Pesticide : la justice annule tous les arrêtés de la région Centre sur les zones de non-traitement près des points d'eau

Les tribunaux administratifs ont donné raison à l’association France Nature Environnement Centre-Val de Loire (FNE). Cette dernière avait déposé des recours contre les arrêtés préfectoraux de 2017 qui permettaient d’épandre des pesticides à proximité de plus de points d’eau. 

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Après la polémique des pesticides près des habitations, voici celle près des cours d’eau. Une bataille qui s’est jouée devant la justice. La fédération FNE avait en effet déposé des recours au tribunal pour annuler, dans les six départements de la région, les arrêtés encadrant l’usage des pesticides à proximité des cours d’eau.

Pour bien comprendre, petit retour en arrière : afin d’éviter que l’eau ne soit polluée par des produits phytosanitaires, la France avait publié dès 2006 un arrêté ministériel interdisant l’usage de pesticides à moins de cinq mètres d’un point d’eau : c’est la zone de non-traitement ou ZNT. Elle concernait notamment des fossés ou des surfaces de moins d’un hectare.

Or, cet arrêté a été remplacé par un nouveau, publié en mai 2017, qui laissait à chaque préfet de département le devoir d’établir une nouvelle carte des ZNT près des cours d'eau. Celle-ci a été réalisée en se basant notamment sur la loi biodiversité de 2016 censée définir ce qu’est un cours d’eau ("un écoulement d’eaux courantes dans un lit naturel à l’origine, alimenté par une source et présentant un débit suffisant la majeure partie de l’année").

3.200 km de cours d'eau en moins

D’après les membres de FNE, ces nouvelles cartes réduisaient “drastiquement le nombre de points d’eau concernés par cette mesure de protection”.

Ils donnent l’exemple de l’arrêté d’Indre-et-Loire : “sur 7.400 km de réseau hydrographique, 3.200 km n’étaient plus considérés comme des cours d’eau ; et 13.000 mares, étangs et points d’eau n’étaient plus considérés comme points d’eau. Ces milieux pouvaient donc faire l’objet de traitements pesticides à proximité immédiate”. 

L’association a indiqué ce vendredi 19 juin, dans un tweet, avoir obtenu gain de cause, que la justice annule les arrêtés et ordonne aux préfets de prendre en compte “l’ensemble des surfaces d’eau figurant sur les cartes 1/25 000ème de l’IGN et les plans d’eau, lacs, étangs et mares qui ne sont pas en relation directe avec le réseau hydrographique de surface, et d’une surface inférieure à un hectare”.

Un quart des cours d'eau en bon état

L’enjeu est à la fois “écologique” et “sanitaire” pour la fédération environnementale. Elle met en avant plusieurs documents pour étayer ses dires. Dans un état des lieux de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne de 2019, environ 24 % des cours d’eau étaient en bon ou très bon état écologique.

Elle y ajoute les chiffres du rapport de l’Agence Régionale de Santé sur la qualité de l'eau potable en région Centre-Val de Loire : “En 2018, 16,7 % de la population, soit 434 707 habitants, a été alimentée par de l’eau ayant présenté des dépassements récurrents (plus de 30 jours dans l’année) en pesticides”. 

Une situation qui varie d'un département à l'autre voire d'un canton à l'autre comme on peut le lire dans cet article.

Les agriculteurs “perdus

Les préfectures vont donc devoir changer maintenant les règles, une très mauvaise nouvelle pour les agriculteurs. “Le choix des cultures dans les parcelles se décide à 90 % après les moissons (qui se déroulent environ de juin à août, NDLR), explique Florent Leprêtre, président de la FNSEA Centre-Val de Loire, syndicat agricole majoritaire. Or, le fait que tout devienne caduc maintenant est mal venu, beaucoup de personnes seront perdues”.

La redéfinition des points d’eau signifie aussi accroître les ZNT, et donc des terres en moins à cultiver pour les agriculteurs. “Quand on retire l’outil de travail aux agriculteurs, c’est très mal venu et mal perçu”, réagit le représentant syndical. 

Il regrette qu’on redéfinisse à nouveau les cours d'eau à protéger ou non, et qu'on revienne sur ces cartes établies à partir de la loi biodiversité mais pas seulement. “Derrière cela, dans tous les départements, il y a eu un travail d’expertise pour établir un classement des cours d’eau, affirme Florent Leprêtre. Une fois ce classement réalisé, il n’y a pas besoin d’y revenir. C’est sur le terrain que ça se passe.

On veut bien travailler avec la FNE, nuance-t-il. L’agriculteur façonne avec la nature et le sol, il n’a pas intérêt à tout chambouler et anéantir”.

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