Pour son deuxième et dernier jour de visite dans l'île pour installer les référents de son parti Horizons, Edouard Philippe était à Ajaccio ce mercredi. L'ancien Premier ministre a indiqué que des représentants de sa nouvelle formation devraient se présenter aux prochaines élections Législatives.
"C’est quoi toutes ces caméras et ces micros. C’est pour vous Monsieur le maire ?" "Ce n’est pas pour moi, c’est pour l’ancien Premier ministre," répond Laurent Marcangeli à deux Ajacciennes intriguées par la présence d’une dizaine de journalistes et photographes, ce mercredi matin, devant un café du cours Napoléon.
En visite dans l’île depuis mardi, Edouard Philippe a poursuivi son déplacement pour installer les référents de son nouveau parti politique. Après Bastia la veille, c’est à Ajaccio que l’ex-Premier ministre d’Emmanuel Macron a officialisé la nomination d’Antoine Maestrali en tant que délégué du comité municipal d'Horizons dans la cité impériale. Cette désignation du directeur de cabinet de Laurent Marcangeli était connue depuis un mois.
"J’ai travaillé avec Laurent (Marcangeli) sur de nombreux dossiers dont celui de la cession de la citadelle d'Ajaccio. Cela faisait 50 ans qu’on en parlait. Ma crainte, à l’époque, était qu’Edouard Philippe ne soit plus Premier ministre avant qu’on signe l’acte de cession." L’anecdote d’Antoine Maestrali fait sourire les quelque 170 personnes présentes dans la salle Sampiero Corso du Palais des congrès. Elle rappelle, aussi, les liens qui unissent le maire du Havre à celui d’Ajaccio, qui n’est autre que le référent régional de son nouveau parti en Corse.
"Mes convictions demeurent intactes, elles n’ont pas changé et sont celles qui m’ont fait pousser la porte du RPR à l’âge de 16 ans, déclare Laurent Marcangeli qui a quitté Les Républicains en 2018. Elles ont peut-être un peu évolué avec l’âge et l’expérience mais, sur l’essentiel, ces convictions sont les mêmes", précise le maire en préambule de son intervention dans une salle où se trouvent plusieurs de ses adjoints à la mairie. Au premier rang, on note la présence de Stéphane Sbraggia, Caroline Corticchiato et Charles Voglimacci.
Venue de Porticcio, Valérie Bozzi est elle aussi présente dans la salle. "Je suis là car je suis intéressée par le débat d’idées de la droite et du centre et le partage des connaissances, explique la maire de Grosseto-Prugna et conseillère territoriale "Un soffiu novu" à l’Assemblée de Corse. Laurent Marcangeli est fortement engagé dans ce parti au niveau national, je crois que c’est important de venir le soutenir et confronter nos idées au niveau local et national, discuter ensemble. C’est important qu’Edouard Philippe ait voulu expliquer sa démarche qui est pour l’instant déconnectée d’une élection."
Les Législatives en ligne de mire
Si le parti Horizons est en cours de structuration et vient de trouver son siège à Paris - avenue d’Iena, là où Jacques Chirac avait établi son QG de campagne à la présidentielle de 1995 -, ses représentants regardent néanmoins avec intérêt les futures échéances électorales. D’abord la présidentielle, qui leur servira en quelque sorte de baromètre. Une élection dans laquelle Emmanuel Macron n’est - pour l'instant - pas officiellement candidat.
"Avec l’installation de ces comités municipaux d’Horizons, mon objectif est d’expliquer ce que je veux faire et redire ma loyauté complète au président de la République, rappelle Edouard Philippe. En effet, son bilan est aussi en large partie mon bilan. Je n’ai jamais considéré que nous avions tout fait parfaitement. On a essayé de faire des choses. Ça sera donc au président de définir la ligne de sa campagne et je serai évidemment avec lui dans celle-ci."
La volonté est d’enraciner ce parti et d’avoir un groupe parlementaire dès le mois de juin prochain.
Dans la foulée de la présidentielle, les Législatives arriveront à grands pas, avec un premier tour le 12 juin. Une échéance où l’on devrait retrouver des candidats d’Horizons. "Un parti politique, ça a vocation à présenter des candidats, explique Edouard Philippe. Horizons en présentera aux Législatives. Le parti n’est pas la seule formation politique qui aspire à faire partie de la majorité. On aura des discussions avec les autres formations politiques qui aspirent également à en faire partie. On aura une discussion sereine et tranquille."
"Sur Ajaccio, l’objectif est de pouvoir structurer le parti et préparer les futures échéances, expose face à notre caméra Antoine Maestrali. La volonté est d’enraciner ce parti et d’avoir un groupe parlementaire dès le mois de juin prochain à l’Assemblée nationale"
Cartes rebattues ?
Dans la première circonscription de Corse-du-Sud, une question se pose notamment autour de la candidature de Jean-Jacques Ferrara. Élu sous la bannière Les Républicains en 2017, le député de droite pourrait-il être gêné par l'arrivée du parti Horizons dans la course aux Législatives ? "La situation n’est pas délicate, répond Antoine Maestrali. Il faut la gérer. Il est vrai que les présidentielles vont déterminer pas mal de choses. Le député Jean-Jacques Ferrara est notre ami. On va regarder tous ensemble comment évolue la situation au niveau national et, comme l’a dit Laurent Marcangeli, le soir du 10 avril (premier tour de la présidentielle, ndlr), à droite, à gauche, et ailleurs il y aura un nouveau rapport de force et il y aura une situation politique qui aura évolué."
Interrogé à notre micro le 2 février, Jean-Jacques Ferrara nous confirmait qu'il serait candidat à sa propre succession en juin prochain. Néanmoins, le député restait évasif sur l'étiquette de celle-ci : Les Républicains ou Horizons ? "Je ne peux parler qu'en mon nom, le reste ne m'appartient pas, avait répondu le président de la fédération LR de Corse-du-Sud avant d'ajouter : en revanche, soyez convaincus de la force de mon engagement."
De son côté, Valérie Bozzi "ne croit pas du tout" que cette situation puisse créer un déséquilibre à droite. "Au contraire, reprend l’élue insulaire, il faut qu’il y ait un discours de fond sur les idées de la droite et du centre. Pour moi, les droites irréconciliables n’existent pas. Il faut qu’on soit tous au tour d’une table pour trouver les points communs pour qu’ils nous unissent plutôt qu’ils nous divisent. C’est ce qu’a fait Laurent Marcangeli lors des dernières territoriales en nous mettant tous sur une liste unique. Ça a bien fonctionné, et ça fonctionne actuellement à l’Assemblée de Corse."
On ne sait si l'édile de Grosseto-Prugna serait prête à s’engager dans cette démarche portée par Edouard Philippe qui souhaite "remettre les maires au centre du débat public et politique national". Xavier Lacombe, lui, semble avoir fait son choix : "Si je pourrais m’engager davantage à ses côtés ? Bien sûr ! Je pense que je le ferai, confie le maire de Peri. Vous connaissez mon appartenance politique et ma famille, je suis d’une droite sociale et donc, aujourd’hui, celui qui incarne le mieux mon courant de pensée est l’ex-Premier ministre Edouard Philippe. Sa conception et sa vision des choses au niveau national et insulaire me semble la plus lucide."
À l’heure où la campagne présidentielle démarre, "et où les premiers "coups" ont déjà commencé à tomber de part et d’autre", dixit Laurent Marcangeli, la création de ce parti pourrait rebattre quelque peu les cartes de la droite insulaire. "Pas impossible, glisse sotto voce un sympathisant présent ce mercredi au Palais des congrès. Surtout après le début de campagne timide de Valérie Pécresse (candidate Les Républicains à la présidentielle, ndlr) et son meeting de dimanche dernier qui n'a pas convaincu tout le monde."