Il y a cinq ans, jour pour jour, Jean Livrelli était tué par erreur à Bastelica, sur la route du plateau d'Ese. L'enquête a récemment été bouclée par le juge d'instruction en charge de l'affaire, laissant espérer aux proches du retraité un prochain dénouement judiciaire.
Il est aux environs de 5h du matin, ce 23 août 2018, et Jean Livrelli grimpe dans son pick-up Nissan Navara noir pour rejoindre ses amis. Il a rendez-vous pour une battue aux sangliers, et n'a pas prévu de rentrer trop tard dans la journée.
Jean Livrelli est seul au volant de son véhicule. Il quitte son domicile, puis le village, comme à son habitude. Et puis, soudain, dans un virage de la route départementale 27A en direction du Val d'Ese, tout s'arrête. Pris dans un guet-apens, l'homme est la cible de plusieurs coups de feu. Grièvement blessé, il décède quelques minutes seulement après les faits. Il avait 67 ans.
La nouvelle de son assassinat se répand comme une trainée de poudre. Qui pouvait bien en vouloir à ce paisible retraité, ancien garagiste et à qui on ne connaissait pas d'ennemis ? Une piste est rapidement privilégiée par les enquêteurs : celle de la méprise.
Erreur de cible
Car dans ce même village de Bastelica vit Alain Lucchini, présenté par les services de police comme un membre influent du grand banditisme insulaire. C'est lui, estime la police judiciaire, chargée de l'enquête par la JIRS (juridiction interrégionale spécialisée) de Marseille, qui était la vraie cible des tireurs. Hasard malheureux, lui et Jean Livrelli, - comme plusieurs autres habitants de la commune - conduisent ainsi le même véhicule, justifiant la confusion.
Il faut attendre deux ans pour voir les premières mises en examen dans ce dossier. Neuf personnes, parmi lesquelles Antò Moretti et Guy Orsoni. Le 21 février, l'une d'entre elles, Jean-Toussaint Voglimacci, est tuée par balles. Les huit autres hommes continuent de leur côté de nier leur implication dans cette affaire.
Vers une issue judiciaire
Cinq ans après les faits, l'enquête a finalement été déclarée complète par le juge d’instruction marseillais qui en a la charge. C'était au mois d'avril dernier. Depuis, les réquisitions du parquet se font toujours attendre.
Celles-ci pourront s'appuyer sur de nombreux éléments techniques : en particulier, des écoutes téléphoniques, du pistage au moyen de balise GPS ainsi que des images de vidéosurveillance. À ces éléments matériels s’ajoute un mobile éventuel de volonté d’emprise sur la chambre de commerce d’Ajaccio, autour de laquelle le groupe d’Orsoni et celui de Lucchini se faisaient concurrence, selon les enquêteurs.
Reste à savoir si le parquet estimera que les éléments recueillis durant les cinq années d’investigations légitiment un passage en cour d’assises, ou s’ils ne permettent qu’un renvoi devant le tribunal correctionnel. Contactée par téléphone, la famille de Jean Livrelli a affirmé espérer un procès.