Tribune de soutien à Gérard Depardieu : on vous explique pourquoi l'acteur est au centre d'une polémique

Après la diffusion d'un Complément d'enquête, Gérard Depardieu est de nouveau au centre de l'attention. Défendu par une cinquantaines de célébrités et le président de la République en personne, l'acteur né à Châteauroux est accusé de viols et d'agressions sexuelles.

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"Oh c'est bien madame. Si jamais elle galope, elle jouit." Les propos sont tenus par Gérard Depardieu, devant une petite fille en train de monter à cheval, sous l'œil de la caméra de Yann Moix. L'écrivain orléanais tourne un documentaire (un futur "chef-d’œuvre" selon lui) sur l'acteur en Corée du Nord. Plusieurs extraits comme celui-ci, bourrés de commentaires obscènes envers les femmes, échappent aux ciseaux du monteur pour finir dans Complément d'enquête.

La vidéo originale, sans montage (ce qu'on appelle les "rushes") a même été authentifiée par un huissier de justice après que le président de la République en personne a, sur France 5, repris à son compte l'idée que ce passage du documentaire dédié à l'acteur puisse être une mise en scène. Au passage, Emmanuel Macron a également désavoué sa ministre de la Culture qui annonçait le 15 décembre l'ouverture d'une "procédure disciplinaire" pour retirer sa Légion d'honneur à Gérard Depardieu.

Pourquoi parle-t-on de Gérard Depardieu ?

Depuis, l'actualité s'est emballée autour de l'acteur qui fêtera ses 75 ans ce 27 décembre, devenu la personnalité la plus clivante de cette fin d'année. C'est pour soutenir ce même Gérard Depardieu que, ce mardi 26 décembre, une cinquantaine d'artistes et de personnalités ont signé une tribune publiée dans le Figaro.

L'acteur, outre divers comportements problématiques exhibés devant la caméra, est mis en examen pour viol, visé par une seconde plainte en 2023 et accusé d'agression sexuelle par 16 femmes. Benoît Poelvoorde, Nathalie Baye, Charlotte Rampling, Pierre Richard ou encore Carole Bouquet dénoncent ainsi un "lynchage" médiatique du comédien né à Châteauroux en 1948.

Nous ne pouvons plus rester muets face au lynchage qui s'abat sur lui, face au torrent de haine qui se déverse sur sa personne, sans nuance, dans l'amalgame le plus complet et au mépris d'une présomption d'innocence.

Tribune de soutien à Gérard Depardieu

Le Figaro

En octobre, dans une lettre ouverte publiée là encore dans le Figaro, Gérard Depardieu avait lui aussi livré "[sa] vérité" et dénoncé un "lynchage" et un "tribunal médiatique". "Je ne peux plus consentir à ce que j’entends, ce que je lis sur moi depuis quelques mois. Je croyais m’en foutre, mais non, en fait non. Tout cela m’atteint. Pire encore, m’éteint", écrivait l'acteur, alors visé par une plainte pour viols et une autre pour agressions sexuelles. La famille de l'acteur, elle aussi, dénonce une "cabale" contre lui.

Quelles sont les accusations portées contre lui ?

Plusieurs plaintes visent Gérard Depardieu, ainsi que des témoignages qui n'ont pas abouti à des dépôts de plainte. Depuis 2018, l'acteur est visé par une plainte de l'actrice Charlotte Arnould. En 2020, il est mis en examen pour "viol" et "agression sexuelle". En avril 2023, Mediapart révèle les témoignages de 13 autres femmes qui affirment avoir été victimes de l'acteur. Une quatorzième femme témoigne en juillet au micro de France Inter.

Le 10 septembre, une seconde plainte, cette fois pour agression sexuelle, est déposée à l'encontre de Gérard Depardieu par l'actrice Hélène Darras. Les faits relatés, a priori prescrits, auraient eu lieu sur le tournage du film Disco en 2007. Enfin, en décembre 2023, la journaliste et écrivaine espagnole Ruth Baza a déposé plainte contre Gérard Depardieu pour un viol qui aurait été commis en 1995 à Paris. Là encore, les faits semblent prescrits. L'acteur, présumé innocent, a quant à lui démenti toutes ces accusations.

Cependant, le Complément d'enquête du 7 décembre, titré "Gérard Depardieu, la chute de l'ogre", rappelle que l'acteur français, à d'autres époques, avait fait preuve de moins de prudence dans ses déclarations passées. "J’ai eu plein de viols, trop pour les compter. Il n’y avait rien de mal à ça. Les filles voulaient être violées", affirme-t-il au magazine américain Film Comment en 1978. Interrogé par le Time magazine (en français) en 1991 sur ces propos, il confirme et ajoute qu'il n'y a "rien d'extraordinaire là-dedans" et que c'était "tout à fait normal dans ces circonstances". Rebelote dans le magazine Lui en 1981 : "On a aussi violé beaucoup de filles", assure l'acteur, "mais je passais après tout le monde parce que j’étais gamin".

Des réactions atterrées

Dans ce contexte, il n'est donc pas surprenant que la tribune publiée pour défendre Gérard Depardieu ce 26 décembre ait eu, auprès d'une grande part du public, l'effet strictement inverse. "On est face à une évolution sociétale très forte sur les violences sexuelles et sexistes, un peu à l'instar de ce qui s'est passé sur les violences conjugales et sur les féminicides" a réagi Murielle Reus, vice-présidente de MeToo Media, une association qui lutte contre les violences sexuelles au sein des médias, sur Franceinfo. Et "il y a une génération qui ne comprend toujours pas cette évolution sociétale."

 Ce que je constate, c'est qu'il n'y a pas un mot pour les treize femmes victimes qui ont témoigné dans Complément d'enquête et qui ont témoigné devant la justice. [...] Ces propos sont dits face caméra, par un homme qui a parfaitement conscience qu'il est filmé en permanence.

Murielle Reus, vice-présidente de MeeToo Media

"C'est une tribune très pédagogique. Ce que l'on voit, c'est comment un entourage va s'organiser et utiliser des arguments tels que 'c'est un monstre sacré, c'est un génie' pour protéger quelqu'un", a pour sa part déclaré à l'AFP la présidente de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert. "Ça va être très difficile pour les victimes de parler et porter plainte (…). Mais personne n'est au-dessus des lois."

La tribune a aussi eu des conséquences sur certains de ses signataires. L'association de protection de l'enfance "Les Papillons" a retiré à Pierre Richard son statut d'ambassadeur "parce que nous serons toujours du côté des victimes, et parce que la tribune de soutien à Gérard Depardieu qu'il a signé est indécente", a indiqué sur X (anciennement Twitter) le président de l'association, Laurent Boyet.

Alors que l'égalité femmes-hommes était la grande cause des deux quinquennats d'Emmanuel Macron, la tension entre la préservation de l'image publique d'une icône du cinéma français et la nécessité de donner voix aux victimes de violences sexuelles en dit long sur les défis qui restent à relever pour venir à bout des violences sexistes et de la culture du viol.

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