Le nombre de personnes souffrant d'allergies respiratoires aurait doublé ces 10 dernières années, phénomène qui devrait encore s'aggraver : la moitié de la population mondiale pourrait être concernée d'ici à 2050 ! Pour les scientifiques, le lien direct avec la hausse des températures et la concentration de polluants dans l'atmosphère ne fait aucun doute.
Enseignante-chercheuse dans l'Unité de recherche biomolécules et biotechnologies végétales de la Faculté de Pharmacie de Tours, Gaëlle Glevarec anime, ce jeudi 15 février, une conférence sur le thème : "les pollens, quand la pollution sème le trouble". Elle répond à nos questions sur les liens entre hausse des températures, pollution et pollinisation.
Qu'est-ce que le pollen et comment provoque-t-il des allergies ?
"Le pollen appartient à l'appareil reproducteur mâle des plantes, il porte les gamètes qui vont féconder la partie femelle et permettre la reproduction sexuée des végétaux. Tous les pollens ne sont pas allergisants, cela dépend du mode de transport, le vent ou les insectes.
Chez les plantes dont la pollinisation est assurée par des insectes qui butinent de fleur en fleur, le pollen, plus lourd, plus gros, se retrouve moins dans l'atmosphère et ne pose pas de problèmes.
En France et dans le monde, les espèces les plus allergisantes ont une pollinisation par le vent. Le pollen est dans l'air et vient au contact de nos voies respiratoires. Les graminées, que l'on appelle aujourd'hui les poacées en botanique, ont une fécondation plus aléatoire et surproduisent du pollen pour être sûres d'atteindre leur cible. Mais en France on trouve aussi les bétulacées avec le bouleau, l'une des espèces les plus allergisantes, ou le noisetier, en ce moment en pleine pollinisation. Les cyprès, plutôt dans le Sud, ou l'ambroisie posent des également de gros problèmes d'allergie."
De quelle façon le réchauffement climatique aggrave-t-il les allergies aux pollens ?
"La pollinisation est plus précoce, elle commence de plus en plus tôt, dès le mois de janvier. Mais elle s'allonge aussi dans le temps, la pollinisation des poacées, par exemple, dure de 6 à 7 mois !
Par ailleurs, de nombreuses études montrent que la quantité de pollen qui est produite augmente avec la hausse des températures. Et ces pollens produisent eux-mêmes encore plus d'allergènes, qui sont des protéines contenues dans leurs grains.
Augmentation de la période d'exposition, augmentation de la quantité de pollen et augmentation de la concentration en allergènes, le réchauffement climatique, c'est un peu la triple peine pour les personnes souffrant d'allergie...
Et l'on pourrait y ajouter un autre effet, qui concerne la répartition des plantes allergisantes : des espèces cantonnées jusqu'à présent dans le sud commencent à remonter vers le nord en touchant une population plus importante."
Au-delà de son impact sur le réchauffement climatique, la pollution joue-t-elle un rôle direct dans le développement des allergies aux pollens ?
"La pollution altère les fonctions reproductrices des plantes, la composition du pollen, elle-même, varie selon les polluants présents. Comme avec la hausse des températures, il y a plus de pollen et plus d'allergènes produits.
Mais il existe un lien plus direct avec la santé humaine : les polluants atmosphériques adhèrent au pollen, se fixent sur sa paroi et déforment le grain, jusqu'à le rompre !
Tous les allergènes normalement contenus dans le grain sont ainsi libérés. Beaucoup plus fins que le grain lui-même, ils peuvent atteindre nos voies respiratoires les plus basses, nos bronches, et donner des symptômes plus sévères comme l'asthme. On peut ajouter que la pollution elle-même fragilise nos voies respiratoires, les irrite, et que nous sommes ainsi d'autant plus sensibles au pollen."
► "Les pollens, quand la pollution sème le trouble", par Gaëlle Glevarec - Les jeudis de l'écologie - Conférence à l'Hôtel de ville de Tours Jeudi 15 février, à 18h30