Depuis un mois et demi, les urgences de l'hôpital d'Orléans sont fermées, sauf pour les cas les plus graves. Si les arrêts de travail d'une partie du personnel touchent à leur fin, la grève des médecins, elle, se poursuit.
La crise des urgences n'est pas finie à Orléans. Depuis le 28 mars, la quasi-totalité des personnels soignants, infirmiers et praticiens du CHRO sont en arrêt de travail ou en grève.
Ce 13 mai, pourtant, "90% des infirmiers et aides soignants en arrêt" devraient commencer à reprendre le travail, indique le porte-parole des médecins urgentistes d'Orléans, le docteur Matthieu Lacroix. "En revanche, le mouvement de grève des médecins n'est pas levé", dans l'attente de mise en place de nouvelles procédures.
Soixante services d'urgence fermés ponctuellement
Mais le cas des urgences orléanaise, s'il est marquant par ses proportions, est loin d'être isolé. Selon le collectif national Santé en danger, "plus d'une soixantaine de services d'urgences, et toujours plus chaque jour", connaissent des fermetures ponctuelles, parfois la nuit et le week-end, mais aussi en journée, "avec une prise en charge limitée aux urgences vitales". Dans le Centre-Val de Loire, cela a été le cas notamment durant le week-end des 7 et 8 mai à Amboise, où la situation devrait se répéter ces 14 et 15 mai.
"Ces fermetures", explique encore dans un communiqué le docteur Arnaud Chiche, porte-parole du collectif, "limitent l’accès aux soins urgents pour chaque patient partout sur le territoire" et peuvent, à cause du temps perdu, conduire "à la dégradation de l'état de santé et à la mise en jeu du pronostic vital de certains patients".
Un amont, un goulot, un aval
La crise des urgences, avec ses risques accrus de mortalité pour les patients, n'est que le "symptôme le plus marquant de la déliquescence globale du système de santé français", insiste Matthieu Lacroix.
La médecine de ville, libérale, est en crise : il n'y a pas assez de médecins généralistes, donc les gens se tournent vers les urgences. Les urgences sont en crise parce que les conditions de travail sont tellement difficiles que les praticiens fuient. Et l'hôpital plus généralement est en crise, avec des infirmiers et des praticiens qui fuient l'hôpital, ce qui conduit à des fermetures de lits.
Dr. Matthieu Lacroix, porte-parole des médecins urgentistes en grève d'Orléans
Car le soin, même en urgence, ne commence et ne finit pas nécessairement à l'hôpital. Il faut se représenter les urgences comme "les trois compartiments d'un sablier géant", indique le collectif Santé en danger.
L'amont, c'est la médecine de ville. Le manque de médecins généralistes pousse les patients à se diriger vers l'hôpital, le goulot de ce sablier. Enfin, le bas du sablier, "l'aval", représente les lits nécessaires lors de l'hospitalisation après l'admission aux urgences, et finalement le retour à domicile. Autrement dit, le problème des urgences n'est pas isolé, mais à traiter en même temps que le manque général de médecins.
Outre l'amélioration de l'accès au soin en amont de l'hôpital, c'est donc sur ce goulot d'étranglement et sur l'aval que le collectif met l'accent. D'abord avec une meilleure organisation et un suivi des lits disponibles. Mais surtout, et c'est toujours le nerf de la guerre, avec plus de moyens humains et financiers, la seule solution pour rendre ces postes à nouveau attractifs et empêcher la fermeture de lits.
Revalorisation salariale pour les gardes de nuit et de week-end, embauche de personnels administratifs et de santé, délégation de certaines tâches : les revendications des soignants sont nombreuses. Devant les résultats jugés insuffisants du "Ségur de la santé", en 2020, le collectif Santé en danger a lancé une pétition, signée par plus de 35 000 personnes.