En décembre 2022, cinq chanteurs, dont quatre Corses, de l’ensemble Organum ont enregistré un morceau pour la bande originale du film Napoléon de Ridley Scott. Deux d’entre eux racontent leur expérience.
La bataille d’Austerlitz. Une charge de cavalerie. Des tirs de canon. Des hommes qui tombent. Le visage de Napoléon grave. Et pour accompagner cette scène du film américain de Ridley Scott sur la vie de l’empereur, une phrase d’un chant, Kyrie Eleison, interprétée par cinq chanteurs corses de l’ensemble Organum. Parmi eux quatre Corses : Jérôme Casalonga, Laurent Barbolosi, Claude Bellagamba et Jean-Etienne Langianni.
“C’est une messe que l’on a retrouvée dans un manuscrit des frères franciscains dans le couvent de Marcasso en Balagne. Le document rassemblait une douzaine de messes du XVIIe siècle. C’est intéressant, car c’est de l’époque de Napoléon”, explique Marcel Pérés, musicologue, compositeur et fondateur de l’ensemble Organum.
Technique gutturale
C’est un ancien élève de Marcel Pérés, désormais assistant du compositeur du film, Martin Phipps, qui suggère d’intégrer des chants corses à la bande originale. “Martin Phipps a apprécié l’idée, il a écouté un de nos albums sorti il y a 20 ans et a sélectionné ce Kyrie Eleison”, précise le musicologue et compositeur.
Une semaine plus tard, en décembre 2022, le groupe se retrouve dans un studio londonien, prêt à enregistrer. “Ça a duré une journée, Martin Phipps a fait quelques arrangements notamment au niveau du rythme pour que ça colle le plus possible aux images”, détaille Jérôme Casalonga, membre de l’ensemble Organum, chanteur et compositeur.
Grâce à une technique vocale particulière, il a été rappelé pour enregistrer, seul, durant une journée supplémentaire. “C’est une technique gutturale qui permet de créer un harmonique grave avec la voix. On fait vibrer les fausses cordes vocales avec les vraies cordes vocales. C’est utilisé chez les Mongoles de manière plus forcée et chez certains chanteurs sardes”, reprend Jérôme Casalonga.
"On ne devrait pas attendre un film à gros budget d’un Américain”
Si les deux hommes saluent une “belle opportunité”, ils déplorent un “manque de curiosité” général. “Je me rends compte qu’il faut souvent un regard extérieur pour comprendre la qualité de certaines choses. Ce film a beaucoup de moyens, en plus, c’est Napoléon... Il faut que les choses soient financées pour que les gens s’intéressent, mais la culture doit être vivante, on ne devrait pas attendre un film à gros budget d’un Américain. Ce n’est pas ça la vie, il y a d’autres actions menées au quotidien”, regrette Jérôme Casalonga.
Quant à Marcel Pérés, il n’attend rien de cette collaboration en termes de gain de popularité. “Pour voir notre nom, il faut être très attentif au générique... Et patient ! On doit apparaître après cinq minutes au moins”, ironise-t-il.
La version courte du film de Ridley Scott est sortie en salle en novembre dernier. Une version longue devrait être disponible prochainement.