Augmentation de la production de déchets, valorisation insuffisante, hausse du coût de traitement, perspectives floues… Dans un rapport d'observations définitives, du mois de mars 2022, la chambre régionale des comptes pointe du doigt des dysfonctionnements au sein du Syvadec depuis 2014, sans pour autant accabler la structure.
C'est une des problématiques les plus emblématiques de l'île : les déchets et leur gestion. Dans un rapport d'observations définitives, la chambre régionale des comptes dresse le bilan du fonctionnement du Syvadec (syndicat de valorisation de la Corse) depuis 2014.
Créée en 2007, la structure est chargée du traitement et de la valorisation des déchets ménagers et assimilés ainsi que de la mise en place d'actions et de prévention à l'échelle de l'île. Depuis 2015, et l'élargissement de son périmètre, le Syvadec couvre 93 % de la population (323 communes sur les 360 que compte l'île). Il emploie actuellement 116 agents et dispose d'un budget de fonctionnement de près de 46 millions d'euros.
60 % des déchets enfouis
Si en 2020 le syndicat a traité 222.385 tonnes de déchets ménagers (+18.4 % par rapport à 2015) il doit faire face à une diminution des capacités de stockage. Entre les deux dates mentionnées, cette capacité est passée de 195.000 tonnes à 128.000.
Car en Corse, quasiment tout s'enfouit. 60 % des déchets y finissent enterrés. Or, si l'île était encore dotée de quatre sites d'enfouissement en 2015, après la fermeture des centres de Tallone, en 2015, et Vico, en 2017, elle ne compte actuellement que sur ceux de Viggianello et Prunelli di Fiumorbo. Et leur capacité d'accueil, fixée à 128.000 tonnes par an, est insuffisante face au besoin annuel de l'île qui s'élève à 164.000 tonnes par an.
70 % du contenu des poubelles valorisables
La chambre régionale des comptes note néanmoins une amélioration du tri, "à laquelle l'action du Syvadec a contribué". Ainsi, les tonnages issus de la collecte sélective (emballages, papier, verre) ont progressé de 34 % sur l'ensemble de la Corse passant de 19.458 tonnes en 2017 à 26.107 tonnes en 2020. Soit une production équivalente à 84 kg par habitant sur le périmètre du syndicat. Un chiffre supérieur à la moyenne nationale établie à 82 kg par habitant.
Le taux de tri, de 40,8 % en 2020 pour l’ensemble du périmètre du syndicat, s’améliore de 17 points par rapport à 2015 (23,8 %). Le taux de tri des DMA publié par le Syvadec, 37,2 % en 2020, demeure cependant éloigné de l’objectif national fixé à 55 % à l’horizon 2025. Le taux moyen de tri communiqué par le syndicat montre les disparités entre les micro-régions insulaires. Ainsi, si certains territoires comme ceux des communautés de communes de Calvi Balagne ou d’Ile-Rousse Balagne affichent des taux de tri supérieurs, respectivement de 45,4 % et 50,5 %, d’autres membres, présentent des performances encore faibles comme la communauté de communes de Celavo-Prunelli (18,4 %) ou celle de la Pieve de l’Ornano (22,8 %).
Cependant, des efforts restent à faire. "Les ordures ménagères recèlent encore 25 % de biodéchets et 43 % de déchets valorisables, soit près de 70 % de leur contenu qui pourrait être détourné de l'enfouissement. Ce résultat témoigne des marges de progrès importantes pour réduire les quantités d'ordures résiduelles enfouies dans un contexte où une loi et un décret, prévoient et organisent l’interdiction progressive de la mise en décharge des déchets non-dangereux valorisables à compter de 2025", écrit la chambre régionale des comptes.
Un coût en constante augmentation
Le coût du service progresse depuis 2016 sous l’effet du développement du tri des déchets, dont le traitement est plus onéreux que celui des ordures ménagères résiduelles, qui bénéficient d’un mode d’élimination, l’enfouissement, jusqu’alors avantageux au plan financier comparativement aux autres modes d’élimination des déchets ultimes.
De plus, les blocages des centres d'enfouissement en 2020 et les charges exceptionnelles en découlant, "entraînent le syndicat dans un mouvement de hausses tarifaires, qui montre les limites du modèle actuel."
Ainsi, le coût complet du service pour les ordures ménagères résiduelles a progressé de 39 % entre 2016 et 2020 passant de 146 € à 203 € la tonne. Dans le même temps, la contribution des membres du syndicat, statutairement basée sur la production de ce type de déchets, est passée de 205 € à 344 € la tonne, cotisations exceptionnelles incluses.
Outre ce service, le transport coûte également cher. En 2019, le prix pour les ordures ménagères est deux fois plus élevé que la moyenne nationale, le rapport invoque le relief, mais aussi la faiblesse de la concurrence. Ainsi un marché avec un seul soumissionnaire entraîne un coût de 25 % supérieur à ce qu'il aurait été si plusieurs transporteurs avaient répondu à l'appel d'offres.
À l'horizon 2025, 125 millions d'euros sont prévus notamment pour des centres de tri dans les régions d'Ajaccio et de Bastia.