Adoptée à l'Assemblée Nationale en janvier dernier après des débats houleux, la proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale vient seulement d'être examinée au Sénat. Et l'ensemble des associations qui luttent pour le bien-être des animaux dénoncent un recul majeur
Le texte adopté en janvier dernier par les députés était loin d'être suffisant, aux yeux de certaines associations : l'élevage intensif, la chasse ou la corrida n'y étaient même pas évoqués.
Mais cette proposition de loi, portée aussi par des députés de la majorité contre l'avis même du gouvernement, comportait de réelles avancées, saluées par les militants animalistes : on peut citer, entre autres, l'interdiction de la vente de chiens et chats dans les animaleries, la fin des animaux sauvages dans les cirques et des cétacés dans les delphinariums.
Mais avant que la proposition ne devienne loi, elle devait d'abord passer par le Sénat, jeudi 30 septembre : le texte y a été totalement vidé de sa substance, selon les défenseurs de la cause animale, qui fustigent le vote de la majorité sénatoriale sur les articles les plus sensibles.
???Grande déception et amertume ce soir au sortir des discussions sur la #PPLAnimaux au Sénat. Les débats n'ont pas été à la hauteur des attentes sociétales et le texte qui en sort est un recul majeur sur la volonté des députés. Nous n'allons pas en rester là ✊ go CMP ?
— Code Animal (@code_animal) September 30, 2021
La ministre de la Transition Ecologique, Barbara Pompili, a pourtant rappelé, en ouverture de la séance au Sénat, que les Français sont de plus en plus sensibles à la cause du bien-être animal :
"La protection des animaux (...) est aussi une demande forte de la part de nos concitoyens et les chiffres parlent d'eux-mêmes : 90% des Français soutiennent cette proposition de loi, telle qu'elle a été déposée sur le bureau du Sénat."
Cirques, animaleries, delphinariums, marche arrière !
A l'issue de cet examen au Sénat, il ne reste pourtant pas grand-chose du texte original, par exemple sur le cirque, explique Alexandra Morette, la présidente tourangelle de Code Animal :
"C'est un énorme recul par rapport à ce qui avait été voté à l'Assemblée Nationale et notamment pour les cirques où devaient être interdits tous les animaux sauvages. Le Sénat revient dessus, évoque seulement certaines espèces sous des critères un peu obscurs, et renvoie la balle au ministère. On ne sait pas ce qui va être interdit, quand, comment...C'est clairement une manoeuvre du gouvernement qui voulait interdire certaines espèces mais pas toutes. On en revient au plan initial de madame Pompili", dénonce-t-elle.
Pour rappel : en décembre 2020 la Région Centre-Val de Loire a été la première en France à prendre position pour l'interdiction des animaux sauvages dans les cirques.
Ce n'est pas tout : l'interdiction de vente des chiens et chats dans les animaleries (une mesure réclamée de longue date par les associations pour lutter contre les abandons) a été également retoquée par les sénateurs.
Aberrant ! Le @Senat rejette l'interdiction de la vente des animaux en animalerie, qui avait été votée en 1ère lecture à l'@AssembleeNat ?
— Fondation 30 Millions d'Amis (@30millionsdamis) September 30, 2021
Une mesure pourtant indispensable pour lutter contre les acquisitions compulsives responsables d'abandons et d'euthanasies... #PPLAnimaux pic.twitter.com/is7ltR0ldC
Avec les sénateurs, les deux delphinariums français, eux aussi, ont de beaux jours devant eux : "Autre recul majeur du Sénat, se désole la présidente de Code Animal, la reproduction des dauphins dans les delphinariums est à nouveau autorisée. Tout peut donc continuer comme avant."
"Honteux", "inadmissible", "aberrant", les associations animalistes n'ont pas de qualificatifs assez forts pour dénoncer aujourd'hui, sur leurs réseaux, ce détricotage du texte par la majorité sénatoriale. Et, à en croire les multiples sondages d'opinion organisés sur ces questions brûlantes, les sénateurs ont bel et bien un, voire plusieurs trains de retard sur la population française.
Malgré ce coup dur, les militants n'ont toutefois pas l'intention de baisser les bras. Une commission mixte paritaire comprenant à la fois des députés et des sénateurs doit maintenant se réunir pour tenter de trouver un compromis. S'ils n'y parviennent pas, ce sera bien à l'Assemblée Nationale de se prononcer en dernier ressort.