Fin juillet, le géant français de la grande distribution, qui venait de dévoiler une perte nette d'un milliard d'euros sur le premier semestre 2024, a promis une "réaction forte" et la réduction des surfaces de vente.
L'année 2024 est compliquée pour Auchan. Le cinquième distributeur alimentaire français derrière E. Leclerc, Carrefour, Les Mousquetaires/Intermarché et Système U a accusé au cours du premier semestre une perte de 973 millions d'euros, selon sa maison-mère ELO Groupe. Soit plus de quatre fois plus que l'année précédente sur la même période.
Face à une baisse des ventes déjà bien entamée en 2023, Auchan espérait rebondir grâce au rachat d'une centaine de magasins Casino. Mais l'aggravation de la crise exige selon sa maison-mère une "réaction forte", et le nouveau directeur général d'Auchan Retail, Guillaume Darasse, a promis des efforts sur la baisse des prix, la transformation de l'organisation et, point qui inquiète, la réduction des surfaces.
12 à 20% de surface en moins à Orléans, 33% à Châteauroux
Contacté par France 3 le 3 octobre, Auchan n'a pas donné suite à nos questions. Mais selon le média La Lettre, 71 des 119 hypermarchés du distributeur français seront ainsi soumis à une diète plus ou moins sévère. En région Centre-Val de Loire, selon nos informations, ces réductions concerneraient notamment les hypermarchés de l'agglomération orléanaise et celui de Châteauroux.
Le Auchan de Saint-Jean-de-la-Ruelle, doté de 13 000m², se verrait ainsi amputé de 1600 m² soit 12% environ de sa surface. À Olivet, les 9000m² de l'hypermarché seront réduits de 1800m², soit une diminution de 20%. Enfin, le coup le plus drastique tombe à Châteauroux : des 6000m² actuels, il n'en restera que 4000, soit un tiers de surface en moins. Gien et Blois devraient être épargnés, et on ne connaît pas encore les éventuelles réductions prévues pour Tours.
Du côté d'Auchan, ce plan de transformation annoncé fin juillet a pour but la relance des ventes, en "adaptant le format historique" de l'hypermarché, selon les propos de Guillaume Darasse. En effet, plus un magasin est grand, plus certains coûts fixes sont importants, d'autant plus que beaucoup de consommateurs finissent par éviter ces points de vente excentrés aux proportions massives. Le tout, alors que les prix du distributeur ne sont pas toujours concurrentiels, comparés à ses concurrents.
Autre écueil, ces grands magasins offrent une place de premier plan à une offre dite "non alimentaire", notamment l'électronique, le bricolage, l'habillement et le sport, qui subit une concurrence toujours plus forte de la part des plateformes de commerce en ligne comme Amazon, Vinted ou Ebay.
Impulsé au second semestre 2023, ce plan de transformation prévoit donc la réduction de la surface d'environ un tiers de ses hypermarchés "dans tous ses pays européens" hors Russie (où la famille Mulliez a maintenu son activité malgré l'invasion de l'Ukraine en 2022), soit à terme une "réduction moyenne de 25% des surfaces de vente".
"On sait depuis longtemps que les hypers sont trop grands"
Du côté des salariés, la nouvelle de la réduction des surfaces en a choqué plus d'un. "L'annonce a été catastrophique pour les collègues", déplore Caroline Blot, secrétaire générale de la CFDT du Loiret et salariée d'Auchan. "C'est sorti dans la presse avant que la direction ne nous informe. Déjà que beaucoup ne se sentent pas bien, ça a été un coup de massue."
Les rayons qui ont eu le plus peur, c'est par exemple l'électro-ménager.
Caroline Blot, secrétaire générale de la CFDT du Loiret et salariée d'Auchan
Passé l'agacement, place à l'inquiétude. Les vendeurs, connaissant la situation difficile des ventes sur le "non-alimentaire", ont craint d'être les premiers à partir.
Si Auchan n'a pas communiqué sur ce point, les informations qui ont transpiré vers les syndicats semblent rassurantes, au moins pour l'agglomération d'Orléans. À Saint-Jean-de-la-Ruelle, "ce n'est pas parce qu'on nous enlève 1600m² qu'on va se faire licencier", estime Caroline Blot. "Ils peuvent enlever des parties qui ne fonctionnent pas et mettre les salariés sur d'autres postes." En revanche, aucune nouvelle ne filtre encore concernant l'hyper de Châteauroux.
Pour autant, "on sait depuis longtemps que les hypers sont trop grands", poursuit-elle, évoquant une atmosphère tendue en raison de l'évolution de l'organisation interne et de salaires toujours bas. De fait, les dernières années ont été jalonnées par des cas d'épuisement professionnel, des démissions et une grève nationale en mars 2024.
Alors que la fin de l'année 2024 pointe le bout de son nez, l'incertitude règne toujours sur les conséquences que pourrait avoir le plan de transformation d'Auchan sur l'emploi. Un CSE prévu en octobre pourrait commencer à apporter des réponses à ces questions. Auchan emploie 160 000 salariés dont 59 000 en France.
