Violences conjugales en Corse : "Combien de femmes ne se sont pas signalées, et combien ne sont pas encore détectées ?"

1 victime pour 1.000 habitants. Un chiffre qui fait de la Corse une des régions les moins touchées par les violences conjugales selon un rapport du ministère de l'Intérieur publié lundi. Un chiffre "qui ne représente pas la réalité du terrain", voire "préjudiciable", pour certaines associations. 

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Une hausse de 16 % des violences conjugales en France en 2019 sauf en Corse. Lundi, le service statistiques du ministère de l'Intérieur a publié un rapport se basant sur les plaintes enregistrées dans les services de police et de gendarmerie sur l'ensemble du territoire national. 

142.310 personnes, tous sexes confondus, ont été victimes de violences conjugales l'année dernière. 88 % d'entre elles sont des femmes, soit 125.840. Une proportion stable par rapport à 2018, selon ces chiffres du ministère, qui ne comptabilisent pas les homicides.

En Corse, les forces de sécurité y ont enregistré une victime pour 1.000 habitants. Un chiffre stable comparé à 2018 et qui classe les deux départements de l'île parmi les moins touchés par les violences conjugales. 

"Ça ne veut rien dire"

Francine Grilli, directrice du centre d'information sur le droit des femmes et des familles (Cidff) de Haute-Corse, est lasse. "Ça ne veut rien dire et ça ne représente pas la réalité du terrain", lance-t-elle. 

Combien de femmes ne se sont pas signalées, et combien ne sont pas encore détectées.

Laetitia Maroccu, présidente de l'association d'entraide féminine Donne e Surelle

Car une part importante des femmes victimes de violences prises en charge au Cidff "ne sont pas prêtes à se rendre dans une gendarmerie et à porter plainte." Une idée partagée par Laetitia Maroccu, présidente de l'association d'entraide féminine Donne e Surelle. "Il y a des chiffres, à tempérer et à manier avec précaution. Combien de femmes ne se sont pas signalées, et combien ne sont pas encore détectées", s'interroge-t-elle. 

Sans oublier les victimes qui préfèrent quitter leur conjoint ou divorcer sans jamais franchir la porte d'un commissariat ou d'une gendarmerie. 

Une augmentation des situations en Haute-Corse

Chiffres à l'appui, Francine Grilli parle "d'une augmentation des situations." Ainsi, en 2019, le Cidff de Haute-Corse a accompagné 59 femmes victimes de violences conjugales sur le long terme (48 nouvelles situations et 11 dossiers ouverts l'année précédente), elles étaient 54 en 2018 (45 nouvelles situations et 9 dossiers ouverts l'année précédente) et 46 en 2017 (36 nouvelles situations et 10 dossiers ouverts l'année précédente). "On ne peut pas dire qu'il y a une augmentation significative, mais cela montre que nous avons un travail régulier à mener. Les chiffres publiés dans ce document peuvent être préjudiciables, ce n'est pas notre réalité", commente-t-elle. 

Deux féminicides en deux ans 

Pour certaines des associations contactées, le rapport du ministère de l'Intérieur est d'autant plus contestable qu'il ne prend pas en compte les féminicides. 

La Corse en a enregistré deux entre 2019 et 2020. L'année dernière, Julie Douib, trentenaire mère de deux enfants, a été assassinée par arme à feu par son ex-compagnon à L'Île-Rousse. 

Le 30 octobre dernier, une femme a été tuée par balles à Valle-d'Alesani. Une information judiciaire a été ouverte par le parquet de Bastia du chef d'homicide volontaire par concubin.

Continuer à libérer la parole 

Si le mouvement Iwascorsica a permis de libérer la parole, les dépôts de plainte n'ont pas forcément suivi. Laetitia Maroccu, dont l'association s'est associée au mouvement, n'en démord pas, pour faciliter l'acte, une communication accrue sur les réseaux sociaux est indispensable. 

"Nous sommes beaucoup contactés par messages privés sur Facebook et Twitter les femmes sont rassurées, car cela leur permet un certain anonymat dans leur première démarche. Nous avons aussi un numéro disponible 24h/24 par SMS : 06.44.2509.32.", explique-t-elle.
Les victimes de violences peuvent également appeler le numéro vert régional : 0.800.400.235. Pour celles ne pouvant téléphoner, il est possible de faire un signalement sur le site arretonslesviolences.gouv.fr. Une fois le code postal renseigné, la personne est directement mise en lien avec la gendarmerie la plus proche de son domicile.


 
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