Dans un communiqué, le Cullittivu Massimu Susini fait part de son inquiétude quant à la privatisation complète de la gestion et du transport des déchets dans l'île, "au moment où on débat des dérives mafieuses". Pour l'association anti-mafia, le plan régional que "l'Exécutif s’apprête à soumettre aux conseillers territoriaux et à l’enquête publique renforce la mainmise du privé sur le marché des déchets".
À deux jours de la session de l'Assemblée de Corse lors de laquelle un rapport concernant "l'avancement de la procédure d'approbation du plan territorial de prévention et de gestion des déchets" figure à l'ordre du jour, le Cullitivu Massimu Susini s'inquiète du "danger que représente la privatisation complète du transport et du traitement des déchets en Corse."
Dans son texte, l'association anti-mafia revient sur le rapport voté le 26 février dernier dans l'hémicycle en faveur d'une "gestion publique des structures de traitement des déchets".
"Cette gestion publique a toujours été présentée par l'actuelle majorité comme la pierre d'angle de sa politique : les Corses ont voté aussi pour qu'elle soit mise en œuvre, souligne le Cullittivu. Pourtant, le projet de Plan que l’Exécutif s’apprête à soumettre aux conseillers territoriaux et à l’enquête publique trahit totalement ce principe en renforçant la mainmise du privé sur le marché des déchets."
Centre de surtri envisagés à Monte et à Sarrola-Carcopino
Ainsi, déplore le collectif, le Syvadec, "qui en a pris la direction a, avant même le vote du plan, déjà mis en oeuvre le marché global de performance pour la création d'un centre de tri à Monte avec usine de fabrication des combustibles solides de récupération (CSR) et soutenu celui de la CAPA."
Or, "c'est un fait acquis, le choix d’un traitement industriel (tri-incinération-enfouissement) et centralisé est le plus cher et le plus nocif pour l’environnement et la santé des Corses", souligne le communiqué. Dans ce cadre, la privatisation de ce secteur est "inquiétante, au moment où l'on débat des "dérives mafieuses"".
Pour le collectif anti-mafia, les problématiques qui seraient engendrées par une pareille privatisation sont multiples. En premier lieu, la question des dépenses pour les divers investissements et l'exploitation des sites. Ni la Collectivité de Corse, ni les ECPI n'ont idée des montants "sur lesquels ils engagent les Corses pour plusieurs décennies", estime le collectif, "puisque les groupes privés qui soumissionnent proposent eux-mêmes les investissements à réaliser et le niveau d'exploitation qui seront payés par tous les Corses".
Des élus qui n'auraient pas non plus idée, selon le Cullittivu, ni de l'impact des "résidus hautement toxiques produits par l'incinération des CSR" sur l'environnement, les transports, et la santé, faute à l'opacité dans la gestion du dossier, ni de ce qui "se cache derrière le terme de chaudière CSR", dont ils ne connaîtraient, accuse le communiqué, ni leur fonctionnement ni leur production finale - à savoir de l'électricité, mais également "des fumées toxiques et des mâchefers qui finiront en centre d'enfouissement" -.
Enfin, la Collectivité et les ECPI ignoreraient également jusqu'au lieu d'implantation du ou des incinérateurs, peste le collectif.
"Le Syvadec décide, l'Exécutif s'incline"
Pour le Cullitivu Massimu Susini le constat est clair : dans ce contexte, "le Syvadec décide, l'Exécutif s'incline".
"Le choix conscient de la majorité à l’Assemblée de Corse pour favoriser la privatisation complète du traitement des déchets, pose le problème du reniement des engagements dont elle sera comptable. Et surtout, cela acte la rupture déjà largement consommée du pacte de respect des intérêts communs des Corses au profit d’intérêts privés qui sont le Cheval de Troie de l’infiltration mafieuse", regrette le communiqué.
Qui prend pour preuve les incendies criminels survenus à l'encontre de camions de transport des déchets entre 2015 et 2021 (16 en tout est-il indiqué), ceux ayant visé des entreprises de traitement de déchets depuis 2017 (5 en tout, est-il comptabilisé), et surtout les "assassinats en lien direct avec cette économie".
Un contexte criminel "mortifère incontestable", dans lequel accepter "à l'aveugle" ces privatisations relève, pour le collectif, "au mieux de l'irresponsabilité, au pire d'un consentement complice".
Face à ce qu'il estime comme un triple risque imminent, c'est-à-dire les dégradations des conditions naturelles de vie des Corses dues à la pollution, de leurs conditions économiques dues à une hausse des taxes, et de leurs conditions démocratiques dues à une infiltration mafieuse, le Cullittivu Massimu Susini annonce ne pas compter baisser les bras.
Il appelle désormais ses partenaires associatifs comme la population à s'unir à ses membres pour "initier un travail d'information à destination des Corses et des actions juridiques étayées par une argumentation solide, afin de [nous] opposer à cette main basse sur les intérêts collectifs vitaux".