Les confrères du Dr Blanchon, accusé d'escroquerie par la Caisse d'Assurance Maladie, veulent se rapprocher du dossier.
"Nous souhaitons absolument nous impliquer, et comprendre ce qui a mené à une situation pareille" assure le Dr Christophe Tafani. Le 4 juillet, un médecin généraliste de l'Argonne (Orléans), le Dr Jean-Marc Blanchon, a été placé en garde-à-vue suite aux accusations d'escroquerie de la Caisse d'Assurance Maladie. Dans cette affaire, le Conseil Départemental de l'Ordre des médecins a décidé de se constituer partie civile, ce qui lui permettra d'avoir accès au dossier.Le Dr Tafani, président du Conseil a été auditionné dans le cadre de l'enquête menée par le parquet d'Orléans. "Il y a effectivement des éléments troublants", reconnaît Christophe Tafani. Si aucun texte ne loi ne limite ni le nombre ni la durée des consultations médicales, "certains confrères peuvent avoir de très grosses journées, jusqu'à 50 patients. En période épidémique, il peut arriver que ça monte à 70 mais ça reste des épiphénomènes. Si c'est tous les jours, ça pose question."
"Démographie médicale ou non"
Pour sa défense dans la presse, le médecin à la salle d'attente trop pleine s'est positionné comme le palliatif d'un système "défaillant". Au coeur d'un désert médical, ce docteur qui accueille toute la journée sans rendez-vous est une vraie poule aux oeufs d'or. "Au milieu de tout ça, il y quand même des patients. Il faut s'assurer qu'ils ont bien été pris en charge. S'il y a eu une mise en danger, démographie médicale ou non, c'est grave. La conscience professionnelle, c'est aussi la qualité des soins" contrebalance Christophe Tafani.
Mais l'Ordre des Médecins, qui prend les précautions d'usage pour respecter la présomption d'innocence, doit aussi se soucier du confrère montré du doigt. "C'est un confrère sur lequel nous n'avons jamais eu aucun signalement pour ce type de problèmes. Est-ce que même il ne serait pas en souffrance ? Un problème de burn-out, par exemple." Si les accusations de la CPAM sont avérées, ce sera au Conseil de l'Ordre de décider d'une sanction pouvant aller jusqu'à la radiation.
Des cas souvent complexes
Cette année, plusieurs médecins ont déjà été poursuivis ou condamnés pour fraude. Chaque fois, c'est bien l'activité inhabituelle du praticien qui attire l'attention de l'Assurance Maladie, au-delà des 60 consultations par jour.
A Dreux, en mai dernier, le médecin généraliste du quartier des Oriels avait été arrêté à son cabinet médical, ainsi que les deux infirmières et la secrétaire. Le praticien est lui aussi accusé d'escroquerie, mais aussi de faux et usage de faux.
En février, un généraliste toulousain avait écopé de 18 mois de prison avec sursis. En regardant de plus près parmi ses 115 consultations quotidiennes, la CPAM avait identifié des consultations selon elle fictives. Le praticien, lui, a toujours contesté l'ampleur de la fraude, mais a reconnu avoir utilisé des documents d'autres patients afin de soigner des sans-papiers.
Attentive aux fraudes, la CPAM l'est avec un zèle qui lui a déjà valu les critiques de la profession, notamment dans le cas des prescriptions d'arrêt maladie. L'année dernière, un collectif de médecin bretons accusait l'Assurance Maladie d'avoir créé de fait un "délit statistique", en mettant la pression sur les "gros prescripteurs". Dans la ligne de mire : des objectifs de réduction des dépenses, qu'il faut atteindre.