Plus de juges mais des robots pour signaler des fautes ? La menace est bien réelle et commence déjà à s’installer sur le circuit du tennis professionnel. Alors que l'Open de tennis d'Orléans bat son plein à l'Aréna CO’Met, nous sommes allés sonder Richard Gasquet ou encore Lucas Van Assche.
Non, les joueurs qui participeront aux prochaines éditions de l’Open d’Orléans ne seront pas arbitrés par une technologie. En tout cas, ce n’est pas acté pour les années à venir. Pourtant, sur les grands tournois du circuit ATP (Association of Tennis Professionnal), les juges de lignes seront remplacés à partir de 2025 par l'"Electronic Line Calling Live". Une technologie qui "vise à optimiser la précision et la cohérence entre les tournois, les terrains de match et les surfaces pour les joueurs participants", précisait le communiqué de l’ATP en avril 2023.
Pour le moment, cette décision concerne les tournois ATP 250, 500 et les Masters 1000. La mesure est même déjà en place pour deux tournois du grand chelem : l’Open d’Australie et l’US Open qui emploient donc déjà cette technologie depuis 2021.
À ne pas confondre avec le "Hawk-Eye" ou challenge
À ce jour, la plupart des tournois, hors terre battue, utilise la technologie "Hawk-Eye" aussi appelée "challenge" en France. Une technologie d’arbitrage vidéo complémentaire que les joueurs peuvent demander à utiliser un nombre de fois limité dans un set. En cas de doute sur une balle, les joueurs signalent à l’arbitre d’un geste du bras et une vidéo montre l’endroit exact de l’impact de la balle, le fameux "boum boum boum" que le public orléanais connaît si bien après les 18 éditions de l’Open d’Orléans.
L’Open d’Orléans, tournoi challenger ATP 150 n’est donc pas encore concerné. Mais au vu des décisions prises pour les tournois les plus prestigieux, l’hypothèse pourrait venir sur la table les prochaines années.
Le directeur du tournoi, Didier Gérard, a un avis bien tranché sur la question. "Je suis absolument contre. Dans le paysage du tennis, il y a un filet, des lignes, des joueurs, un arbitre, des ramasseurs de balles et des juges de ligne. Il ne faut pas déshumaniser la compétition avec des robots".
"Tant que l'ATP ne m'obligera à avoir le tout électronique, je garderai de l'humain sur le terrain"
Et quand on lui demande le coût de l’installation de cette technologie… "Je n’en sais strictement rien, je suis incapable de dire aujourd’hui si le fait d’avoir la technologie va coûter plus, ou moins cher. Tant que l'ATP ne m'obligera à avoir le tout électronique, je garderai de l'humain sur le terrain".
Un avis partagé par certains joueurs comme Richard Gasquet, 37 ans, ex-numéro 7 mondial."Je suis un peu déçu qu’il n’y ait plus de juges de ligne, je trouve que c’est important. L’arbitrage vidéo c’est super, le Hawk-Eye est une avancée incroyable mais les juges de ligne amènent quelque chose de plus au tennis. Il faut garder un petit peu le côté humain et je trouve ça dommage de ne plus les avoir" (sur certains tournois).
Un avis partagé par le franco-anglais Arthur Féry 21 ans : " Personnellement, je préfère dans ce format ici avec de vrais juges de lignes puis le "Hawk-Eye" pour vérifier les erreurs. Je pense que c’est bien d’avoir un côté humain sur le court".
Ça donne de la vie sur le court
Benjamin Bonzi, 27 ans, 98e au classement ATP au 25/09/2023
D’autres joueurs sont plus hésitants. "Les deux sont bien, le petit jeu du challenge (Hawk-Eye) avec le juge de ligne est sympa par moments. Ça a du charme à l’ancienne d’avoir les juges de lignes, ses petits doutes sur les balles et sur les marques. Le truc qui est sûr avec les annonces automatiques, c’est que tu n'as aucun doute. Je ne sais pas ce qui est le mieux aujourd’hui", réagit Benjamin Bonzi, 27 ans.
Luca Van Assche, 19 ans et 69e mondial, est lui, favorable. "J’aime plutôt bien, au moins tu es sûr qu’il n’y ait pas d’erreurs, normalement. Je pense que c’est une belle évolution pour le tennis. À Orléans, on a le droit au challenge donc si on a un doute, on peut quand même vérifier".
Une technologie à adapter selon les surfaces de jeux ?
Une technologie qui pourrait s’adapter aux différentes surfaces. En effet, la trace de la balle sur la terre battue reste visible, ce qui n’est pas le cas sur des surfaces comme le gazon ou le dur par exemple. "Sur le gazon et dur, c’est très utile. Sur terre battue, j’aime bien quand l’arbitre descend pour voir la marque, c’est une tradition", continue le jeune joueur. Une tradition qui amène aussi son petit lot d’erreurs donc "ça pourrait être cool d’avoir ça (la vidéo) sur terre", conclut la tête de série numéro 2 du tournoi orléanais.
Aucun juge de ligne du tournoi d'Orléans n'a souhaité répondre à nos sollicitations. En avril dernier, Rémy Azémar, juge arbitre de Roland-Garros réagissait chez nos confrères de France Info : "On va voir comment les choses vont évoluer, mais il ne faut pas se presser. L’arbitrage électronique s’est mis en place plus rapidement dans certaines régions, peut-être aussi parce que la qualité de l’arbitrage humain n’était pas au niveau souhaité".
Vous l'avez compris, au sein même du tennis professionnel français, le sujet divise. À Orléans, l'humain résiste donc à cette nouvelle technologie, pour l'instant.