Loi Immigration : comment vont voter vos députés en Centre-Val de Loire ?

Les débats sur le projet de loi immigration viennent de s'engager en commission des Lois à l'Assemblée, lundi 27 novembre. En Centre-Val de Loire, le projet de loi divise les députés.

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Le bras de fer est engagé. Ce lundi 27 novembre, les députés ont débuté l'examen du projet de loi asile et immigration, porté par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin. Le texte est désormais entre les mains de la commission des Lois, dans une version très fortement amendée par la majorité de droite au Sénat, d'où elle est revenue le 14 novembre. 

"Humanité et fermeté"

La version initiale, voulue par le gouvernement, serait un mélange "d'humanité et de fermeté", à en croire l'élément de langage répété par de très nombreux parlementaires macronistes depuis le début du mois de novembre.

Le projet prévoit ainsi la création de nouveaux critères d'expulsion, notamment en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sûreté de l'État. Le texte envisage également de réformer la demande d'asile, avec un double objectif d'accélération des procédures et d'expulsions plus rapides. L'une des mesures permettrait, notamment, la délivrance d'une obligation de quitter le territoire (OQTF) dès le rejet d'une demande d'asile, sans attendre un recours éventuel.

Mais l'article le plus médiatique du projet de loi appartient au volet "humanité" du texte, à savoir l'article 3, qui permettrait la régularisation des étrangers travaillant dans des métiers en tension.

À droite toute

Sauf que, depuis, la droite sénatoriale est passée par là, et a considérablement durci le texte, passé de 27 à 90 articles. Avec une suppression de l'article 3, notamment, mais aussi la remise en cause du droit du sol, l'introduction de quotas d'immigration, le resserrement des critères du regroupement familial, ou encore l'allongement à cinq ans du délai nécessaire pour un étranger en situation régulière pour toucher des allocations.

Le Sénat a aussi remplacé l'aide médicale d'État (AME) par une aide médicale d'urgence, qui réduit considérablement les pathologies pour lesquelles un étranger ne disposant pas de sécurité sociale pourrait se faire soigner sans frais. Le patron des députés LR, l'eurélien Olivier Marleix, défend cette mesure suppression en reprenant la théorie de l'appel d'air. Selon lui, "une immigration sociale se développe" (il ne donne pas de chiffres pour appuyer son affirmation), alors même que "de nombreux Français n'ont pas de médecin traitant", assurait-il sur le plateau de l'émission Backseat sur Twitch.

Une "idée démagogique", selon la députée Renaissance du Loiret, Caroline Janvier : "Les migrants ne risquent pas leur vie pour venir se soigner en France", s'est-elle indignée sur LCP le 14 novembre.

La double impasse du gouvernement

Le gouvernement peut sembler désormais dans une sorte de double impasse. Car de nombreux parlementaires de la majorité s'expriment déjà largement pour un retour à la version initiale du texte. "Beaucoup de mesures me choquent profondément, dans ce qui a été voté par le Sénat", expliquait ainsi Caroline Janvier, sur LCP. Pareil pour Mathilde Desjonquères, députée MoDem de Loir-et-Cher, qui dit à France 3 "préférer une version proche de celle du gouvernement, qui est plus équilibrée".

Sauf que, de l'autre côté, chez Les Républicains, on est beaucoup moins enthousiaste à voir le texte sénatorial détricoté. Si bien que les députés LR ont, "à l'unanimité", approuvé une motion affirmant leur refus de soutenir le projet de loi s'il se trouvait "dégradé" par rapport à celui adopté par la droite au Sénat. Une position dont Olivier Marleix a fait un étendard dans le bras de fer qu'il entretient avec le gouvernement.

Sur Public Sénat, le député Rassemblement national du Loiret, Thomas Ménagé, a affirmé que "tout ce qui va vers plus de fermeté peut obtenir notre soutien". Y compris les ajouts du Sénat. Mais, tout comme Olivier Marleix, il fustige l'article 3 et reprend également la thèse de "l'appel d'air". Et affirme, donc, qu'il ne voterait pas le texte si cet article était conservé.

Retour à la case départ

En commission des Lois, le détricotage a pourtant déjà commencé. Mathilde Desjonquères, qui en est membre, témoigne de débats "intenses et animés". Qui ont, notamment, abouti au rétablissement de l'article 3 sur les régularisations, ainsi que de l'AME. La députée de Loir-et-Cher souhaite également défendre des amendements de groupe, portant sur les délais de régularisation des étrangers qui travaillent, et sur la prise en charge des femmes dans les regroupements familiaux : "Souvent, elles rejoignent leur compagnon qui est déjà en France, et si elles ne parlent pas français, elles sont cloîtrées chez elles. Ce sont des mamans de futurs Français, il y a une vraie question d'intégration."

Les récentes modifications de la commission sont aussi saluées par Caroline Janvier. Elle défend ainsi, auprès de France 3, "les bienfaits de l'immigration, dont on aura de plus en plus besoin, quand on voit la pyramide des âges". La députée du Loiret préfère cependant ne pas dire si elle votera le texte final ou non. "J'attends de voir comment il arrivera en séance publique, et ce qu'on arrivera à faire adopter ou pas.

Car persistent certains éléments auxquels elle assume s'opposer, comme les quotas, "renommés en objectifs chiffrés", le durcissement du regroupement familial, ou encore la question des allocations. Comme elle l'expliquait sur LCP : "Vous aurez des salariés qui travailleront, cotiseront, et qui n'auront pas le droit aux prestations pour lesquelles ils cotisent. Alors que les salariés français y ont droit."

Un gouvernement "en train de dériver" ?

Nicolas Sansu, député communiste du Cher, estime lui aussi qu’un "pays comme la France, qui fait de moins en moins d'enfants, doit accepter d'accueillir pour continuer à se développer". Il y ajoute un argument supplémentaire : "Un être humain est un être humain. On doit pouvoir accueillir les gens pour qu'ils se fassent soigner, pour qu'ils se logent, pour qu'ils fassent des études... Ça me paraît naturel."

Le parlementaire soutient une mesure : l'article 3, sur les régularisations dans les métiers en tension. Mais il veut aller "beaucoup plus loin" : "Je connais des entreprises qui embauchent des sans-papiers. C'est une économie parallèle qu'on encourage, il faut leur permettre de cotiser à la Sécu et au chômage." Il souhaite donc une vague de régularisations plus large. Pour Nicolas Sansu, le critère des métiers en tension, "c'est du pipeau".

Mais son soutien à cet article ne vaut pas soutien à l'entièreté de la loi, dont "la philosophie générale est très mauvaise", considère-t-il. Le député du Cher se dit "inquiet" des prises de position du gouvernement. Selon lui, il serait "en train de dériver" : "Ils se trompent, ce n'est pas en courant après des solutions de droite que l'on combat l'extrême droite." Sur le plateau de Dimanche en politique sur France 3, la députée RN du Loiret, Mathilde Paris, avait affirmé vouloir soutenir "plusieurs articles" de la loi, "car ce sont des propositions que nous avons portées".

Reste à savoir si, à l'issue des débats, un vote aura même lieu à l'Assemblée. Pour Mathilde Desjonquères, "sur un sujet de société comme celui-là, il faut un vote". Mais face à la complexité de dessiner une majorité pour voter le texte, le 49.3 n'est pas improbable. Olivier Marleix a, de son côté, affirmé qu'une motion de censure serait déposée par LR si le texte final contenait l'article 3 sur les régularisations. La gauche pourrait-elle la voter et faire tomber le gouvernement ? "On ne vote une motion de censure que si on est d'accord avec l'exposé des motifs", se contente de répondre Nicolas Sansu. Pas sûr que les motivations des Républicains soient raccord avec celles des communistes.

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