L'écrivain et sociologue Albert Memmi est mort à l'âge de 99 ans. Gilles Simeoni salue la mémoire d'un homme qui a "contribué à forger la culture politique de générations de militants anti-colonialisme".
Albert Memmi, né en 1920 à Tunis, grandit dans le ghetto juif de la Hara, deuxième des 13 enfants de Fraji François Memmi et de Maïra Marguerite Sarfati.
A peine né, il fait connaissance avec les réalités de la colonisation, lorsque l'employé de mairie refuse d'enregistrer le prénom proposé par son père, hébraïque, et n'accepte que le prénom occidental d'Albert.
Le penseur de la décolonisation
Juif dans un pays musulman, et tunisien dans un protectorat français, Albert Memmi va grandir au cœur d'une époque de profondes mutations, qui va profondément modeler sa pensée.Toute sa vie, longue d'un siècle, Albert Memmi, devenu romancier et brillant essayiste, consacrera son œuvre aux douloureuses questions de la judéité, du racisme et de la décolonisation.
A ce titre, son ouvrage Portrait du Colonisé, publié en 1957. Tandis que la guerre d'Algérie fait rage. (Le Portrait du Colonisateur viendra enrichir l'ouvrage quelques années plus tard).
Il y observe et analyse les relations complexes entre les dominants et les dominés.
Albert Memmi, qui revendique "un combat politique" y écrit :Tous les colonisés se ressemblaient
« J'ai entrepris cet inventaire de la condition du colonisé d'abord pour me comprendre moi-même et identifier ma place au milieu des autres hommes Ce que j'avais décrit était le lot d'une multitude d'hommes à travers le monde. Je découvrais du même coup, en somme, que tous les colonisés se ressemblaient ; je devais constater par la suite que tous les opprimés se ressemblaient en quelque mesure. »
Un chantre de l'émancipation
Salué par Albert Camus, Jean-Paul Sartre, ou la prix Nobel Nadine Godimer, ce livre va devenir le livre de chevet d'innombrables militants pour l'émancipation à travers le monde.Ce fut également le cas en Corse.
Albert Memmi a écrit plusieurs fois sur l'île, dans plusieurs de ses ouvrages. A ce titre l'une des entrées de son Dictionnaire critique à l'usage des Incrédules était consacrée à la Corse.
Il a également signé la préface de l'ouvrage de Jean-Guy Talamoni publié en 2001, Ce que nous sommes, Ciò che no simu.
Gilles Simeoni lui a rendu hommage hier :
Les écrits d’Albert #Memmi, et notamment son « Portrait du colonisé », ont contribué à forger la culture politique de générations de militants anti-colonialistes, en Corse comme partout dans le monde. Condoléances sincères à tous les siens. https://t.co/lmdXl3cpmP
— Gilles Simeoni (@Gilles_Simeoni) May 24, 2020
marquera profondément la pensée de l'apr