Entre 2 et 3 centimes de plus à la pompe. La hause des prix du carburants a des conséquences sur tout le monde, surtout les professions qui utilisent leur véhicule. C’est le cas du secteur de l'aide à la personne. Exemple dans le Loiret.
À mesure que le compteur de la pompe à essence tourne, son porte-monnaie grimace. Michèle, 54 ans, habitante d’Ouzouer-sur-Trézée (Loiret), conduit une C4 depuis 7 ans. Version diesel. "Je savais que j’allais faire beaucoup de kilomètres". Aujourd’hui, elle remplit son réservoir à hauteur de 50 euros, loin des 30 euros qu’elle se fixait auparavant.
Quel est son budget carburant ? Impossible à savoir, Michèle ne fait pas les comptes, "pour éviter d’avoir peur", dit-elle en riant. Un rire doux-amer pour cette auxiliaire de vie depuis 15 ans qui n’a pas le choix. "Il faut bien mettre de l’essence pour aller travailler". Les kilomètres, elle les avale tous les mois. Entre 400 et 600 km, dans le secteur de Briare, la Bussière, Adon et Ouzouer-sur-Trézée.
Sabine, elle, a opté, il y a trois ans, pour une Dacia Sandero essence. "Entre le Sans plomb 95 et le 98, j’ai fait le choix du 95 car il est moins cher", explique l'auxiliaire de vie de 47 ans. Alors que le SP 98 est meilleur pour le moteur. "Je fais en fonction de ma bourse, et pas en fonction de ma voiture, malheureusement".
En moyenne, elle parcourt 1 000 km par mois autour de Briare pour rallier les domiciles de ses patients. Elle fait de l’essence tous les samedis. "Ça fait moins, d’un seul coup. C’est sûrement psychologique". Car au final, cela revient au même. Toutes les semaines, pour remplir son réservoir au trois-quarts vide, elle en a pour près de 60 euros d’essence. "Avant, je faisais mon plein pour 55 euros", assure-t-elle.
Peu de solutions à court terme
Pour travailler, les auxiliaires de vie utilisent leur propre voiture. Elles reçoivent, en échange, une indemnité kilométrique. La "convention collective de la branche de l'aide, de l'accompagnement des soins et des services à domicile" la fixe à 0,35 euros le kilomètre parcouru. Elle n'a pas bougé depuis une dizaine d’années. Cela ne couvre pas tous les frais. Et les employeurs le reconnaissent. "Ça ne couvre pas les frais d’essence, l’usure du véhicule, etc.", reconnait Primo Sellier, le président de l'Association d'Aide à Domicile aux Personnes Agées et Handicapées (ADAPA), basée à Briare.
En attendant une éventuelle revalorisation de cette indemnité, il faut trouver des solutions à court-terme. Par exemple, en regroupant les missions dans un même secteur géographique pour réduire les déplacements. Mais la période complique les choses, estime Raynal Merlin, directeur de Proximité Services à Olivet, une cinquantaine de salariés. "En ce moment, on est à 10 % d’absentéisme, notamment lié au Covid. On est obligé de bousculer les plannings tous les jours. Quelqu’un qui aurait une mission à côté serait obligé de remplacer une collègue plus loin. Et cela générera des déplacements". En décembre dernier, les trente-quatre salariés de l'entreprise olivétaine qui se déplaçaient leur véhicule ont parcouru 6 128 km.
Et si les structures fournissaient elles-mêmes les voitures à leurs salariés ? Trop cher à l’achat, répond Raynal Merlin qui a étudié l’acquisition de voitures ou de scooters électriques, modes de transport adaptés à la ville, en l'occurrence la métropole orléanaise. C’est aussi trop cher à l’entretien, juge Primo Sellier qui a déjà fait l’essai il y a quelques années en achetant sept voitures. "Entre celle qui n’a pas fait le plein, celle qui ne fait pas la vidange…"
Si vous donnez vingt-trois véhicules, je me retrouve avec vingt-trois factures d’essence, vingt-trois factures d’entretien… Nous devrons payer. Ça ne solutionne pas le problème, ça le déplace. Personne ne veut mettre la main à la poche pour financer les véhicules pour les aides à domicile. Entre les belles promesses et la réalité du terrain, on sait ce que ça donne.
Primo Sellier, président ADAPA Briare
Les structures du service à la personne ont bien versé la prime inflation de 100 euros, en décembre dernier. Et certaines salariés du secteur ont été augmenté en octobre 2021. Sabine perçoit désormais 400 euros bruts, de plus tous les mois, pour un salaire de 1 600 euros nets, hors indemnisation kilométrique. Cette revalorisation est plus que la bienvenue. Car les 250 euros de carburant mensuels pèsent lourds dans son budget.