Fêtes de Jeanne d'Arc : au fond, qu'est-ce qui change ?

Alors que les 589° Fêtes Johanniques sont lancées, France 3 s'est entretenu avec le maire d'Orléans, Olivier Carré, sur les changements survenus - ou non - au fil des années. 

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On n'atteint pas la 589ème édition d'un événement sans un certain sens de la tradition. Les Fêtes de Jeanne d'Arc se déroulent en ce moment et jusqu'au 8 mai dans la capitale du Loiret.

Chaque 1er mai, par exemple, c’est le jour de l'impressionnant défilé en armure. Représentation bien vivante et bien vivace d'un épisode qui s'est déroulé des siècles plus tôt. 


Pourtant, on ne survit pas non plus sans se moderniser d'une certaine façon. Cette année, ça a commencé discrètement avec pour la première fois l'introduction d'un formulaire d'inscription en ligne pour qui souhaitait devenir la Jeanne 2018. 

France 3 a reçu Olivier Carré, maire d'Orléans, pour évoquer avec lui cette navigation permanente des Fêtes Johanniques entre tradition solidement ancrée et petites évolutions. 


Propositions d'amélioration : la mouture 2018 


C'était il y a trois semaines : l'association Tous Orléans lançait sur sa page Facebook des pistes pour rendre les Fêtes Johanniques "plus populaires et culturelles". Parmi elles, améliorer le marché médiéval, ouvrir largement le cortège aux écoles et associations ou encore associer aux Fêtes un thème sociétal pour développer autour un cycle de conférences. 

"Je les ai lues, mais je ne les ai pas toutes compris, parce que certaines existent déjà, indique le maire. Les écoles ont défilé pendant des années, elles ne le font plus aujourd’hui mais on retrouve beaucoup d’enfants dans les défilés des clubs sportif. Ça demande déjà beaucoup de travail aux associations, le défilé est déjà long et je ne suis pas sûr qu’en rajouter renforce la cohésion autour de l’événement."

Il se dit en revanche plus intéressé par d'autres pistes : celle de développer la place de Jeanne d'Arc dans les programmes scolaires, ou de mieux assurer l'accompagnement en musique des événements. 

Pour le maire, les Fêtes de Jeanne sont déjà un événement populaire. "Quand on compare au festival de Loire, où on voit peu de gens des quartiers qui descendent, là j’en vois beaucoup, j’en reconnais beaucoup au passage du défilé. Ce n’est pas une caste bourgeoise qui regarderait quelque chose dont les quartiers populaires sont exclus. Il y a une alchimie qui me paraît assez correcte."


Jeanne d'Arc à la source, pari réussi


En 2016, Marie-Christine Bordat-Chantegrelet, président historique de l'association Orléans Jeanne d'Arc, démissionne. Dans l'oeil du cyclone : la dernière réunion de l'association avec la mairie, au cours de laquelle sera prise la décision de faire passer Jeanne d'Arc par le quartier populaire de La Source. 

"J'ai totalement adhéré à cette idée, à condition que cela prenne sens. Certains membres de mon association n'y trouve pas la même harmonie, n'apprécient pas l'échange entre Jeanne et la Source" avait déclaré Marie-Christine Bordat-Chantegrelet pour expliquer son départ. 

Ce passage par le quartier de la source, c'est une idée d'Olivier Carré lui-même. Où en est-on, deux ans après la controverse ? 

"On va faire bientôt la troisième veillée d’armes de Jeanne d’Arc à La Source. J’y tenais parce que La Source se sent parfois éloignée du centre-ville, mais elle fait partie intégrante d’Orléans. C’était important pour moi qu’il y ait cette étape, on l’a mise en place avec Bénédicte Baranger, qui l’a acceptée", témoigne le maire. 


Il ajoute : "J’étais heureux de voir les Sourciens s’approprier ce moment, ils étaient très nombreux [la dernière fois], et l’association avait fait de jolis efforts pour s’adapter. Ça devient un rendez-vous. On progresse dans la façon dont les fêtes de Jeanne d’Arc embrassent la totalité de l’agglomération."

"Ce n’est pas parce que Mathilde est métis qu’il y a un progrès"


Concernant la méprisable polémique autour de l'élection de la jeune Mathilde Edey Gamassou, Olivier Carré veut faire la part des choses. 

"Moi, quand j’ai reçu des courriers, c’étaient pour la plupart des gens qui n’habitaient pas Orléans, qui ne connaissaient pas les fêtes de Jeanne d’Arc et qui en avaient une image assez proche de certaines autres commémorations du 1er mai" relativise-t-il, même si "on est toujours surpris par la bêtise, le niveau lamentable de certains points de vue." 

Pour le maire, certains, attachés à la tradition, y ont vu là une "évolution". "Ce n’est pas parce que Mathilde est métis qu’il y a un progrès, un changement ou du conservatisme. Ce n’est pas un choix politique, c’est un choix éthique" martèle Olivier Carré. 

Mathilde Edey Gamassou a été élue paru un jury composé de représentants de l'armée, de l'Eglise, du pouvoir civil, et surtout, des anciennes Jeanne. "Elles ont considéré elles-mêmes que Mathilde était cette année la meilleure pour les représenter. On n’allait pas dire : "Non, il va y avoir une polémique". Ce serait honteux !"


La foi catholique, élément inamovible


Et il est vrai qu'à part ses origines, que des personnes mal intentionnées ont utilisées contre elle, Mathilde Edey Gamassou est une candidate tout ce qu'il y a de plus traditionnelle. 

Aînée d'une fratrie de cinq enfants (qui portent tous des prénoms de membres de la famille de Jeanne d'Arc), cheftaine de patrouille aux Guides d'Europe, membre de l'association Sainte Jeanne hier, aujourd'hui et demain et encadrante de jeunes dans la préparation aux sacrements... 

La jeune femme présente toutes les caractéristiques attendues sur le plan religieux. Elle a d'ailleurs mis en avant sa foi pour expliquer sa résistance aux attaques qui lui ont été faites. 

En 2018, dans une République laïque, faudrait-il envisager de supprimer le pré-recquis de la foi catholique pour incarner Jeanne d'Arc ? Pour Olivier Carré, qui se déclare athée, ce serait occulter la réalité de la figure de Jeanne d'Arc. 


"Jeanne d’Arc est une sainte catholique. Elle ne s’expliquerait pas sans le mystère de sa foi, mais aussi, attention, sans la trahison de l’Eglise, qu’il ne faut pas oublier. Elle est brûlée, martyrisée au motif de l’hérésie, pour les mêmes raisons qui la feront ensuite canoniser. Jeanne d’Arc est pleine de paradoxes."

Paradoxes qui laisseront, sans doute, la porte ouverte à d'autre évolutions. 
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