Depuis quatre semaines, la police technique et scientifique fait grève pour obtenir le même régime spécifique que celui accordé aux policiers "actifs" par le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner.
Jambes ensanglantées, têtes arrachées, cadavres jonchant le sol... La PTS (police technique et scientifique) avait prévu une mise-en-scène choc pour sa manifestation du mercredi 16 janvier dans le jardin des Tuileries (Paris).
Sur place, environ 300 agents venus se faire entendre en cette quatrième semaine de grève. Et pour cause, la PTS n'a pas été intégrée au régime spécial de retraite promis aux policiers par Christophe Castaner, en décembre dernier.
Soazig Henrio, membre du Syndicat national indépendant des personnels administratifs techniques et scientifiques (SNIPAT), précise que l'action de mercredi aura permi de bloquer 80% des services au niveau national.
Ces agents, qui représentent pourtant 2% de la police nationale et qui réalisent en moyenne une intervention par minute sur tout le territoire et résolvent environ 30% des enquêtes de police, ne partiront pas à la retraite à 52 ans comme les policiers "actifs"."Notre statut n'est pas en adéquation avec nos missions. Nous sommes considérés comme des administratifs, alors que nous allons tout le temps sur le terrain.",
Soazig Henrio
Ils nous suivent dans toutes nos affaires et il faut les prendre en considération!
— Abdoulaye.Kant (@AbdoulayeK3) January 6, 2020
Total soutien à la #PTS??#unstatutPourLaPTS! https://t.co/zeiIcqbkVU
Un métier à risques
Dans le cortège, des scientifiques venus de toute la France pour témoigner de la dangerosité de leur métier.Face-à-face avec des criminels, interventions sur des lieux de tuerie, expertises sur des cadavres d'enfants ou sur des images pedopornographiques... Les risques physiques ou de séquelles psychologiques sont nombreux face à ce travail.
"Je me suis déjà fait caillasser sur le terrain. Certains collègues se sont fait braquer au fusil à pompe. Les risques sont énormes", Soazig Henrio
Depuis 2010, chaque agent de la PTS est équipé d'un gilet pare-balle, mais n'est par contre pas armé.
Dans l'exercice de leur fonction, ces experts sont aussi amenés à utiliser des produits chimiques classés CMR, c'est-à-dire potentiellement cancérogènes, mutagènes ou toxiques.Bien que les agents de la PTS soient en contrat de 40h30 par semaine, ils doivent également rester disponibles 24h/24, sept jours sur sept.
Après une journée de travail, un agent peut donc être rappelé plusieurs fois dans la nuit pour venir expertiser différentes affaires, puis reprendre le travail dès le lendemain matin.
Un rythme propice au surmenage et au burn-out.
Selon Soazig Henrio, un agent de la PTS qui doit se lever plusieurs fois par nuit et faire face pendant des années à des scènes d'horreur ne pourra pas travailler efficacement jusqu'à 64 ans.
Des situations pénibles qui poussent un bon nombre d'agents à réclamer un régime spécifique qui leur permettrait de partir à la retraite plus tôt que la moyenne.
"Nous sommes admirés à la télé mais méprisés par l'Etat"
Depuis le 23 décembre, les trois syndicats de la profession (SNIPAT, SNPPS, Alliance-SNAPATSI) ont donc appelé à la grève. Ces agents sont par ailleurs les seuls policiers à pouvoir faire valoir ce droit.Dans toute la France, des PTS répartis dans les différents commissariats et laboratoires ont manifesté leur mécontentement au cours des quatre dernières semaines.
Une situation similaire au mouvement social que la profession avait connu l'année dernière à la même époque, qui réclamait déjà un statut pour la police scientifique.
"Cette grève n'est pas la première pour nous, mais elle est la plus longue et la plus dure", précise Soazig Henrio, en grève depuis décembre.
Les syndicats affirment d'ailleurs avoir essuyé trois annulation de rendez-vous le ministère de l'Intérieur depuis décembre 2018.