Les réseaux sociaux se sont enflammés ces derniers jours en Corse suite aux propos de François Clémenceau, rédacteur en chef du Journal Du Dimanche sur la présence de conflits armés devant les bureaux de vote aux Etats-Unis, susceptibles d’être retrouvés en Corse.
Le 5 novembre dernier dans l’émission « C dans l’air », François Clémenceau, rédacteur en chef du Journal Du Dimanche déclarait :
« Bien sûr que pour nous français et européens, c’est ahurissant, c’est inimaginable. Cela ne se verrait nulle part, sauf éventuellement, pardonnez-moi, en Corse. Mais ici, aux États, voir des gens avec des armes dans les rues… ces dernières années, la législation sous Donald Trump, a été de plus en plus favorable au port d’armes. »
Le (gros) dérapage du rédacteur en chef du Journal du Dimanche, François Clémenceau. Dans C dans l'Air, sur France 5, il dit que voir des gens armés devant les bureaux de vote est inimaginable en France et en Europe "sauf, peut-être, en Corse". Le regard de Caroline Roux dit tout pic.twitter.com/8CX3d9IIYA
— Julien Pernici (@JulienPernici) November 5, 2020
Une déclaration en rapport aux violences de ces derniers jours aux États dans le cadre des élections présidentielles.
Un recours auprès du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel
Des propos qui ont provoqué une levée de boucliers en Corse et conduit François Clémenceau à s’excuser après avoir été interpellé par Jean-Christophe Galeazzi journaliste à France Télévision.
Je suis sincèrement désolé de ce raccourci caricatural qui n'avait aucune intention de blesser ou de choquer. La Corse et les Corses ne méritaient pas ce commentaire hâtif sur la violence et l'intimidation politique en démocratie. Toutes mes excuses, donc.
— FRANCOIS CLEMENCEAU (@Frclemenceau) November 5, 2020
Des excuses jugées non recevables par Pierre Olmeta, maire de Bisinchi, qui a décidé de saisir le CSA dans une lettre au nom de sa commune:
Joint par téléphone, le maire de Bisinchi explique que François Clémenceau a « fait son bon mot de journaliste parisien » et que ni lui ni Caroline Roux, animatrice de "C dans l’air" n’ont présenté d’excuses.
Une plainte adressée au plus haut sommet de l'état ?
L’élu indique "qu’aucune excuse ne sera recevable si elle n’est pas publique d’autant que ce n’est pas n’importe qui ! C’est le rédacteur en chef du JDD qui a une grande influence sur la pensée des élites ! Selon moi c’est un acte délibéré, qui plus est sur une émission du service public. » martèle-t-il.
Si Pierre Olmeta « ne se fait pas d’illusions par rapport au CSA » , il compte bien donner un second souffle à la procédure, quitte à ce qu’elle remonte au sommet de l’Etat « on n’exclue pas de faire une démarche auprès du Président de la République car on ne peut pas laisser faire cette stigmatisation par des gens qui ont un poids sur des élites. Mais on a l’impression que ça rentre dans les mœurs » déclare le porte-parole.
L’histoire en juge de paix
Pour autant, la présence d’armes en Corse lors des festivités de victoire à une élection, quelle qu’elle soit, n’est plus à débattre. Il s’agit davantage de traditions que d’une quelconque violence.
D’après le politologue Andria Fazi, la violence électorale était « classique jusque dans les années 1970 dans les duels Jacques Faggianelli – Jean Zuccarelli, et relativement présente jusque dans les années 1980 avant de disparaître dans les années 1990 ».
Cependant, « la civilité électorale a été longue à mettre en place par les pouvoirs nationaux. Les votes devaient, à l’origine, se faire sans pression » concède Andria Fazi.
Tradition festive ?
Une situation totalement différente entre Corse et États selon le politologue. Un contraste doit donc être établi entre des élections présidentielles exceptionnellement houleuses avec une participation bien supérieure à la moyenne aux États, et la Corse où la violence « systémique » a grandement diminué depuis une quarantaine d’années.
Et même si depuis une trentaine d'années en Corse la présence d'armes à feu lors de scrutins électoraux se limite à la dimension festive et traditionnelle, elle peut tout de même parfois susciter le débat.
En 2010, à la veille des élections territoriales et au lendemain de l'assassinat d'Antoine Casanova, un étudiant cortenais (l'année 2009 avait été marquée par une trentaine d'homicides), la communauté étudiante avait formulé la demande qu'aucun coup de feu ne soit tiré le soir des élections.