Depuis la mi-mars, les Restos du Cœur ont démarré leur campagne d’été. À Ajaccio, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 30 % par rapport à l’an dernier, à la même période. Trois d’entre eux témoignent.
Les silhouettes se pressent à l’intérieur du grand bâtiment gris pour échapper à la pluie. Il n’est pas encore dix heures, et déjà, c’est l’effervescence dans les locaux des Restos du Cœur, dans le quartier des Cannes. Comme chaque mardi, près de 3 000 repas seront distribués.
Dans les allées, des femmes surtout, quelques enfants, des personnes plus âgées. Tous ont moins de 700 euros de reste à vivre par mois. C’est la condition pour pouvoir bénéficier de l’aide alimentaire des Restos. Sur le seul site d’Ajaccio, les bénévoles ont constaté une augmentation de près de 30% du nombre de bénéficiaires par rapport à l’an dernier, à la même période.
"On peut plus faire les courses"
Angela, doudoune noire et chevelure foncée rassemblée en catogan, est l’une de ces bénéficiaires. Elle a 35 ans et deux petits garçons, de neuf et dix ans. La jeune femme a poussé la porte du local des Restos pour la première fois il y a deux ans.
Depuis, elle vient chaque semaine. "On ne peut plus faire les courses, ce n'est plus possible. C'est hyper cher, les prix dans les grandes surfaces. Et avec l'inflation cette année, c'est de pire en pire", soupire-t-elle.
Alors pour Angela, les Restos sont une bouffée d’oxygène dans son quotidien. "C'est chaleureux ici, il y a plein de produits, et on peut cuisiner varié, c'est ce qui est bien", indique-t-elle.
Devant le stand de distribution des boîtes de conserve, Mélanie, elle aussi, fait le plein de denrées alimentaires pour sa famille nombreuse. Elle a quatre enfants, et ne travaille pas. Son conjoint, lui, touche l’allocation aux adultes handicapés (AAH). "Les fins de mois sont très difficiles, avoue la jeune femme de 36 ans. Enfin, les fins de mois… Elles sont en début de mois…"
Enfant, Mélanie venait déjà aux Restos avec sa mère. "Malheureusement, on se retrouve encore là", confie-t-elle, emmitouflée dans son sweat noir. "Tout a augmenté. On galère, on ne vit plus, on survit et encore, survivre, c'est même plus le mot", se désole-t-elle.
Dans son panier, des paquets de gâteaux, du sucre, des yaourts. De la viande aussi. "Ça fait des économies, c'est des trucs qu'on n'achète pas, quoi", commente la jeune femme.
Un peu plus loin, un couple de personnes plus âgées. Antoinette a 77 ans, et des cheveux gris au carré, impeccablement peignés. Elle tenait un petit commerce avec son mari. "Ma retraite est inférieure au minimum retraite", livre-t-elle, derrière son masque anti-Covid et ses lunettes rose pâle.
"Ça nous aide beaucoup"
C’est en entendant parler des Restos "à la télé" qu’elle s’est décidée à se rendre dans les locaux de l’association. "Ça fait deux mois que je viens. Tout a augmenté, je n'arrive plus à boucler les fins de mois, poursuit-elle. Alors ça ne permet pas de tenir tout le mois mais quand même, ça nous aide beaucoup."
"Et puis tout le monde est très agréable, c'est convivial", reprend-elle. Parce que, comme dans la chanson des "Enfoirés", c’est aussi un peu de chaleur qu’Antoinette et les autres sont venus chercher ici, comme tous les mardis.