Sophie Auconie devient membre d'honneur de l'association Moi Aussi Amnésie

Créée le 20 mai dernier, cette association veut porter la parole des victimes d'une double peine : les agressions sexuelles, et les effets parfois violents de l'amnésie traumatique. 

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Amnésie traumatique. Des mots qui font timidement leur entrée dans le débat sur les violences sexuelles. A ces mots, la députée d'Indre-et-Loire Sophie Auconie a voulu accoler un article de loi : l'imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs.

Elle l'a défendue sous forme d'un amendement au projet de loi sur les violences sexistes et sexuelles. 

Sa pugnacité sur le sujet a lui valoir le statut de membre d'honneur au sein d'une association créée le 20 mai dernier : Moi Aussi Amnésie. Sa fondatrice, Mié Kohiyama, journaliste pour l'AFP, a elle-même été victime d'un viol à l'âge de 5 ans, et de l'effet encore mal connu qu'est l'amnésie traumatique. 

Qu'est-ce que l'amnésie traumatique ?


"C’est un mécanisme neurologique qui fait que lorsqu’un enfant subit ces violences, son cerveau – qui n’est pas fait pour les subir – va isoler le traumatisme, le stocker en quelque sorte dans un coin. Ça donne des vies fracassées, puisque toutes sortes de symptômes apparaissent, jusqu’au moment où le souvenir ressurgit. On estime que cela ressurgit en moyenne à 17 ans, mais cela peut être bien plus tard", explique-t-elle. 

Ces symptômes sont désormais connus, documentés et apparaissent sur un large spectre : dépression, symptômes d'addiction, apparition de maladies psychosomatiques, sans oublier les incidences évidentes sur le parcours personnel et la vie sexuelle. 

Et vient le jour où le souvenir réapparaît, dans toute sa brutalité. "Les victimes d'amnésie traumatique sont dans une énorme souffrance, détaille Mié Kohiyama. C’est un mécanisme qui est peu connu, peu maîtrisé, ce sont des victimes qui ont peur d’être considérées comme folles, qui ont peur de n’être pas crues."


Quand la Justice ne peut plus suivre


A cette brutalité s'ajoute souvent celle de ne pas pouvoir obtenir de réponse de la part de la Justice, à cause du délai de presciption. En France, en ce qui concerne les crimes sexuels sur mineurs, il était de vingt ans à compter de la majorité de la victime. Il vient d'être élargi à trente ans.

Insuffisant pour la fondatrice de l'association. "On souhaiterait que l’amnésie traumatique soit considérée comme un obstacle insurmontable qui suspende la prescription. De sorte que lorsque les victimes se souviennent, elles puissent déposer plainte et voir leur plainte instruite."

Mié Kohiyama connaît bien la bataille qui se joue face aux tribunaux. Elle a été la première en France à porter son cas devant la Cour de Cassation, en 2013, pour que soit prise en compte l'amnésie traumatique, et qu'elle puisse forcer à suspendre la prescription. "Ce qu’elle n’a pas reconnu, rappelle-t-elle. Mon affaire a été classée. Moi, je n’aurais jamais aucune réponse judiciaire." 

Du combat personnel au combat politique


Commence alors le combat politique. Les sénatrices Chantal Jouanno et Muguette Dini se saisissent de son argumentaire. En sortira la première proposition de loi pour allonger les délais de prescription, rejetée à l'époque. Mais le mouvement donne naissance à la mission Flavie Flament, en 2016. 

Nous arrivons fin 2017. La députée Sophie Auconie conduit le rapport d'information antérieur à la proposition de loi contre les violences sexuelles de Marlène Schiappa. 

"Nous avons fait un certain nombre d’auditions de spécialistes en neurologie et en neurosciences, qui nous ont parfaitement expliqué deux problématiques. D’un côté, le mécanisme de sidération et de l’autre la question de l’amnésie traumatique et du retour de la mémoire traumatique" raconte la députée. 

Elle entrevoit, grâce au progrès de ces sciences, la possibilité d'intégrer ce mécanisme dans la loi, "pour mieux protéger les victimes, et mieux sanctionner les auteurs". Au Sénat, la cause a déjà un champion : François-Noël Buffet, qui veut sa démarche trans-partisane. Sophie Auconie reprend son combat à l'Assemblée. Avec un acharnement qui attire l'attention de Moi Aussi Amnésie. 

"Sophie Auconie a sur cette question un engagement humain, cohérent, réfléchi et passionné. On est très reconnaissants de son action" témoigne Mié Kohiyama. 

L'histoire de leur collaboration s'offre un petit coche par les réseaux sociaux. Alors que Sophie Auconie s'enquiert des conditions à l'association, Moi Aussi Amnésie lui propose le statut de membre d'honneur. Que l'intéréssée a imméditament accepté. 


La messe n'est pas encore dite


"Ça me permet de me tenir informée des différentes études, analyses et réflexions qu’ils vont faire à travers cette association et m’afficher pour porter cette cause au sein de l’Assemblée mais aussi du Sénat" affirme la députée.

Car le projet de loi contre les violences sexuelles n'a pas fini son tour de piste. Il passera le 20 juin en commission au Sénat, puis en séance publique le 12 juillet, avant une deuxième lecture à l'Assemblée Nationale. 

François-Noël Buffet et Sophie Auconie se tiennent prêt à défendre de nouveau leur amendement. "Le but, c'est de ne pas lâcher", conclut Mié Kohiyama. 
Moi Aussi Amnésie : comment ça fonctionne ?
Après six mois d'activité militante, Mié Kohiyama et ses partenaires ont créé le 20 mai 2018 l'association Moi Aussi Amnésie.

Bien que certains des fondateurs et fondratrices aient été victimes eux-mêmes de violences sexuelles, l'association revendique de travailler avec des politiques, à l'instar de Sophie Auconie, et surtout avec des experts de la question. Parmi eux, la Dr Muriel Salmona, pionnière du travail sur l'amnésie traumatique en France. 

Les actions de l'association s'inscrivent dans trois trajectoires :
- Accompagner les victimes en leur offrant un espace de parole, où leurs souffrances sont reconnues et écoutées
- Agir dans le champ politique pour la reconnaissance de l'amnésie traumatique dans la loi
- Informer sur le sujet de l'amnésie traumatique pour une meilleure reconnaissance par le public et les professionnels de santé. 

Suivre les actualités de l'association : @MiKohiyama - Twitter 
Adhérer à l'associationhttps://moiaussiamnesie.fr/adhesion/
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