Depuis le 6 février et jusqu’au 6 mars, un tronçon de la route de Calvi, entre Partinello et Serriera, est fermé une bonne partie de la journée, pour travaux. Coupés du monde de 9 heures à 16 heures en semaine, les habitants s’organisent et s’entraident.
"Je peux passer ?", lance le motard au visage rougi par le froid, l'air un peu confus. Il est 9 heures 02 ce mercredi 15 février, à la sortie du village de Partinello. Et depuis deux minutes, la route est, normalement, fermée pour travaux. "Allez, passez…", cède le chef de chantier, balayant l’air du revers de sa main droite.
'Les gens du coin sont au courant, en général", poursuit Benjamin Pelletier. Il faut dire que les travaux de sécurisation d’une falaise rocheuse sur la D81 ont un impact direct sur leur quotidien. Du lundi au vendredi, de 9 heures à 16 heures, la circulation est totalement coupée entre Partinello et Serriera.
Les habitants ne peuvent donc pas rejoindre Porto, Piana ou encore Ajaccio dans cette plage horaire. Et ce, durant un mois. En dehors de ces heures et le week-end, la circulation est possible, mais de manière alternée.
Dès le début de la matinée, le travail de l’entreprise commence. Equipés de harnais, les techniciens, suspendus aux parois de la falaise, décrochent les rochers les plus menaçants, à l’aide de tire-forts. Lorsque les lourdes pierres dévalent la pente, le bruit est assourdissant. Un spectacle qui a de quoi impressionner. "C’est beau de les voir travailler, c’est du travail d’artiste", commente le maire de Partinello Christian Cardi.
Si beau, que Jean-Toussaint, retraité, fait régulièrement l’aller-retour entre la portion en travaux et le village, où il réside. Une bonne vingtaine de minutes à pied. "Ici, il n’y a pas grand-chose à faire, alors je viens voir", confie-t-il.
L’homme a adapté son emploi du temps à la fermeture de la route. "Il faut s’y habituer. Désormais, on ne fait plus les courses qu’une fois par semaine ou alors à Calvi", indique-t-il. "Du moment qu’on a la possibilité de partir avant 8 heures et de rentrer ensuite le soir, c’est déjà bien", souligne pour sa part Jean, un autre habitant du village.
Une question d'organisation
Pour ceux qui ont impérativement besoin de traverser la RD81 dans les horaires concernés par la fermeture, la débrouille est de mise. "Les gens se sont organisés, comme moi, glisse le maire. On vient avec une première voiture jusqu’à la portion coupée, on traverse à pied sous le contrôle du chef de chantier, et on récupère une autre voiture garée de l’autre côté de la calanque." Organisation astucieuse, mais qui suppose d’avoir deux véhicules à disposition.
Transports scolaires, livraison du pain, passage de l’infirmière, tout a été prévu. "Pour les pompiers, par exemple, un nouveau système a été mis en place : comme ceux de Piana ne peuvent pas passer, ce sont les pompiers de Galeria qui prennent le relais. Et en cas d’urgence, c’est l’hélicoptère", illustre le maire.
Les secours, un point capital dans ce village d’une cinquantaine habitants, majoritairement retraités. "On a essayé de couvrir toutes les situations possibles, maintenant c’est sûr que ça embête les gens mais pour un mois, on s’arrange", souligne Christian Cardi.
"On n’est plus à ça près"
Pour certains habitants, comme Vannina, la fermeture de la route est loin d’être un problème. La jeune femme tient le bar du village, seul commerce ouvert à l’année. C’est à pied et en une poignée de minutes qu’elle rejoint donc son lieu de travail. "On n’a rien ici donc on n’est plus à ça près, sourit-elle. Ça ne change rien à ma vie"
Mère d’une petite fille de quinze mois, Vannina reste philosophe face aux aléas d’un quotidien éloigné de la ville. "L’année dernière, on nous a fermé la route entre Porto et Piana. Cet été, après la tempête, on est resté deux jours sans courant… Ce sont les joies de la vie de village", commente-t-elle.
Entraide
En revanche, pour d’autres, l’organisation est plus délicate. "Mon père travaille à Porto, il finit à 13 heures et donc il ne peut pas rentrer avant 16 heures", indique Vannina. Jeannine, la belle-mère de la jeune femme, qui met en avant "l’entraide" au sein du village, espère tout de même "que ça ne durera pas trop longtemps".
Après cette période de fermeture d’un mois, l’entreprise devrait attaquer une deuxième phase, de protection cette fois-ci, grâce à la pose d’un grillage et d’une barrière dynamique. Une circulation alternée sera alors mise en place… avant une nouvelle fermeture de la route, en novembre. La petite portion de 160 mètres n’en a pas fini de perturber le quotidien des habitants.