Alors que la France et l'Italie se renvoient la responsabilité d'accueillir l'Ocean Viking, le président de l'Exécutif de Corse a fait savoir que le navire de l'ONG SOS Méditerranée pouvait trouver refuge en Corse, temporairement.
18 jours que le bateau Ocean Viking erre dans les eaux méditerranéennes, à la recherche d'un port d'accueil. Après Malte, puis l'Italie, qui ont refusé leur aide, c'est vers la France que s'est tournée l'organisation non gouvernementale SOS Méditerranée, sans plus de succès.
Paris estime que c'est à son voisin transalpin de "respecter ses engagements européens". Même si Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, a fait savoir ce matin qu'il n'était pas question de laisser le bateau "courir le moindre risque". "Le ministre de l'Intérieur suit notamment la situation minute par minute", a-t-il précisé.
234 migrants en mer
Ce mercredi 9 novembre, en fin de journée, l'Ocean Viking et ses 234 migrants venus de Lybie naviguaient dans les eaux internationales entre la Sicile et la Sardaigne, sans savoir où trouver refuge.
Hier soir, Gilles Simeoni a offert l'aide de la Corse, à travers les réseaux sociaux, alors que le navire pourrait arriver près des côtes de l'île ce jeudi matin.
Ce mercredi, le président du Conseil exécutif s'est exprimé à notre micro : "on a même pas à justifier ou à expliquer cet accueil, a-t-il déclaré. C'est dans notre culture. Traditionnellement, le peuple corse a toujours ouvert sa porte à celles et ceux qui sont dans la difficulté. Au-delà de notre corsitude et de notre culture, je pense que c'est un devoir d'humanité, tout simplement."
Présidente de l'Assemblée de Corse, Marie-Antoinette Maupertuis va dans le même sens : "Fidèle à sa tradition d'accueil, et pour éviter un drame, la Corse est prête à mettre à disposition un de ses ports et à apporter son aide humanitaire d'urgence aux 234 passagers".
Quant à savoir si la Corse dispose des capacités logistiques et matérielles pour accueillir ces migrants, Gilles Simeoni répond :
"La proposition qui est faite au titre de l'urgence est d'offrir un port sûr, à titre transitoire, à des gens qui sont en situation de danger, de détresse, et peut-être même au risque de leur vie. Il est évident que nous n'avons pas les moyens logistiques pour accueillir durablement 240 personnes. L'idée est donc d'offrir un port sûr, par exemple celui de Bastia, pour que les premiers soins et les premières aides puissent être prodigués afin que ces gens puissent repartir, conformément à ce qu'est la réglementation européenne en la matière, pour être accueillis et répartis dans différents pays et états-membres de l'Union Européenne."
Soutien de la LDH
Dans un communiqué, la section corse de la Ligue des droits de l'homme "soutient cette initiative" tout en "renouvelant sa solidarité avec SOS Méditerranée" :
"Nous connaissons trop ce sinistre scénario qui se répète et s'aggrave depuis des années. [...] Et les états européens n'organisent toujours pas d'accueil digne, refusant d'accéder à ce geste élémentaire d'humanité. Pire, à présent les naufragés et les associations de secours subissent l'idéologie d'extrême-droite du gouvernement Meloni et sa politique inhumaine. Nous l'avons constaté ces derniers jours, les autorités italiennes retardent la possibilité pour les navires humanitaires d'accoster, laissant les rescapés bloqués en mer pendant des jours et lorsqu'elles autorisent leur entrée, seule une partie des rescapés sont autorisés à débarquer de façon discriminatoire."
Et la LDH Corsica d'ajouter que "la France se doit de répondre à ses obligations internationales en permettant l'accueil aujourd'hui de ces 234 personnes en détresse, à moins de renoncer au principe de fraternité".
Un cas similaire en 2018
Ce n'est pas la première fois que cette problématique se pose en Corse. Un cas similaire s'était présenté en juin 2018, avec le navire Aquarius, et ses 629 migrants et migrantes. Le gouvernement Salvini avait alors interdit l'entrée du navire qui appartenait à la même ONG, SOS Méditerranée, dans l'un des ports italiens. Et la France avait également opposé une fin de non-recevoir. Le navire avait été contraint de rejoindre le lointain port espagnol de Valence qui avait offert son aide, et Gilles Simeoni, déjà, ainsi que Jean-Guy Talamoni, alors président de l'Assemblée de Corse, avaient proposé de l'accueillir.
Il y a quatre ans, l'exécutif insulaire avait rappelé que la Collectivité de Corse était "propriétaire des ports", Et que donc, elle était dans son bon droit, même si sa décision allait contre la position du gouvernement, et qu'elle soulevait de toute évidence un problème de compétences.
Contactée ce mercredi en fin d'après-midi, la préfecture de Corse n'a pas souhaité s'exprimer sur un éventuel accueil de l'Ocean Viking dans un port de l'île, indiquant que "la réponse émanerait du Gouvernement".
Retrouvez le reportage de nos équipes réalisé ce mercredi :
Intervenants - Gilles Simeoni (Président Conseil exécutif) - Fabienne Lassalle (Directrice ONG SOS Méditerranée) - Olivier Véran (porte-parole du gouvernement)
Équipe journalistes - J.-Ph. Mattei - F. Rombaldi - D. Lameta