2020 est une année catastrophique pour la betterave. Ravagée par la jaunisse, la récolte s'annonce très mauvaise.
Alors que la campagne betteravière va bientôt commencer, on sait déjà que les rendements seront cette année mauvais et même très mauvais. On le pressentait déjà mais les prélèvements effectués toutes les semaines depuis un mois dans les parcelles du Loiret, de l’Eure-et-Loir, de la Seine-et-Marne et de l’Yonne le prouvent. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les rendements vont connaître une baisse estimée à 40 voire 50 % par rapport aux années précédentes.
Le rendement au champ c’est-à-dire le tonnage de betterave présentes dans le champ est donc en très forte baisse (au printemps dernier, on tablait plutôt sur une baisse de 30%). En cause : la jaunisse véhiculée par les pucerons qui ont infecté les plants au printemps dernier. Habituellement les producteurs de betteraves sèment des plants de betteraves avec une petite enveloppe de pesticide : les néonicotinoïdes. Ceux-ci ont été interdits sur le territoire français en 2019. La jaunisse a donc envahi les champs de betteraves et fait des ravages en empêchant la plante de se développer : la jaunisse stoppe la photosynthèse de la plante et la plante stagne. Conséquence : la taille des betterave est très petite. De plus, beaucoup de betteraves ne pourront pas être récoltées car les arracheuses à betteraves ne sont pas conçues pour arracher les petites betteraves. Les machines arrachent des betteraves qui font entre 10 à 12 centimètres de diamètre. Techniquement, on ne peut arracher les betteraves plus petites. Conséquence : le rendement réel des betteraves récoltées va être encore plus faible.
Au faible rendement s’ajoute, cette année, une autre problématique : la sécheresse. Il a très peu plu durant le printemps et l’été. Les agriculteurs qui n’ont pas irrigué leurs parcelles sont encore plus pénalisés.
Pour les agriculteurs qui n’ont pas irrigué les betteraves et pour qui les betteraves n’ont pas bien poussé : l’arrachage paiera l’arrachage. Les pertes sont estimées entre 600 et 1 000 euros par hectare.
Les néonicotinoïdes dans la culture de la betterave
Dans la culture de la betterave, les néonicotinoïdes se cachent dans les semences : le plant de betterave pousse imbibé de ce pesticide et quand un puceron, qui transmet le virus de la jaunisse, la pique, il meurt. Ces néonicotinoïdes ont la réputation d'être des "tueurs d'abeilles" car la substance attaque leur système nerveux. Dans la culture de la betterave, le risque est limité pour les abeilles car les plants de betterave ne produisant pas de fleurs. Mais le danger n’est pas que pour les abeilles selon les chercheurs de l'Institut de la recherche agronomique qui expliquent qu'il y a toujours des fleurs qui poussent à côté des champs de betteraves ou en lisière et qui peuvent absorber le produit. Ces pesticide controversés sont interdits depuis 2018.Nous ne prétendons pas que les néonicotinoïdes sont inoffensifs pour la biodiversité. Nous savons qu’il y a des conséquences mais nous savons aussi qu’avec les betteraves (donc leur semences) traitées aux néonicotinoïdes :les risques sont limités.
La sélection variétale comme solution ?
Pour ne plus avoir à recourir aux néonicotinoïdes, des recherches sont menées. Il s'agit de travailler sur la sélection variétale pour trouver des variétés résistantes à la jaunisse. Cela a déjà été fait pour l’orge. Une variété d’orge résistante à la jaunisse arrive sur le marché pour les prochains semis qui auront lieu dans deux mois.La transition et le changement de modèle ne peuvent se faire du jour au lendemain. Il faut avancer et progresser et trouver des solutions techniques avant de tout interdire. Il faut réfléchir : c’est un choix de société. Où place-t-on le curseur ? Entre la protection de l’environnement et la protection de la biodiversité d’un côté et les impératifs économiques de la société de l’autre ?
Un problème aussi pour les sucreries
Une fois récoltées, les betteraves prennent le chemin des sucreries. Mais cette année, il y aura moins de volume à traiter pour l’industrie du sucre. Et cela pose problème : pour être rentable, une sucrerie doit être ouverte au moins 80 jours. Du fait de la fermeture de la sucrerie de Toury (Loiret) en 2019, les betteraves qui étaient traitées dans cet établissement le seront sur le site de Pithiviers qui aura ainsi la même quantité. Mais quid de la sucrerie de Corbeilles-en-Gatinais ? Ou celle de Souppes-sur-le-Loing qui est la dernière sucrerie indépendante de France ? La filière va être fragilisée et des emplois peuvent disparaître.Prélèvement dans ma parcelle de betteraves. Estimation à 32 tonnes par hectares. Si on retire celles trop petites pour être arrachées, ça tombe à 24 t/ha.
— Maxime Buizard (@MaximeBuizard) September 7, 2020
24 t/ha !!! ? pic.twitter.com/nFcbZfLlIk
Les néonicotinoïdes de retour dans les champs de betteraves
Par la voix de son ministre de l’Agriculture et de l’alimentation Julien Denormandie, le gouvernement a autorisé le retour, jusqu'en 2023, de ce pesticide pour la filière betteravière.#betterave, jaunisse, pucerons
— Emmanuelle Ducros (@emma_ducros) August 22, 2020
Un point précis et factuel sur le dossier, par les agronomes et scientifiques spécialistes du secteur. Pour couper court aux délires qui circulent. ⬇️#nni https://t.co/acxCj6NjTC