Des hauts fonctionnaires du ministère de l'Agriculture soupçonnés de malversations au profit d'agriculteurs corses

La fraude se chiffrerait à plus d'1 million par an depuis 2016. C'est une entente entre hauts fonctionnaires, et représentants du monde agricole insulaire et de l'Union Européenne, qui aurait permis de contourner la règlementation de la PAC. 

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Trois hauts fonctionnaires, membres du cabinet de Stéphane Le Foll alors que ce dernier était ministre de l'Agriculture de François Hollande, en 2016, auraient été placés en garde à vue, selon le Canard enchaîné, qui révèle l'affaire dans son édition du mercredi 21 avril.

Ce qui leur est reproché, selon l'hebdomadaire satirique : avoir fait bénéficier certains éleveurs corses d'aides européennes de la PAC (politique agricole commune) auxquelles ces derniers n'avaient pas droit. 

Petits arrangements entre amis

Tout aurait commencé lors d'une réunion au ministère, rue de Varenne, en janvier 2016, assure le Canard. Des membres du cabinet de Sébastien Le Foll y rencontrent une poignée de syndicalistes et de représentants du monde agricole insulaire, mais également des fonctionnaires de l'Etat présents sur l'île, et l'Agence de services et de paiement, qui verse les aides accordées par l'Union Européenne. 

C'est au cours de cette réunion que certains des participants seraient  tombés d'accord pour détourner les règlements de la PAC, et distribuer plus d'argent que ce qui est prévu par les textes. 

Désormais, plus besoin d'être éleveur porcin pour toucher les aides européennes accordées pour l'exploitation des châtaigneraies et des chênaies, comme c'était le cas jusque-là. 

Tous, en Corse, n'auraient pas bénéficié de ces aides contestables, mais selon un signalement de l'Inspection générale des finances en date du 5 avril 2019, cité par l'hebdomadaire satirique, "le bénéfice irrégulièrement fourni (...) s'élève à près de 1,2 million d'euros par an".  

Une information judiciaire a donc été ouverte en décembre 2019 et la juge d'instruction  Virginie Tilmont est désormais en charge du dossier.  Nous avons tenté de joindre le parquet de Paris pour avoir des informations complémentaires, et connaître l'issue des gardes à vue supposées, sans succès. 

"Une époque révolue"

Nous avons contacté plusieurs éleveurs corses, qui ne se privent pas de souligner que la justice s'intéresse à des serviteurs de l'Etat, et pas à eux. Mais on se garde bien de commenter à visage découvert une affaire pour le moins sensible. Certains précisent néanmoins que ce sont les textes de la PAC sont contestables, et que les porcs sont loin d'être les seules bêtes à manger les châtaignes, vaches, chèvres et brebis étant également friandes du fruit emblématique de la Corse. 

Lionel Mortini, président de l'ODARC, l'Office du Développement Agricole et Rural de Corse, assure quant à lui que ces allégations concernent une autre époque. "Tout cela est derrière nous. On a lancé il y a trois ans un changement, et on s'en donne les moyens. Une page s'est tournée, on est sur autre chose, et la majorité des agriculteurs s'en réjouissent". 

Le conseiller exécutif se refuse à commenter l'affaire, mais n'hésite pas à parler, plus largement, de ce qu'il appelle l'Agri-bashing. "Tous les mois on sort un article sur l'agriculture corse, tous les deux matins on judiciarise, et ça ne sert à rien hormis à salir ceux qui travaillent. Il y a des gens tordus, on le sait, et on se bat pour que l'on ne connaisse plus, à l'avenir, ce genre de dérives".

 

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