Depuis 2000, une loi impose la parité des candidatures aux législatives, pourtant elle reste compliquée à respecter pour certains partis. Et elle peut grandement varier si une circonscription est considérées comme "gagnable" ou non.
L'égalité femmes-hommes, grande cause du premier quinquennat d'Emmanuel Macron et du second, est-elle respectée en politique ? Pour François Bayrou, au micro de Franceinfo, la réponse est oui, au moins pour la majorité sortante qui présente "l'équilibre femmes-hommes dans les investitures (...) le plus précis et le plus parfait de tous les partis français". Une affirmation démentie, en partie, par les données disponibles sur les candidatures aux législatives.
La gauche plus égalitaire... mais pas partout
En effet, selon Franceinfo, la coalition Ensemble ne respecte qu'imparfaitement l'obligation de parité inscrite dans la loi. 48,4% seulement de ses candidats sont des femmes, contre 49% pour le Rassemblement national et 51,6% pour la Nupes, le seul groupe où les femmes sont (légèrement) majoritaires. Depuis 2000, une loi sanctionne les partis qui ne respectent pas la parité des candidatures.
Les Républicains, en revanche, ont beaucoup de mal à faire appliquer la parité, avec seulement 166 femmes contre 253 hommes. Reconquête, le parti pétainiste fondé en 2022 par Éric Zemmour, ne présente que 31 femmes pour 54 hommes. Un état de fait qui n'étonne guère l'ancienne députée socialiste et militante féministe Danielle Bousquet, présidente du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE). "C'est un peu la vision passéiste de la droite", ironise-t-elle. "Les lois sur la parité, c'est la gauche qui les a portées."
En Centre-Val de Loire, en particulier, une grande majorité des candidatures sur les 23 circonscriptions sont masculines. Tous partis confondus, seuls 37,35% des candidats déclarés en date du 20 mai sont des candidates. Pourtant, cette fois, c'est la Nupes qui fait figure de mauvais élève, avec seulement 8 femmes sur 22 candidats, soit 36,36%.
Dans le détail, ce sont les partenaires plus mineurs de l'union de la gauche, comme le PS (une seule femme sur trois candidatures) ou le PCF (une femme pour quatre candidatures), qui plombent cette moyenne. La France insoumise, elle, a respecté scrupuleusement la parité dans les dix circonscriptions de la région où elle sera représentée.
L'écueil des circonscriptions "gagnables"
La répartition femmes-hommes doit cependant aussi être examinée du point de vue de la géographie électorale. Certaines circonscriptions sont ainsi considérées, au sein même des partis, comme étant plus ou moins "gagnables". Il peut donc être tentant, pour un parti souhaitant contourner la loi sur la parité, de présenter davantage de femmes sur des circonscriptions où elles partent perdantes, tout en conservant les circonscriptions gagnables à ses candidats masculins.
"C'est quelque chose qui se faisait beaucoup au début, lorsque la loi est passée", note Danielle Bousquet.
On présentait des femmes sur des circos réputées non gagnables et... certaines ont quand même gagné ! C'est devenu un peu plus compliqué de se débarrasser des femmes comme ça.
Danielle Bousquet, présidente du HCE
Le média indépendant Basta! a ainsi réalisé, sur la base des dernières élections présidentielles et législatives, une estimation des circonscriptions qui pourraient basculer du côté de la gauche ou de l'extrême-droite.
Il en ressort que, côté Nupes, les femmes sont en réalité légèrement sur-représentées dans les cinq circonscriptions où une victoire de la gauche est considérée comme "possible" ou "probable", comme la 3e de l'Indre-et-Loire, où se présente Roxane Sirven pour la France insoumise, ou la 3e de l'Eure-et-Loir avec Valéria Dos Santos Orfila.
A l'inverse, le Rassemblement national, qui dispose du même nombre de circonscription dans la région où il part avec un léger avantage, n'y présente qu'une seule femme : Virginia de Oliveira dans la 4e circonscription d'Eure-et-Loir.
Quelles sanctions pour imposer la parité ?
La loi de 2000, renforcée en 2014, pénalise les partis qui s'écartent de l'égalité femmes-hommes dans le nombre des candidatures présentées. A partir de 2% d'écart, la loi prévoit désormais que les dotations publiques, calculées pour chaque parti sur la base du nombre de voix obtenues au premier tour des législatives, soient diminuées "d'un pourcentage égal à 150% de l'écart" à la parité. En clair : si vous ne présentez que 45% de femmes, votre parti sera pénalisé de 7,5% de ses dotations publiques.
En 2022, le montant de cette modulation parité s'est élevé à près de 1,8 millions d'euros pour les Républicains et 252 443 euros pour la France insoumise. En août 2019, Marlène Schiappa, alors secrétaire d'État à l'égalité femmes-hommes, proposait même de multiplier le montant de ces pénalités par cinq. En effet, il peut encore être tentant pour certains partis de s'acquitter des pénalités, pour peu qu'ils conservent suffisamment de sièges en reconduisant des sortants masculins.
Malgré ces failles, insiste Danielle Bousquet, la loi de 2000 a porté ses fruits. "Elle a d'ailleurs été étendue : maintenant la parité obligatoire est présente dans les autres élections, dans le monde de l'entreprise... Si on avait laissé le sujet à la libre appréciation des partis, on serait encore au Moyen Âge !"