En pleine crise énergétique, l'hiver s'annonce tendu. D'autant plus que les prévisions indiquent une production d'électricité moins importante que prévue en janvier 2023. Si des coupures temporaires sont à prévoir, Enedis anticipe pour éviter la panne totale.
La guerre en Ukraine pourrait continuer à impacter les Français. La crise énergétique en résultant continue de menacer l’approvisionnement électrique, et d’autant plus en période hivernale. En janvier 2023, RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, a prévu un risque élevé de tension. En cause : des travaux sur le parc nucléaire limitant sa capacité de production.
"RTE a prévu une baisse de 5 gigawatts de production électrique sur cette période", précise Thierry Sudret, directeur Exploitation et Systèmes chez Enedis. De là à provoquer une coupure d’électricité généralisée et le noir complet ? Pour éviter ce scénario catastrophe, les agents du distributeur d’électricité Enedis veillent au grain.
Une surveillance continue du réseau électrique
Près d’Orléans, dans les locaux de l’agence de conduite régionale d’Enedis, ils surveillent le réseau électrique sur leurs écrans d’ordinateur. Au sein de cette tour de contrôle d’électricité du Centre-Val de Loire, entre 6 et 8 agents se relaient en permanence pour parer à toute éventualité. "Notre mission est de surveiller 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, l’état du réseau et d’assurer l’équilibre des flux d’électricité entre ce qui est consommé et ce qui est produit", détaille Olivier Loriot, le directeur d’Enedis Centre-Val de Loire.
La sobriété énergétique des Français est réelle. RTE a constaté, en septembre et octobre, une réelle baisse de la consommation tant chez les entreprises que chez les particuliers.
Thierry Sudret, directeur Exploitation et Systèmes d'Enedis
Pour ces agents, le passage à l’hiver est particulièrement à risque. Avec les baisses de températures, la consommation peut rapidement exploser. Depuis leur poste, les agents Enedis peuvent couper ou limiter l’électricité de tout un quartier ou un village.
Des délestages possibles cet hiver
Depuis les annonces gouvernementales incitant les Français à la sobriété énergétique, ces derniers ont joué le jeu. Selon les données de RTE, près de 6 % de baisse de la consommation électrique étaient observés mi-novembre par rapport à la moyenne des années 2014-2019, celles avant la pandémie de Covid-19. La baisse est encore plus forte dans le secteur industriel, encouragée par la montée des prix de l’énergie. "Selon les périodes, les baisses chez les particuliers peuvent par exemple atteindre 9 %, donc c’est vraiment une bonne nouvelle", s’enthousiasme même le directeur Exploitation et Systèmes d’Enedis, Thierry Sudret.
La région Centre-Val de Loire serait aussi concernée par des délestages.
Olivier Loriot, directeur d'Enedis Centre-Val de Loire
"C’est suffisant pour éviter la plupart des situations à risque. Mais les risques dépendent aussi du parc de production, de la météo, du climat et de tout autres facteurs", prévient-il. Pour la période de janvier 2023, où les prévisions de RTE incitent à la plus grande prudence, cela pourrait ne pas suffire. Mais plusieurs leviers peuvent être utilisés pour veiller à la stabilité du réseau, comme l’explique Olivier Loriot : "Le premier, c’est celui de la sobriété énergétique. Le second serait d’actionner les contrats interruptabilité passés entre RTE et les consommateurs les plus énergivores. Enfin, on pourrait procéder à une baisse du niveau de tension sur le réseau, ce qui serait sans conséquence pour les Français."
Autant de solutions disponibles pour éviter les délestages, des coupures de courants de 2 heures de moyenne par client et par jour. Celles-ci restent néanmoins possibles cet hiver, y compris pour la région Centre-Val de Loire, qui produit, à elle seule, 10 % de l’électricité française. "La région produit davantage qu’elle ne consomme, confirme le directeur régional d’Enedis, Olivier Loriot. Pour autant, elle serait concernée par d’éventuels délestages parce qu’il n’y a pas de corrélation entre les moyens de production installés dans une région et sa contribution à l’équilibre global du système électrique."
Si ces délestages devaient avoir lieu, ils concerneraient tous les consommateurs. Seule une liste, définie par le préfet, de clients prioritaires pourraient y échapper. Il s'agit en particulier des établissements de santé, des sites sensibles, notamment ceux assurant la sécurité civile, mais également de sites industriels qui ne peuvent cesser de fonctionner.
"Le black-out n'arrivera pas"
Si ces délestages pourraient être mis en œuvre par Enedis cet hiver, impossible que survienne une coupure de courant généralisée qui immobiliserait le pays, selon Thierry Sudret. "Toutes les dispositions qui sont prises visent à l’éviter absolument. Tout est fait pour qu’un black-out n’arrive pas et il n’arrivera pas, assure-t-il. Justement, les coupures temporaires qui pourraient avoir lieu, en cas de risque extrême, éviteraient ce black-out. Donc il n’y a pas de risque."
Pour gérer la période de tension à venir avec l’hiver, les agents de l’agence de conduite régionale d’Enedis sont formés et s’exercent sur des "exercices de crise" depuis le début de l’année. De quoi éviter de reproduire le chaos total de 1978, quand la France entière avait été plongée dans le noir durant 4 heures.