Âgé de 37 ans, l’ancien capitaine emblématique du Sporting Club de Bastia met un terme à sa carrière de footballeur. Le joueur corse du RC Lens l’a annoncé ce mardi via son compte Twitter.

"Je sentais que j’étais à la limite. C’est donc le bon moment pour arrêter." Après plus de 17 ans dans le monde professionnel, Yannick Cahuzac a décidé de mettre un terme à sa carrière de joueur. Âgé de 37 ans, le milieu de terrain du RC Lens chaussera les crampons une dernière fois le 21 mai pour la réception de Monaco à Bollaert. L’épilogue d’une longue aventure footballistique débutée à 5 ans au Gazélec d’Ajaccio avant de se poursuivre de l’autre côté de Vizzavona.

Débarqué au centre de formation du Sporting à l’âge de 15 ans, dans l’ombre d’un grand-père qui avait marqué l’histoire du SCB, le petit-fils de Pierre Cahuzac deviendra par la suite le capitaine et le porte-drapeau d’un club dans lequel il restera 17 ans. Avec le maillot bleu, il découvre le monde professionnel en 2005 et connaîtra ensuite les plus beaux moments de sa carrière. Les plus douloureux, aussi.

Parti à Toulouse après la descente aux enfers du Sporting en 2017, puis à Lens deux ans plus tard, il aura su prouver qu’il pouvait "exister" en dehors de son île qu’il n‘aurait jamais imaginé quitter un jour. C’est donc avec la tunique « sang et or » sur le dos que le natif d’Ajaccio s’apprête à tirer sa révérence.

Pour France 3 Corse ViaStella, il revient sur les raisons qui ont motivé cette "décision pas facile à prendre". Et pose son regard sur l’ensemble de son parcours. Interview.

France 3 Corse : Après 17 années passées dans le giron professionnel, vous raccrochez les crampons à l’âge de 37 ans. Une décision difficile ?

Yannick Cahuzac : Elle n’a pas été facile à prendre mais je ne voulais pas faire l’année de trop. Cette saison a été plus compliquée pour moi sur le plan physique. À un moment donné, quand les jambes ne suivent plus, c’est difficile. Mentalement, j’avais envie de continuer. Mais le physique joue sur le mental et ça devenait compliqué…

Vous sentiez que votre corps ne suivait plus ?

Cela faisait déjà plusieurs années que c’était difficile. Néanmoins, jusque-là, j’arrivais toujours à compenser par autre chose. Mais plus les années passent, plus on sent leur poids dans les jambes, notamment au niveau des douleurs. Au quotidien, aux entraînements, ça devenait de plus en plus dur. Il y a aussi les jeunes qui poussent derrière. Néanmoins, je me sens toujours bien mais je ne voulais pas finir sur une blessure. Il y a des matins où je me lève et je suis en pleine forme, mais il y en a beaucoup d’autres où je me réveille avec une nouvelle douleur qui apparait et que je ne connaissais pas. Je ne veux pas trop tirer sur la corde et là, je sentais que j’étais à la limite. C’est donc le bon moment pour arrêter.

Vous jouiez également moins cette saison. Cela aussi a pesé dans votre décision ?

J’ai eu la chance de jouer titulaire quasiment tout au long de ma carrière. Cette année, c’était moins le cas. Même si j’ai 37 ans, on est là pour jouer au foot. Forcément, quand on joue moins, c’est toujours compliqué. De plus, rentrer en cours de partie ou jouer tous les deux-trois matchs devenait difficile, notamment en termes de niveau. Si je continuais, il fallait aussi que je puisse répondre présent sur le terrain. Et j’avais l’impression que ça commençait à être compliqué. Je ne veux pas être un boulet pour l‘équipe, je le vivrais trop mal. Ces différentes raisons m’ont donc conduit à arrêter.

Depuis 2005, vous avez joué plus de 450 matches en professionnel. Le gamin qui a grandi à Ajaccio, au Parc Berthault, s’imaginait-il réaliser un si long chemin dans le football ?

Jamais je n’aurais pensé pouvoir jouer autant de matchs, faire cette carrière-là, vivre autant d’émotions, et partager autant de grands moments avec mes coéquipiers, mes amis et ma famille. Je me sens vraiment privilégié d’avoir pu connaître tout ça. Il y a aussi beaucoup de fierté d’avoir vécu tous ces moments. Le football a toujours été ma passion. Je suis tombé très jeune dedans et j’ai eu la chance de pouvoir faire de ma passion mon métier. Là aussi, j’ai été un privilégié.

Vous êtes issu d’une famille de "footeux", avec un grand-père qui a marqué le football corse. Malgré tout, il n’y a jamais eu de pression familiale pour que vous fassiez carrière dans le foot…

Absolument. Pour mes parents, le plus important, c’était l’école. La condition sine qua non pour que je puisse continuer dans le foot était d’avoir mon bac. Ce que j’ai fait. Ça a aussi été mon leitmotiv de pouvoir rendre fiers mes parents au niveau scolaire. Une fois que j’ai eu mon bac, ils m’ont laissé la possibilité de faire du football mon métier.

Au cours de votre carrière, vous avez souvent porté le brassard de capitaine. Vous étiez un meneur sur le terrain mais un homme discret en dehors. Comment expliquer cette double facette ?

C’est vrai que c’est un paradoxe. Dans la vie, je suis introverti et sur le terrain je me transforme. Je deviens compétiteur et c’est peut-être ce côté-là qui prend le dessus car j’ai vraiment envie de gagner. Ça m’a aidé mais ça m’a joué pas mal de mauvais tours.

Cette image du joueur agressif qui prenait beaucoup de cartons, vous en avez souffert ?

Ce n’est pas quelque chose dont j’ai été le plus fier que l’on parle de moi pour les cartons plutôt que pour mon jeu. Après, je ne peux pas le renier. Ce n’est pas une fierté mais ça fait partie de ma carrière. À Bastia, j’avais tellement le club en moi que j’avais un surplus d’émotion. Je voulais combler à moi tout seul le manque d’agressivité ou de moyens de l’équipe. Ce qui n’est évidemment pas faisable. Ça a été préjudiciable pour moi, pour l’équipe. Après, par la suite, j’ai pris un peu moins de cartons. On apprend à tout âge et on murit. C’est vrai qu’il m’a fallu pas mal d’années pour que je grandisse à ce niveau-là (sourire).

De tous ces souvenirs sur les stades, quel est le plus beau ?

(Il lève les yeux). J’en ai des magnifiques, surtout avec Bastia : le titre de National contre Créteil (en 2011) à domicile reste un moment magique. On avait eu la pression toute la saison ; il fallait qu’on monte absolument sinon le club disparaissait. Dans la foulée, la montée en Ligue 1 en 2012. En 2015, la finale de la Coupe de la Ligue contre le PSG reste un grand souvenir, même si on l’a perdue. Après, à Lens, je garde en mémoire la montée en Ligue 1 et le retour du derby après Lille. Ce sont des grands moments que l’on vit avec nos supporters et ils sont marquants.

Du côté des regrets, on imagine qu’il y a la descente aux enfers du Sporting en 2017…

Oui. Ça reste l’un de mes plus gros regrets et aussi ma plus grosse déception. Il y a également eu la descente de Ligue 2 en National en 2010 qui a été dure à vivre. Mais en 2017, à 32 ans, ça m’a fait très mal de quitter le club sur une relégation administrative après y avoir passé 17 ans de ma vie. Voir le club quasiment disparaitre a été le moment le plus dur de ma carrière.

Sans cela, vous seriez resté à Bastia jusqu’à la fin ?

Oui. Si nous étions restés en Ligue 2 ou en National, je serais resté. J’y avais ma famille, 32 ans, j’avais encore envie de faire ma passion au plus haut niveau. Tant que le club était professionnel, je restais. En amateur, c’était différent. J’avais quand même l’envie et les jambes pour continuer en pro.

"La suite pour moi sera dans le foot. J’ai commencé à passer des tests pour obtenir mon diplôme d’entraîneur."

Yannick Cahuzac

Votre départ a en quelque sorte prouvé que vous pouviez vous faire une place ailleurs qu’à Bastia…

Complètement. Ça a d’ailleurs été mon leitmotiv. Quand j’étais à Bastia, j’ai souvent entendu dire « Cahuzac il joue parce que c’est Cahuzac ou que c’est Bastia ». Quand je suis parti à Toulouse, je m’étais fixé comme objectif d’essayer de m’imposer ailleurs qu’au Sporting. Ça a été l’une de mes fiertés d’avoir pu y arriver même si ça été un peu difficile, notamment à Toulouse. Avec le recul, ça a été valorisant et enrichissant sur le plan sportif et humain d’avoir pu exister ailleurs qu’à Bastia.

Maintenant que vous ne jouerez plus, où se situe votre avenir ? En Corse, sur le Continent ? Toujours dans le football ?

Je ne sais pas encore où je serai mais une chose est sûre, la suite pour moi sera dans le foot. J’ai commencé à passer des tests pour obtenir mon diplôme d’entraîneur. J’ai envie de continuer là-dedans. Ça fait un moment que je me pose la question. J’ai eu la chance de connaître de super entraîneurs qui m’ont transmis leur fibre et j’ai envie de me lancer, d’essayer et de me donner tous les moyens pour y arriver.

Si vous obtenez votre diplôme, un retour au Sporting serait-il possible dans les prochaines années ?

Ça serait fantastique ! Après, à moi de me donner les moyens d’obtenir mon diplôme. Car ce n’est pas parce qu’on a été un joueur de foot qu’on sera forcément un entraîneur. À moi de travailler pour y parvenir.

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