La Une du magazine municipal d'Orléans consacrée aux sans-abris migrants fait polémique sur les réseaux et dans l'opposition

La Une mais aussi le dossier consacré au déplacement des sans-abris migrants de Paris à Orléans a provoqué un tollé sur la toile et dans l'opposition municipale de gauche qui accuse le maire Serge Grouard de "politiser Orléans Mag pour attiser les peurs et diffuser des contre-vérités."

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Si le plus souvent, le bulletin municipal sert à promouvoir les projets menés par la ville, le dernier numéro d'Orléans Mag, prend ce mois-ci un ton plus politique.

En Une du magazine de Juin 2024, la photo d'un sans-abri sous une couverture et ce titre : "Immigration : sans abris : Orléans refuse d'être la base arrière de Paris". Un nouvel écho au coup de gueule du maire Divers Droite d'Orléans, Serge Grouard qui, en mars dernier, s'indignait dans la presse du transfert de centaines de migrants sans-abris de Paris à Orléans. Cette fois, il a choisi de consacrer un dossier complet au sujet dans l'organe de presse municipal.

Un choix assumé par le maire d'Orléans qui explique en édito, vouloir donner "accès, en toute transparence, aux données chiffrées qui permettent de mieux apprécier la situation actuelle et, par voie de conséquence, mesurer l'impossibilité qui nous est faite d'accueillir plusieurs centaines de migrants (…)"

Pour l'opposition, Serge Grouard "agite la peur", "renforce la haine"

Sur les réseaux sociaux de la collectivité, cette Une n'a pas manqué de faire réagir. "Honteux !", "choqué", "révoltant" ont commenté certains Orléanais sous les publications annonçant la sortie du nouveau numéro de juin.

Parmi eux, des membres d'associations locales mais aussi des élus, militants et sympathisants de l'opposition municipale de gauche. Le groupe Orléans Solidaire Ecologique (OSE) du conseiller municipal d'opposition Jean-Philippe Grand s'est fendu, dès le lendemain de la sortie du magazine, d'un communiqué de presse dans lequel le groupe accuse Serge Grouard de "politiser Orléans Mag pour attiser les peurs et diffuser des contre-vérités."

En outre, OSE s'étonne que pour "la première fois en 23 ans de mandat", Orléans Mag soit "transformé en tract politique par la volonté du maire, et ce, en pleine campagne électorale pour les élections européennes".

L'opposition s'interroge également sur le choix de la photo en Une du magazine qui n'a pas été prise à Orléans mais provient d'une banque d'images. "Image crue, stigmatisante assortie d'un slogan particulièrement choquant (…) L'image frappe, elle nous écœure."

Enfin, le communiqué dénonce le lien fait par l'édile entre "immigration et délinquance" et l'accuse de travestir les chiffres. "Il affirme que « 600 migrants sont arrivés à Orléans ». La Préfecture avait pourtant été claire dans sa réponse en mars: « En 10 mois, 519 personnes ont été prises en charge dans ce cadre dans la région Centre-Val de Loire (…) 134 en 10 mois dans le Loiret. Pas 600 à Orléans. Voilà la réalité."

Pour OSE, Serge Grouard "Inquiète, agite la peur, il renforce la haine, il encourage le rejet de l'autre". Un "calcul politicien" qui selon l'opposition, "permet d'occulter le mauvais bilan d'une équipe à bout de souffle".

"Une partie de la gauche est totalement irresponsable"

Contacté, Serge Grouard juge que la polémique provient d'"une partie de l'opposition de gauche qui n'a pas grand-chose à dire" et qui "au lieu d'être dans une démarche de proposition, essaye de faire du buzz pour faire parler d'elle".

Le maire d'Orléans se défend d'utiliser le magazine municipal à des fins politiques, mais concède : " j'ai mon édito, c'est un dossier. J'ai toujours une prise de position dans Orléans Mag".

C'est un magazine d'information à destination des orléanais, donc on informe. Cela veut dire qu'on n'aurait pas le droit de parler de ce genre de questions ? L'opposition décide de ce dont on a le droit de parler et ce dont on n'aurait pas le droit de parler ? Ça s'appelle de la censure. C'est un sujet qui touche Orléans et qui intéresse les orléanais et j'estime qu'il est parfaitement normal d'informer les orléanais.

Serge Grouard - Maire DVD d'Orléans

Sur le choix de la photo de Une qui n'a aucun lien avec Orléans où elle n'a d'ailleurs pas été prise, Serge Grouard le justifie : "On aurait pu prendre exactement la même photo parce qu'il y avait des personnes SDF encore récemment sous les arcades de la Région. On ne l'a pas fait par décence. Et vous voyez qu'on ne voit pas le visage sur cette image. Ce qui est choquant, c'est la réalité de cette image. On met la poussière sous le tapis donc on déménage tout le monde de Paris et après les villes se débrouillent."

L'édile réfute également tout rapport avec le contexte actuel de campagne pour les élections européennes : "En plus, on n'a aucun candidat qui soit d'Orléans", justifie l'édile qui au contraire, encourage la gauche à "se saisir" de la question de l'immigration en vue de l'élection présidentielle à venir. "Rappelez-vous pourtant de ce que disait Michel Rocard : "La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde". Là, on a mis sa position sous le tapis. Une partie de la gauche est totalement irresponsable mais après va se plaindre de la montée du rassemblement national."

Alors Serge Grouard a-t-il le droit d'utiliser Orléans Mag pour prendre position sur cette question ? 

Pour Me Louis Le Foyer du Costil, avocat en droit Public, un maire peut tout à fait "politiser" le contenu du bulletin municipal : "Les magazines municipaux sont toujours à la gloire du maire, de leur activité extérieure et il y a une contrepartie qui est de laisser des espaces d'expression à l'opposition."

En revanche, "Il a le droit d'avoir des opinions politiques, mais dans le cadre du journal, il doit normalement se cantonner aux sujets locaux dans lesquels il a une compétence. Or, même si le sujet touche sa ville, il n'a pas de compétence en matière d'immigration. C'est une compétence nationale." En conséquence, selon le conseil, "Comme on ne peut pas annuler la parution d'un journal, le préfet pourrait tout à fait s'en saisir juridiquement ou même des élus d'opposition."

Dans un communiqué, quatre députés de la majorité du Loiret enfoncent le clou

"La précarité n'est pas un terrain de jeu politique", indiquent Anthony Brosse, Caroline Janvier, Richard Ramos et Stéphanie Rist. Par le biais d'un communiqué, les députés de la majorité présidentielle du Loiret ont réagi pour "rétablir la vérité"

Les quatre élus dénoncent "l'ambiguité malsaine entre précarité, immigration et délinquance" et répondent aux chiffres avancés par Serge Grouard. "Ce ne sont pas "plusieurs centaines de migrants", mais 146 personnes qui ont à ce jour été orientées vers une solution d'hébergement dans le Loiret" et rappellent que "l'ensemble du dispositif est tout à fait connu, contrôlé, structuré et transparent"

Enfin, à cinq jours des élections européennes, les députés appellent à la "sagesse", la "responsabilité" et "l'humanité" et à éviter tout "amalgame entre migrants, sans-abris, sans-papiers".

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