Interpellé par le député de la majorité Gilles Le Gendre, le ministre de l'Intérieur a réaffirmé la volonté du gouvernement de voir la singularité de la Corse dans la République reconnue, et appelé à ce que l'Assemblée nationale se saisisse, avant l'examen du projet de réforme constitutionnelle, de la question.
La singularité de la Corse dans la République doit-elle être reconnue ? Le 11 mars dernier, le ministre de l'Intérieur et une délégation insulaire s'accordaient sur une copie commune en vue du projet de réforme constitutionnelle vers une autonomie de la Corse. Un mois et demi plus tard, et à la veille de l'ouverture du débat parlementaire, Gérald Darmanin l'a réaffirmé : pour le gouvernement, la réponse à cette question reste positive.
Le ministre était interpellé par le député Renaissance Gilles Le Gendre, ce mardi 30 avril, qui lui a posé trois questions : "En quoi la réussite de ce projet est-elle cruciale, non seulement pour lever les obstacles au développement, et instaurer définitivement la paix civile sur l'île, mais aussi pour conforter l'unité de notre République dont l'île est et demeurera partie intégrante ?".
La seconde : "Quel chemin parlementaire le gouvernement a-t-il prévu pour l'adoption de ces deux textes : ensemble ou séparément, et selon quel calendrier ?".
Et enfin : "Il est prévu que les citoyens corses se prononcent sur les termes de cet accord. À quel moment et sous quelle forme interviendra cette consultation ?"
Un processus historique "qui nous oblige"
Le ministre de l'Intérieur a commencé par rappeler les relations "particulières, passionnées, parfois tumultueuses, mais toujours respectées" que la Corse entretient avec la République. "Je veux ici souligner, évidemment, le fait que les Corses sont des grands Français. Ils l'ont montré dans l'Histoire, ils le montrent dans le présent et ils le montreront demain. Cette île magnifique, qui est le porte-avions de la France en Méditerranée, et l'entrée de la Méditerranée dans la France, doit être respectée dans sa singularité."
Cette île magnifique [...] doit être respectée dans sa singularité.
Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur
Tout en félicitant "l'implication" du député Le Gendre dans le "dossier corse", tout comme celle du président du groupe Horizons Laurent Marcangeli, et plus globalement celle de tous les élus corses, Gérald Darmanin a tenu à saluer le "processus historique" lancé à la suite "du drame, de l'assassinat d'Yvan Colonna est des violences très importantes qu'il y a eu sur l'île".
Un processus historique "qui nous oblige, puisque nous avons, comme vous l'avez dit, trouvé un large consensus, qui n'est pas un consensus intégral, parmi les forces politiques de l'île. Mais aussi à l'Assemblée territoriale, où je crois, une très grande partie des dispositions novatrices, historiques, constitutionnelles pour la plupart d'entre elles, ont été acceptées."
"Le président de la République avait émis deux lignes : la Corse dans la République, et pas deux catégories de citoyens. Nous allons engager la réforme constitutionnelle, il y a une mission d'information qui se crée au Sénat", a continué le ministre de l'Intérieur. Dans ce cadre, ce dernier a estimé que l'Assemblée nationale devrait à son tour "se saisir de ce sujet, pour que la maturité puisse exister pour des votes de lois organiques et lois constitutionnelles."
Quant au calendrier envisagé, sans donner de dates précises, le ministre a précisé que la prochaine étape serait celle du vote de la loi constitutionnelle, qui interviendra "je l'espère, le plus rapidement possible, lorsque le président de la République le décidera avec les présidents des Assemblées."
Des propos "très clairs et porteurs d'espoirs"
Présent lors de cette séance de questions au gouvernement, le député de la seconde circonscription de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva, relève un échange d'autant plus positif "que la question émane du groupe Renaissance, avec une volonté d'avancer, ce qui démontre le souhait, du côté de la majorité présidentielle, de poursuivre, de se soucier des accords qui ont été passés, et de la nécessité de les traduire".
Si la réponse de Gérald Darmanin n'apporte dans les faits rien de nouveau par rapport à ce qui avait déjà été annoncé par le ministre, "cela permet au moins de dire que nous sommes toujours sur le même fil, c’est-à-dire que nous attendons l'inscription au calendrier du débat parlementaire, que cela ne saurait tarder, et que les modalités seront bientôt précisées également."
La démonstration du souhait de la majorité présidentielle de poursuivre, de se soucier des accords qui ont été passés, et de la nécessité de les traduire.
Jean-Félix Acquaviva, député de Haute-Corse
Sur X - anciennement Twitter - le maire de Bonifacio, Jean-Charles Orsucci, a également réagi. "Le député Gilles Le Gendre est un pilier du groupe parlementaire Renaissance qu'il a un temps présidé. Son soutien très clair aux discussions institutionnelles sur la Corse, comme le rappel de l'engagement de Gérald Darmanin dans le droit fil du discours du président de la République, sont très importants à la veille du débat parlementaire."
"Je me félicite de ces propos très clairs et porteurs d'espoirs pour notre île", conclut-il.
Remobiliser le Parlement
Le choix de Gilles Legendre, député Renaissance et donc membre de la majorité présidentielle, d'interpeller le gouvernement, par le biais du ministre de l'Interieur, sur ces questions, était-il une façon de remobiliser le Parlement, et notamment l'Assemblée nationale, à quelques semaines du vote attendu pour une possible autonomie de la Corse ?
Alors que le rendez-vous pourrait être donné après l'été au Sénat puis à l'Assemblée nationale, en coulisses, les tractations entre élus corses et parlementaires ne faiblissent pas.
"Il y a déjà des alliés à l'Assemblée nationale et au Sénat qui sont convaincus qu'il faut une autonomie législative pour la Corse, indique Jean-Félix Acquaviva. Et puis il y a d'autres personnes qui restent culturellement très ancrées dans le jacobinisme et le centralisme." Mais le député en est convaincu : "Parmi celles-là, il y a encore des marges pour les convaincre du rendez-vous historique qui se pose".
Réponse dans les prochains mois.