Avec "Les Apaches", en salles mercredi, le réalisateur Thierry de Peretti montre une autre vision de la Corse avec un film électrique sur la dérive d'une certaine jeunesse.
Thierry de Peretti a voulu saisir "un peu de la réalité de la Corse", loin des stéréotypes véhiculés sur l'île, racontait-il à Cannes en mai dernier où son long métrage était présenté dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs.
"Peu de films racontent la Corse d'aujourd'hui", estimait le cinéaste selon lequel l'île est "privée d'une représentation juste".
Le titre de western du film fait référence à la façon dont le préfet de police appelait au début du XXe siècle les mauvais garçons de Belleville à Paris.
Les apaches ici se résument à une bande de garçons désargentés et sans avenir, tous nés en Corse dont les familles sont originaires de
l'île ou du Maroc.
Un petit groupe de jeunes s'introduit un soir dans une luxueuse villa plantée sur les hauteurs, y font la fête avant de repartir au petit matin avec quelques objets sans grande valeur. Jusque là, rien de grave.
Mais voilà, l'un d'entre eux a aussi volé deux fusils, sans le dire aux autres.
La propriétaire se plaint à un caïd local car "les gendarmes, si tu as besoin
de rien tu les appelles", lui fait dire de Peretti.
Le piège va progressivement et inéluctablement se refermer sur la petite bande qui a peur de "finir dans le maquis", autrement dit d'être assassinée.
Et le pire, engendré par la peur des représailles, ne viendra pas forcément de ceux qu'on croit.
Le rapport à la violence et au meurtre devient la question centrale d'un scénario basé sur un fait divers réel qui s'est déroulé à Porto Vecchio, dans
l'extrême sud de la Corse.
La ville et ses environs entre maquis et marécages servent d'ailleurs de décor grandeur nature à ce premier long métrage sous tension.
"Les Apaches" est donc loin de l'ambiance décrite par Sofia Coppola dans "The Bling ring", présenté à Cannes également et aussi tiré d'un fait divers.
Si Coppola parle de la jeunesse dorée, de Peretti dépeint des jeunes vivant dans des immeubles dégradés, des banlieues sans charme, loin du luxe côtier.
"On montre la Corse au cinéma comme une terre d'omerta et de violence, au mieux comme une gigantesque plage, au pire comme un ramassis
d'assassins", déplorait à Cannes Thierry de Peretti.
Or "la Corse est un endroit compliqué, meurtri et offensé", selon le réalisateur, qui évoque une violence en grande partie d'origine sociale.
Dans la petite cité balnéaire multi-ethnique, qui compte des quartiers modestes, des jeunes sans repères se sentent un peu dépossédés de leur ville en été lorsque 150.000 touristes affluent.
Le tourisme de masse a généré envie et frustration, résumait le réalisateur.
Le film à petit budget (700.000 euros) est interprété avec authenticité par six jeunes de 16 ans à 23 ans dont Aziz El Haddachi qui "vit dans le quartier de la vraie victime", rappelait encore le cinéaste.