Portés par des groupes de jeunes individus masqués lors de manifestations nationalistes depuis plus d'an, les scènes de guérilla urbaine se multiplient à chaque confrontation avec les forces de l’ordre. Quelles sont leurs motivations? Combien sont-ils ? D'où viennent-ils ? Témoignages.
D'une petite poignée à plusieurs dizaines selon les cas, mobiles et bien organisés, ces jeunes invoquent la loi du talion pour répondre à chaque "agression" des forces de l'ordre. Une violence qui s'en va crescendo à chaque rassemblement nationaliste dans l'île. Sans limite semble-t-il, ni contrôle...
En toile de fond de ces débordements, des revendications nationalistes déjà portées à l'Assemblée de Corse par la majorité territoriale. Mais l'action institutionnelle est jugée infructueuse.
En fonction des agressions que nous subissons, nous savons apporter une réponse.
"Nos élus sont face à une porte close à Paris, la lutte armée n’existe plus, donc la lutte qui se passe dans la rue actuellement semble être le seul moyen qui se présente à nous pour exprimer notre mécontentement."
"Nous sommes des militants de tous bords (…) Nous sommes le peuple, c’est-à-dire que derrière nous se cachent beaucoup de jeunes qui ont des convictions politiques."
Mais malgré un discours qui se veut politique, ces jeunes véhiculent surtout une image de casseurs pour l'opinion publique. Voitures brulées, agences bancaires saccagées, les dégâts matériels sont nombreux à chaque manifestation.
En mars, une nouvelle étape est franchie avec une attaque au cocktail Molotov du commissariat d'Ajaccio, par une poignée de très jeunes individus, semble-t-il issus d'un autre groupe. Un policier a été pris pour cible.Si nous ne voulons pas que notre peuple subisse une extinction pure et dure, il faut se battre.
"La société corse est actuellement menacée. Il y a beaucoup de précarité, il y a des fléaux comme le trafic de drogue aux quatre coins de l’île, notre langue est menacée. Si nous ne voulons pas que notre peuple subisse une extinction pure et dure, il faut se battre."
"Je pense que ce phénomène va s’intensifier dans les jours à venir s’il n’y a pas de réponse positive de l’Etat à l’instauration d’un climat de paix en Corse."
Des nationalistes mais pas seulement
Pour Thierry Dominici, sociologue et auteur d'une enquête sur les jeunes corses et la violence, qui a rencontré certains d’entre eux, "il faudrait s’interroger sur les tendances nationalistes mises en avant par ces jeunes"."Certains sont indépendantistes, d’autres un peu moins, j’ai noté surtout un nationalisme romantique chez les plus jeunes et puis d’autres qui ne sont pas nationalistes, qui sont altermondialistes, voire même étrangement certains se revendiquent libéraux.
Ce que j’ai noté auprès de cette jeunesse, c’est plus un solidarisme, une volonté de créer un collectif, une génération. Pour eux, il incarne le peuple."