La soprano sud-coréenne nous ouvre les portes du "Sumi Jo International Singing Competition" lancée au château de La Ferté-Imabult en Loir-et-Cher. Objectif : "découvrir la perle rare".
À 20 minutes de Romorantin, en pleine Sologne, se niche le château de la Ferté-Imbault. Le village aux briques rouges cache un somptueux domaine où la chanteuse d'opéra, Sumi Jo, a posé ses valises. Pendant presque une semaine, 500 candidats, de 47 pays, se battent pour remporter la finale, le 13 juillet. "C'est la première fois que de tels prix sont offerts aux vainqueurs".
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Le premier prix s'élève à 50 000€. "Même le concours Operalia de Plácido Domingo, sponsorisé par Rolex, ne dépasse pas les 35 000€", nous explique Laura Fantoni, attachée de presse spécialisée musique classique et jazz en nous accueillant. Une volonté que la diva coréenne justifie comme "un remerciement à la France", envers laquelle elle est très reconnaissante.
"C'est grâce à l'émission "Musique au cœur" d'Eve Ruggieri, en 1986, que ma carrière a commencé." Depuis, elle enchaîne : États-Unis, Corée, Chine... Sans oublier le pays qui l'a rendue célèbre, puisque des chansons en français l'accompagnent dans son répertoire : "j'aime tout de la France, j'aime ce pays".
"Cet endroit apporte espoir et positivité"
Le château appartenant à des amis, l'évidence s'impose rapidement à Sumi Jo : "Lors d'un repas à Londres, il y a quatre ans, j'ai eu l'idée de créer ma compétition dans ce château. Au moment d'en parler, ils m'ont dit qu'ils voulaient faire la même chose". Le destin fait donc bien les choses. La première édition du Sumi Jo International Singing Competition se termine ce 13 juillet.
Et les concours, Sumi Jo connaît. Lorsqu'elle quitte la Corée du Sud pour l'Italie, à 20 ans, son seul moyen pour gagner de l'argent est les concours. Il fallait se faire remarquer pour signer dans une maison de disque et avoir des contrats. "Aujourd'hui, l'ère sacrée des maisons de disque, c'est terminé. C'est l'artiste qui paye ses enregistrements, ses photos, ses vidéos. Ils sont devenus des entrepreneurs". Laura Fantoni précise que, "pour les chanteurs lyriques, c'est encore différent. Ils sont seulement payés à la représentation. Tous les entraînements sont à leurs frais. C'est un métier précaire."
"Je n'avais pas d'autre choix que de devenir celle que je suis"
Avec beaucoup d'humilité, Sumi Jo nous explique que sa mère, enceinte, "avait décidé que si c'était une fille, elle serait une prima donna*". Pour ce faire, elle écoutait, durant ses neuf mois de grossesse, des chansons de la reine des cantatrices, Maria Callas.
C'est dès le plus jeune âge que Sumi Jo commence les cours de chants. Une vie stricte et saine est alors imposée. Un choix de vie forcé qui l'a amenée à performer sur les plus grandes scènes des opéras du monde entier.
*cantatrice qui tenait les premiers rôles
Sumi Jo se confie : "Il faut beaucoup d'heures de répétition tous les jours. On ne doit pas être malade, on doit garder un mental d'acier... On doit se rendre compte qu'on a de la chance de faire de la musique et de la partager aux gens."
Lorsqu'on lui demande des conseils pour les jeunes générations, elle explique :
Le monde de l'opéra est très dur. Il faut faire des choix : musique ou vie privée.
Sumi Jo
"On ne peut pas boire de l'alcool, pas fumer. Il faut avoir une vie stricte, faire attention à son corps, car c'est notre instrument. Un chanteur, s'il est malade ou qu'il parle trop, il ne peut pas performer. En hiver, c'est très dur parce qu'il faut se protéger et pas vivre comme tout le monde. Pour moi, parmi les trois métiers les plus durs dans le monde, je n'ai pas peur de dire, mais chanteur d'opéra, c'est le premier."
Émotion, transmission et ambition
Le concours prône trois valeurs que partage la chanteuse d'opéra : l'émotion, la transmission et l'ambition.
"L'émotion est le but même du métier. Si on ne transmet pas d'émotion, c'est qu'on n'est pas bon. Il ne faut pas avoir peur de ce qu'on exprime et de ce que l'on ressent sur scène. Il faut être honnête envers ses émotions".
Pour elle, la transmission est essentielle et innée chez certaines personnes. "Apprendre à communiquer ses émotions, à partager, à donner à son public est très difficile". Pour l'artiste, la transmission est comme un superpouvoir. Le public aime un chanteur pour ce qu'il donne.
En revanche, l'ambition est subjective. Elle l'explique par l'idée du rêve que chacun a en soi. Un rêve qui est difficile à atteindre et qui mérite du travail. Elle utilise la métaphore suivante : "Si une porte est fermée, il faut travailler et se préparer, car d'autres portes vous attendent. Une fois ouverte, il faut cependant être prêt et il ne faut pas avoir peur".
Cette première édition du "Sumi Jo International Singing Competition" est une réussite. Pour le moment, trois Français sont en finale. L'idée serait de retrouver le concours tous les deux ans et de proposer un événement culturel, au château, entre-temps.