Depuis le 16 mars et l'annonce du confinement, familles comme professeurs de terminale s'inquiètent pour la fin de l'année scolaire. Entre la cloture des voeux sur le site Parcoursup en plein confinement et l'incertitude quant à la tenue des épreuves du baccalauréat, les classes sont dans le flou.
Entre confinement et cours à la maison, les classes de terminale paniquent face aux échéances qui les attendent : la fermeture du classement des voeux sur Parcoursup, le jeudi 2 avril à 23h59, et les épreuves du baccalauréat initialement prévues pour la fin de l’année scolaire.
Pas facile de se projeter pour les familles comme pour les professeurs, jusqu’ici laissés dans le flou. Seule certitude : le gouvernement a annoncé mercredi 1er avril que le baccalauréat 2020 serait aménagé pour tenir compte des conditions exceptionnelles de l'urgence sanitaire, et que Parcoursup clôturera bien ses voeux le 2 avril au soir.
Parcoursup, l’objet de la discorde
Faire ses voeux sur Parcoursup en plein confinement, l’équation est-t-elle incompatible ? Pour le gouvernement, rien de compliqué : les élèves n’ayant pas accès à internet chez eux pourront appeler leur lycée pour classer leurs voeux d'orientation à distance, une permanence devant être garantie dans chaque établissement.Du côté d'Elise Guilhaumon, élève de terminale S au lycée Grandmont de Tours, le confinement n’a pas forcément eu d'impact sur ses choix d’orientation.
Depuis le confinement, l’étudiante, qui a postulé dans plusieurs formations dans le domaine du digital, reçoit régulièrement des mails de rappel de sa professeure principale pour envoyer ses voeux et lettres de motivation sur la plateforme. Un suivi effectué davantage par les professeurs consciencieux que par les établissements.Concernant Parcoursup, le confinement n’a pas vraiment changé nos habitudes puisque nous faisions nos voeux chez nous, de notre côté, plutôt qu’au lycée.
De son côté, la Fédération des conseils des parents d'élèves (FCPE) a demandé une suspension de Parcoursup, notamment pour éviter des catastrophes et paniques liées au ralentissement des connexions internet.
Faire ses choix d'orientation sur Parcoursup durant le confinement peut poser des problèmes matériels et informatiques, mais semble offrir une nouvelle possibilité à certains élèves : celle de prendre plus de temps durant ces journées à la maison pour peaufiner ses voeux. Mathilde Casteigts, élève de terminale au lycée Saint-Gatien de Joué-les-Tours, a profité du confinement pour soigner sa candidature : "J’avais déjà pratiquement fini mes lettres de motivation pour Parcoursup, mais le confinement m’a permis d’être davantage concentrée et de mieux travailler mes voeux.""M. Blanquer, arrêtez de faire semblant", à lire les demandes de la #FCPE au ministre de l'Education nationale #COVID19 pic.twitter.com/1jLgXR8rMI
— FCPE_nationale (@FCPE_nationale) March 31, 2020
Emmanuel Gagnepain, professeur principal d'une classe de terminale au lycée Choiseul, est particulièment attentif au suivi des élèves sur les questions d'orientation, surtout en période de confinement.
Pour lui, Parcoursup n'est pas le problème majeur de cette année scolaire un peu particulière : "Moi je n’ai rien contre un délais supplémentaire sur la plateforme, mais je ne sais pas si ça va changer grand-chose. Chez nous, les rares élèves qui étaient en retard avec Parcoursup avaient davantage un problème d'orientation ou des difficultés scolaires que de matériel informatique lors du confinement."
Pour ce professeur d'histoire-géographie, le problème du confinement se trouve surtout les conditions des épreuves de baccalauréat et la continuité pédagogique, qui accentue les inégalités scolaires.
Hantise du baccalauréat
La grande inconnue de cette fin d’année scolaire reste le baccalauréat 2020 et ses conditions d’épreuves. Jusqu’alors, le gouvernement a expliqué plancher sur une version exceptionnelle du bac, sans toutefois donner plus de précision.Des élèves surtout inquiets de ne pas pouvoir terminer à temps le programme du bac, ou de ne pas bien comprendre les cours à distance.Les seules informations à notre disposition sont des avis dans la presse, ou des tweets dont on ne sait pas s'ils sont fiables. Les élèves vivent très mal ce flou. Emmanuel Gagnepain, professeur principal en terminale
Pour l’heure, ces futurs étudiants n'ont aucune idée de ce qui les attend à la fin de l'année. "Concernant les épreuves de bac, nous ne savons toujours pas dans quelle condition nous allons les passer. Le lycée n’est pas au courant non plus. Nous attendons les annonces du gouvernement. », explique Elise.
La jeune fille préfèrerait avoir au moins une épreuve dans sa matière majeure (les mathématiques), plutôt qu’un contrôle continu complet : "avoir au minimum une épreuve permettrait de rattraper les moyennes les plus basses, qui sont parfois aussi causées par des méthodes d’enseignement qui varient en fonction des professeurs."
Si la piste d’un contrôle continu exclusif devient sérieuse, les élèves dont les professeurs ont pour habitude de mettre des notes en deça de celles pratiquées pour les corrections de bac s’inquiètent d’être pénalisés. Le maintien de l’épreuve majeure permettrait effectivement à un bon nombre d’adolescents d’éviter de perdre des points à cause d’une méthode pédagogique ou sur une petite erreur de parcours.
Emmanuel Gagnepain souligne le cas des élèves qui ont besoin de toute l'année scolaire pour progresser dans une matière, et pour lesquels des épreuves finales semblent indispensables.
Les débats autour des trimestres de contrôle continu sont également nombreux. Comme Emmanuel Gagnepain, beaucoup pensent qu’il serait judicieux de prendre en compte les notes obtenues en classe de première par les élèves : « plus le contrôle continu sera large, plus il sera représentatif du niveau des élèves. »
Au-delà de la question des notes de premières, celles du troisième trimestre en confinement interroge aussi. Que faire des notes obtenues pendant cette période ? Une réponse nationale semble compromise, puisque certains professeurs ont décidé de ne pas noter leurs élèves durant cette période si particulière, alors que d’autres ont carrément maintenu les épreuves de bac blanc.
La jeune femme est d’autant plus concernée par la question qu’elle est en filière scientifique, et qu’elle n’a pourtant pas eu cours de mathématique en direct avec sa professeur depuis le début du confinement. Pour travailler, beaucoup de classes ne s’appuient effectivement que sur les documents écrits qu’ils reçoivent des professeurs, et n’ont pas la possibilité de poser des questions lorsqu’une difficulté survient.Je pense que c’est une mauvaise idée de compter les notes du confinement dans le contrôle continu. Il est difficile de se concentrer quand on travaille chez soi, certains élèves trichent… C’est compliqué de juger quelqu’un dans ces conditions, confie Mathilde entre deux cours à distance
Pour palier ce manque important, Mathilde prend des cours particuliers de mathématiques, et complète ses cours écrits avec des vidéos Youtube. Face à de telles disparités entre les classes, beaucoup pensent que des cours vidéo ou des conférences en direct, accessibles à tous les lycées de France, auraient été plus judicieux.
Au-delà de la fin de scolarité mouvementée pour les élèves de terminale, l’école à distance pose de nombreux soucis à toutes les tranches d’âge. Depuis le domicile, qui est devenu son nouveau lieu de travail, Emmanuel Gagnepain déplore les problèmes de connexion aux plateformes éducatives, et le manque de préparation des enseignants à des outils nouveaux pour tout le monde.