La décision de justice est tombée ce jeudi 5 octobre en début d'après-midi : l'affaire Mis et Thiennot sera bien re-jugée en cassation, au terme de la septième requête de révision et après quarante ans de combat judiciaire.
"C'est bon !" Des larmes de joie montent aux yeux de Thierry Thiennot, fils de Gabriel Thiennot, en sortant de la salle d'audience. Ces larmes, "ça fait quarante-six ans qu'on les attend !" lâche-t-il. Il répondra aux questions des journalistes, mais pas avant d'appeler sa mère, qui attend des nouvelles de l'audience. Même lui n'avait "pas imaginé ça".
La première chose que je vais faire, c'est d'aller au cimetière, et de lui dire qu'on n'est plus qu'à une marche de la victoire.
Thierry Thiennot, fils de Gabriel Thiennot
C'est en effet un coup de théâtre qui vient d'éclater dans une affaire judiciaire vieille de 73 ans. La Justice a ordonné ce jeudi 5 octobre la révision du procès, qui sera donc jugé à nouveau en cour de cassation pour les deux hommes, plus de soixante-dix ans après les faits.
Condamnés à trois reprises entre 1947 et 1950 pour le meurtre du garde-chasse Louis Boistard, Raymond Mis et Gabriel Thiennot font l'objet d'une lutte acharnée pour laver leur nom depuis les années 1980.
Les deux hommes avaient d'abord avoué le meurtre, sous la torture, avant de se rétracter. Ce qui n'avait pas empêché leur condamnation.Une trentaine de PV à retirer
"La commission nous a donné satisfaction sur l'ensemble de nos demandes, et a donc saisi la cour de révision", a confirmé l'avocat du comité de soutien Mis-et-Thiennot, Me Jean-Pierre Mignard. "L'affaire sera rejugée avec un grand nombre de procès verbaux et de pièces qui seront annulés."
Encore plus étonnant : l'avocat général avait d'abord demandé la révision du seul cas de Raymond Mis, pour lequel des preuves des tortures subies avaient pu être apportées. Les deux hommes feront finalement l'objet d'un nouveau procès, à titre posthume car Gabriel Thiennot est mort en 2003, et Raymond Mis en 2009.
"La commission d'instruction a estimé expressément que tant Raymond Mis que Gabriel Thiennot avaient subi des violences", ajoute Me Pierre-Emmanuel Blard, également conseil du comité, "et que ces violences avaient eu pour conséquences les aveux".
Une trentaine de procès-verbaux ont été annulés et ne figureront plus dans le dossier.
Pierre-Emmanuel Blard, avocat du comité de soutien Mis-et-Thiennot
Depuis les années 80 le comité de soutien impulsé par l'écrivain Léandre Boizeau fait des pieds et des mains pour obtenir une révision du procès, un fait rare dans l'histoire judiciaire française. Après six tentatives infructueuses, ils viennent enfin d'être entendus.
La chambre d’instruction de la Cour de révision a estimé qu'une trentaine de procès-verbaux avaient été obtenus sous la torture. Ils devront donc être retirés du dossier.
Avec Vincent Billy.