendre la richesse stylistique des constructions. Andy Chambon, directrice du musée nous explique : "quand les visiteurs arrivent au musée, ils ont la possibilité de voir la maquette qui présente l’abbaye telle qu’elle était entre le 12e et 14e siècles. Ils peuvent se promener sur tout le site, car on a installé des panneaux explicatifs dans l’église et dans le cloître. Ça permet de se rendre compte de l’empiètement de l’abbaye par rapport au sol."
La visite se poursuit dans le musée qui est composé de deux salles. On y trouve un remarquable gisant et quelques chapiteaux sculptés. L’apport du numérique avec la projection du plan des bâtiments, permet, en touchant l’écran de faire apparaître en couleurs, les différentes parties de l’abbaye. Dans la deuxième salle Andy Chambon nous précise "il y a les plus grosses pièces. Le Christ en majesté, le bloc de pierre qui subsiste qui était au-dessus du porche nord de l’abbaye, et c’est dans cette salle qu’est projeté au mur un film en 3D, qui représente toute l’abbaye à l’époque".
Une animation pédagogique peut-être menée là pour les enfants des écoles, des tablettes sont mises à disposition. Un autre axe de développement va maintenant concerner les groupes et associations. En 2019, dernière année de fonctionnement "normal" avant la crise sanitaire, 9000 visiteurs avaient franchi les portes du musée.
Cluny et les sites clunisiens : un vaste chantier européen
La Fédération Européenne des Sites Clunisiens mobilise depuis 2018 les différentes collectivités et institutions européennes qui rendront possibles le projet d’inscription au Patrimoine Mondial de l’UNESCO d’une liste "Cluny et les sites clunisiens".
"Inscrire la liste 'Cluny et les sites clunisiens', c’est faire reconnaître et protéger les témoignages patrimoniaux du rayonnement de l’abbaye de Cluny en Europe au cours de l’histoire. Ce n’est donc pas célébrer le passé, mais préparer l’avenir" peut-on lire sur le site de la Fédération Européenne. Sachant que la Fédération européenne revendique aujourd’hui plus de 2239 lieux qui vont du monastère aux châteaux, bourgs, villes, vignobles, moulins… où sont conservés des objets, des œuvres, des musiques, des sous-sols archéologiques attestant de la présence clunisienne, l’enjeu est de taille.