Bonifacio : une brèche découverte dans la coque du Rhodanus pourrait compliquer le déséchouement

Dimanche à 3 heures du matin, le cargo Rhodanus, un bateau d'environ 90 mètres de long s'est échoué sur la plage de Cala Longa à Bonifacio. Son déséchouement ne peut être mené sans avoir allégé le navire. Une à deux brèches découvertes sur la coque pourraient rendre l'opération difficile.
 

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Il était 3 heures du matin dans la nuit de samedi à dimanche lorsque le navire Rhodanus s'est dirigé vers les Bouches de Bonifacio, avant de s'échouer au niveau du lieudit Cala Longa, avec sept personnes à bord. Le commandant de bord du navire, ainsi que le chef de quart, ont été convoqués le 7 février au tribunal maritime de Marseille.
Après de nombreuses heures d'analyses et d'évaluations, la préfecture maritime de Méditerranée a indiqué lundi dans un communiqué que le cargo, transportant 2.650 tonnes de bobines d'acier, était trop lourd pour être déséchoué.

 Il faudra donc l'alléger pour débuter les manoeuvres. La prioririté est d'en extraire les 38 tonnes de carburant pour éviter tout risque de pollution. Pour l'heure, aucune pollution n'a été constatée dans cette zone extrêmement sensible de la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio.

De nouvelles expertises doivent avoir lieu pour savoir comment déséchouer le navire. "Une à deux brèches sur le pic avant" du navire ont été détectées, dont une a "été obturée", a aussi précisé lundi lundi le préfet maritime de la Méditerranée Laurent Isnard, assurant que les équipes sur place étaient "en mesure d'évacuer l'eau qu'il y a à l'intérieur".

 

Un "défaut de veille a été déterminant" dans la survenue de l'échouement du cargo Rhodanus dans la réserve naturelle de Bonifacio, a indiqué le ministère de la Transition écologique, qui a saisi le Bureau enquête accident maritime (BEA-mer).


Selon les premières conclusions transmises par les plongeurs au préfet maritime de la Méditerranée, l’avant du bateau est posé sur le fond. Ce qui rend les opérations pour le déloger très compliquées. L’enjeu est important, car il faut éviter d’endommager la coque. Un risque : que la voie d’eau déjà présente s’aggrave, libère du carburant et pollue la zone. 
 


L’intervention devra néanmoins intervenir rapidement, car la météo risque de changer dès la semaine prochaine. 
  

Appels répétés pendant 50 minutes


Dimanche, la Préfecture maritime de Méditerranée a indiqué dans un communiqué que "le navire devait embouquer les Bouches de Bonifacio mais n'a pas viré à temps et poursuivi sa route vers la côte en dépit des appels répétés du Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de sauvetage (Cross) en Corse, du sémaphore de Pertusato et la station italienne Maddalena pendant près de 50 minutes."
 
Des moyens de dépollution ont aussitôt été dépêchés sur place, par mesure de précaution. 
Le ministère de la transition écologique a confirmé le "prépositionnement" du remorqueur Abeille Flandre en Corse "dès l'annonce d'une tempête d'une force égale ou supérieure à force 7".  Ce navire "se trouvera, sur l'année, plus souvent sur les côtes corses que sur les côtes continentales".


Le Cross Med coordonne les opérations sous l'égide de la Préfecture maritime de Méditerranée. La situation est suivie en coordination avec les autorités italiennes et les autorités terrestres.
 
La Préfecture maritime a mis en demeure le navire et a émis un arrêté interdisant la navigation et toutes activités nautiques dans un rayon de 1000 yards (mètres) autour du cargo. Un arrêté interpréfectoral (préfecture maritime et préfecture de Corse-du-Sud) a également été pris afin de définir une zone d'interdiction temporaire de survol afin d'assurer la sécurité des équipes sur place. 

Une enquête a été ouverte sous l'égide du procureur de la République de Marseille. Les enquêteurs ont interrogé les sept membres d'équipage toujours présents à bord du Rhodanus lundi matin. 

 
 

"Le navire se trouve en plein milieu des archipels de la réserve naturelle des bouches de Bonifacio dans une zone de protection renforcée très sensible du point de vue environnemental", a souligné le directeur de la réserve, Jean-Michel Culioli qui se trouvait sur place. 

Il n'aurait jamais dû se trouver là. Jean-Michel Culioli  

"Il n'aurait jamais dû se trouver là. Nous restons très vigilants", a insisté le responsable de la plus grande réserve naturelle de France métropolitaine. 

Le navire Rhodanus, construit en 1998, navigue actuellement sous le pavillon de Antigua & Barbuda. D'après le site Vessel finder, qui suit les navires en temps réel, le cargo venait de Tarente, dans la région des Pouilles en Italie et se dirigeait vers Port-Saint-Louis-du-Rhône, près de Marseille.
 

► Entretien avec Jean-Michel Culioli, responsable de la réserve naturelle de Bonifacio :


Déjà en 2010

Comme le rappelle Corse-Matin, ce cargo avait déjà rencontré des difficultés à Porto-Vechio en 2010. Alors qu'il se dirigeait à vive allure, par mer forte, vers les îlots de Budelli et Razzoli. Les garde-côtes sardes avaient tenté d'alerter le commandement mais le pilote s'était endormi. Le pire avait été évité par un changement de cap à 500 mètres avant l'impact annoncé.
 

Les Bouches de Bonifacio trop fréquentées ? 


Cet accident pose une nouvelle fois la question du passage de navires dans les Bouches de Bonifacio. Chaque année, environ 3.000 bateaux empruntent le détroit large de 11 kilomètres entre la Corse et la Sardaigne. Le bras de mer est connu pour la dangerosité de ses courants. 

Le passage est interdit aux embarcations battant pavillon français ou italien contenant des produits polluants. 
 

En 25 ans, deux accidents majeurs se sont produits dans cette zone. Le premier en 1994, le Monte Stello finit sa course dans les rochers. Le bateau compte 77 personnes à bord, aucune n’est blessée. 

Le second se produit deux ans plus tard, en 1996, le céréalier Fenes sombre au large des îles Lavezzi. Il est chargé de plus de 2.700 tonnes de blé. 
 

Sécurité insuffisante ? 


Pour le syndicat CGT des Marins du Grand Ouest, l'échouage du cargo est symbolique de "déchirures dans le filet de sécurité". Dans un communiqué datant du 14 octobre, le syndicat estime que plutôt que de s'attarder sur les risques potentiels de pollution maritime suite à l'accident du Rhodanus, il faut avant tout renforcer les contrôles des autorités civiles et militaires, ainsi que les moyens de sauvetage, jugés insuffisants. 

La CGT des Marins appelle ainsi les élus corses a donner "des réponses sur les moyens existants" précisant qu'il s'agit, selon eux, de "sécurité, de sûreté du territoire". Le syndicat rappelle également demander "depuis des années un remorqueur de haute Mer basé en Corse sous l’autorité du Préfet Maritime".
 

Communiqué CGT des Marins du Grand Ouest

 

Réactions politiques

Jean-Charles Orsucci, maire de Bonifacio aimerait que l'incident permette de renforcer la sécurité dans les Bouches de Bonifacio et le canal de Corse.
Jean-Guy Talamoni, Président de l'Assemblée de Corse préconise une série de mesures contre les risques de pollution sur les côtes corses :
Pour Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse, l'objectif immédiat est d'éviter toute pollution sur le site.
Le mouvement indépendantiste Core in Fronte a immédiatement réagi sur Twitter : "Au plan environnemental, cet énième accident doit nous interpeller sur les dangers suscités par l'intense trafic maritime autour de la Corse."  Le nationaliste Pierre Poggioli a pour sa part regretté : 
Les Bouches de Bonifacio s'étendent sur 80.000 hectares. En 2011, le détroit a été reconnu par l'organisation maritime internationale comme zone maritime particulièrement vulnérable. 



 
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