Les élections territoriales se tiendront les 20 et 27 juin prochains. Afin de mieux en appréhender les enjeux, France 3 Corse vous propose des dossiers thématiques. Episode 2 : les questions sociales.
En termes sociaux, la Corse enregistre de nombreuses difficultés. Un paradoxe : l'île fait face à un taux de pauvreté élevé alors que la vie y coûte plus chère que les autres régions de France métropolitaine.
Les chiffres clefs :
- 18.5 % des Corses vivent sous le seuil de pauvreté
- 27 % des familles sont monoparentales
- +8.9 % : majoration d'un panier d'alimentation en Corse par rapport au même sur le continent
- +6 % : majoration du prix des carburants en Corse par rapport au continent
Selon une étude de l'Insee publiée en 2018, 18.5 % de la population insulaire vit sous le seuil de pauvreté, soit quatre points de plus qu'en France métropolitaine, hors Île-de-France. Ces personnes perçoivent un revenu inférieur à 1.080 euros nets mensuels.
Dans l'île, la pauvreté touche davantage les retraités (22 %) que les actifs (15 %), alors que le phénomène inverse est observé au niveau national. La population insulaire étant vieillissante, les seniors représentent donc une part importante des personnes pauvres, jusqu'à une personne sur deux dans les intercommunalités rurales comme celles de Spelunca-Liamone ou Pasquale Paoli.
Vers une augmentation des demandes d'aide alimentaire ?
Pour s'en sortir, certains précaires se tournent vers les associations. Ainsi, le Secours populaire enregistre 2.000 bénéficiaires de l'aide alimentaire. Quant aux Restos du cœur, c'est environ 3.000 durant la campagne d'hiver et 2.000 durant celle d'été.
Un chiffre qui selon leurs responsables n'a pas forcément augmenté durant la crise du Covid19, mais les profils, en revanche, ont évolué, avec notamment l'inscription de nombreux travailleurs à la tâche (aide à domicile ou aide à la personne).
Pour autant, les deux associations s'attendent à un afflux des demandes une fois les aides gouvernementales suspendues. Afin de faire face au mieux à la crise latente, les deux associations étendent leur action dans le rural.
Le Secours populaire a ainsi ouvert trois nouvelles antennes à Porto, Sagone et Peri. Un déploiement que prévoient aussi les Restos du cœur avec l'ouverture d'un local à Porto-Vecchio qui permettra, notamment, de couvrir plus de communes lors des tournées dans le sud de l'île.
Des difficultés également rencontrées par les étudiants. À Corte, en 2019, l'université avait distribué 140.000 euros d'aides d'urgence, une somme qui a quasiment doublé en 2020 avec 220.000 euros d'aides versées. Un accompagnement complété notamment par la distribution gracieuse de denrées fraîches ou de plats cuisinés. Depuis mars 2020, 90 personnes sont concernées par ces dispositifs.
Un enfant sur quatre vit dans une famille pauvre
Avec 27 % de familles monoparentales, selon une étude de l'Insee réalisée en 2019, la Corse est l'une des régions où le phénomène est le plus marqué. Ainsi, en 2015, 12.400 foyers étaient monoparentaux, un chiffre en hausse de 8 % par rapport à 2010. Ces parents, seuls, sont davantage frappés par la précarité. Un tiers vit sous le seuil de pauvreté, à peine 34 % sont propriétaires de leur appartement contre 52 % chez les couples.
Selon une étude de l'Insee sur les impacts de la crise du Covid19 dans les intercommunalités de l'île, publiée en mai 2021, un enfant sur quatre vit dans une famille pauvre (24 %). C'est trois points de plus qu'en France, hors Île-de-France. C'est dans l'Oriente que la pauvreté touche la plus grande part d'enfants (41%), du fait de faibles revenus et de familles nombreuses. À l'opposé, le Celavu-Prunelli présente le taux de pauvreté infantile le plus faible, 10 %, en lien avec des revenus élevés et peu de familles monoparentales.
La crise a aussi entrainé une saturation des capacités d'accueil des enfants placés. En janvier 2021, 26 mineurs en danger ont été placés, presqu'autant que sur toute l'année 2020 avec 30 enfants pris en charge.
Un panier de courses plus cher
Face à cela, le coût de la vie dans l'île est particulièrement élevé. Premier exemple : en Corse, le panier de course est de 8,9 % plus cher que sur le Continent selon un rapport de l'inspection générale des finances réalisé en 2018.
Les particularités insulaires sont désignées comme principales responsables de l'inflation : le recours au transport maritime alourdi la facture, et les capacités de stockage limitées des magasins impliquent des livraisons de marchandises plus fréquentes que sur le Continent.
Enfin, la densité commerciale des grandes et moyennes surfaces de distribution alimentaire est plus importante en Corse, ce qui peut contribuer à la cherté des produits.
Cette problématique a été au centre des préoccupations, en 2019, durant la crise des gilets jaunes. Une initiative portant sur un panier de 230 produits à bas prix avait alors été lancée par la collectivité de Corse et les enseignes de la grande distribution.
Une facture plus élevée à la pompe
Second exemple : la Corse enregistre un surcoût du prix des carburants. D'après un rapport de l'Autorité de la concurrence la facture d'un ménage insulaire est en moyenne plus élevée de +6,7 % pour le gazole et de +5,3 % pour le SP95 (Insee 2015). Un différentiel qui affecte le budget de la population, très dépendante de la voiture dans ses déplacements.
Selon l'Autorité de la concurrence, ce surcoût pourrait être, là encore, expliqué par les contraintes imposées par l'insularité. Ainsi, l'île est approvisionnée en carburants uniquement par voie maritime, ce qui renchérit le coût de l'acheminement par rapport aux autres régions métropolitaines. De plus, en raison de la topographie de la Corse, le transport du carburant jusqu'aux stations-service est également plus coûteux.
En mars dernier, l'association Agissons Contre la Cherté des Carburants en Corse (A4C) a adressé une lettre au ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, dans laquelle étaient listées les raisons qui, selon l'organisation, expliquent la chèreté des carburants dans l'île. A4C y réclamait dans le même temps un système de régulation des prix. Une idée jugée "prématurée" par le ministre qui a répondu à l'association en mai dernier.
En matière sociale, la collectivité de Corse intervient dans le domaine de l'aide aux personnes les plus vulnérables (enfants, personnes âgées, handicapés) et en difficultés. Pour l'heure, les 10 listes en lice aux élections territoriales n'ont pas détaillé leur programme quant aux questions sociales.